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A Prince in Womanhoodland [Pearl]

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MessageSujet: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyLun 10 Aoû - 23:45

La jeune femme était l’image même de la beauté. La robe légère qui la vêtait laissait deviner deux longues jambes fines impeccablement galbées. Le moindre de ses mouvements d’épaule faisait tressauter une poitrine magnifique. Un cou long et gracile soutenait sa tête ronde aux traits fragiles. Elle avait deux grands bleus scintillants bordés de longs cils soyeux, la couleur azur contrastant avec le pourpre délicieux de ses lèvres pulpeuses.

Liam aurait tout donné pour pouvoir l’envoyer valdinguer dans la fontaine décorative moche du restaurant. Il lui adressa son sourire le plus doux.

- Mais non, Vanessa, je vous assure que vos seins ne sont pas trop gros.

La blonde lui renvoya un regard où se lisait toute l’intelligence de la vache sous tranquillisant. Le sourire de Liam s’élargit.

- Mais… je ne les aime pas, bouda-t-elle avec une moue que n’aurait pas déparée deux ou trois paires de gifles.

- Vous êtes splendide, Vanessa. L’image même de la perfection.

A condition de ne pas compter « intelligente » ou « supportable » dans l’idée de perfection.

Une serveuse apporta le cocktail du jeune homme. Il s’en empara en lui adressant un sourire rapide, juste suffisant pour signaler qu’il l’avait bien remarquée. Il détestait sourire. Il était tôt mais il avait déjà mal aux joues. Il avala son verre d’une seule traite. Le goût de sa boisson était étrange, pas du tout ce qu’il avait demandé. Cette imbécile de serveuse avait dû se tromper – ou alors ils lui avaient donné un fond de tonneau. Il ne retournerait jamais dans ce bistrot de pauvres.

- J’ai de grosses cuisses, gémit Vanessa.

Et un petit cerveau.

- Mais non, la rassura-t-il de son ton le plus sincère. Vous êtes superbe. Votre cocktail vous convient ?

Il commençait à avoir chaud. Le cocktail ?

- Dé~li~cieux, pépia Vanessa.

Il avait mal au torse. Il y passa machinalement la main et subit dix minutes d’arrêt mental lorsqu’il y sentit deux… deux bosses.

Il n’avait pas deux bosses sur le torse.

Les femmes avaient deux bosses sur le torse.

Sous ses doigts, la bosse de droite était en train de grossir.

- Je crois que je dois partir, s’excusa-t-il. Je viens de me souvenir que mon père m’avait donné rendez-vous dans dix minutes.

Sa voix avait déjà commencé à devenir plus aigüe. Il se leva, ignorant le couinement surpris de Vanessa, et balança une liasse de billet sur la table pour calmer ses protestations. Il quitta le restaurant en courant, esquivant les quelques imbéciles en travers de son passage. Ses gardes du corps eurent au moins le réflexe de s’écarter devant lui, habitués aux caprices de leur maître.

- On ne me suit pas ! eut-il le temps de crier avant d’embrayer abruptement dans la ruelle qui s’ouvrait près de la sortie du restaurant.

Il ne pensait pas avoir jamais couru aussi vite de sa vie. Bon, il ne pensait pas avoir jamais couru de sa vie, à part devant son crétin de frère. Le temps qu’il juge avoir semé tout poursuivant potentiel à force de zigzags dans les ruelles tortueuses, ses poumons étaient en feu et ses jambes flageolantes.

Il s’adossa à un mur, se laissant glisser en position accroupie. Son trouble était tel qu’il ne s’inquiéta même pas des dommages qu’avait dû subir sa veste.

Bon. Réfléchir. Il avait des bosses. Des seins. Et d’après ce qu’il sentait, une part importante de son anatomie avait laissé place à quelque chose qu’il avait souvent vu entre les jambes de ses amantes. Ses épaules s’étaient étrécies – sa veste tombait moins bien – et ses hanches élargies – il se sentait un peu compressé dans son pantalon.

En bref, il s’était transformé en femme (ce qui avait probablement un rapport avec la serveuse et le mauvais cocktail). Et il s'était perdu.

Et personne, absolument personne ne devait le voir ainsi s'il ne voulait pas être la risée de toute la jet-set de Malkins.

Il se redressa lentement, élaborant un plan rapide. D'abord, il allait s'acheter des vêtements qui lui aillent mieux - et des chaussures, l'un des délicats chaussons de verre élastique qu'il portait été tombé de son pied à la sortie du restaurant. Ensuite, il allait se chercher un ou une compagnon/e qui puisse lui tenir compagnie afin de passer pour deux ami(e) ordinaires. Lorsque les effets de la potion s'estomperaient, il n'aurait qu'à fuir - sans perdre de chaussures cette fois-ci - et à contacter ses gardes du corps. Il en serait quitte pour devoir supporter un ou une imbécile inconnue pendant quelques heures, voilà tout.

Après quoi il ferait renvoyer la serveuse, non sans la faire balancer dans la fontaine. S'il s'y prenait bien, il pouvait ruiner ses possibilités d'emplois futurs dans les mois à venir - un petit scandale d'un personnage aussi influent que Liam Cavallonne pour, oh, une mouche dans son verre, ou un cocktail renversé sur son pantalon hors de prix, ferait l'affaire. Il n'avait même pas besoin de lui demander pourquoi elle avait fait ça : c'était probablement l'une de ses ex, ou elle avait été payée par l'une de ses ex - même résultat.

Un peu rasséréné par cette confirmation que la potion n'avait pas affecté son intelligence supérieure, il tituba vers la sortie de la ruelle et examina les nombreux passants qui parcouraient l'allée d'un oeil critique. Une blonde, un blond, un moche... ah, une brune de taille normale, presque plus petite que lui d'ailleurs. Il prit un air un peu fragile, style demoiselle en détresse, et s'approcha d'elle jusqu'à attirer son attention.

- Excusez-moi, mademoiselle ?... Je... Je suis désolée de vous déranger, mais... je suis perdue...
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyJeu 13 Aoû - 15:52



Sautillant entre deux cumulus, la rôtisseuse redécouvrait les avenues colorées de Verassoie. Cela faisait bien des années qu’elle n’avait planté pousse de haricot magique pour se retrouver à l’entrée de la cité des Sorcières. Elle avait d’ailleurs un peu perdu la main – le vieillard grincheux lui avait pourtant suggéré d’y aller doucement, avec l’arrosoir. Enfin, peu importe, maintenant qu’elle était là. Le visage dissimulé sous un chapeau à large bord – bout pointu, un peu tordu, le chapeau type de la sorcière - la petite jeune femme arpentait maintenant le pont arc-en-ciel, promenant son regard tout autour d’elle. Verassoie … Cela faisait bien longtemps qu’elle ne s’était laissée porter par la foule bigarrée de cette drôle de ville. Depuis son évasion, elle n’avait osé fouler de nouveau les pavés de Crumble Street et mine de rien, ça lui avait manqué. Alors ce jour-là elle avait dérogé à la règle qu’elle s’était définie, et elle était partie semer quelques pousses de haricot, pour pouvoir marcher entre deux nuages.

Pearl fuyait généralement les ombres du passé. En souvenir de ses années de réclusion, diète, jeûne et solitude, elle craignait maintenant les espaces clos et les alcôves sombres. Mais bien avant ces temps noirs, il y avait eu quelques ombres, vite estompées d’un coup de pinceau. Et bien des réponses dormaient encore sous les pierres des avenues de Verassoie. Pourquoi Pearl avait-elle souhaité y retourner, ce jour-là ? Il y avait bien des raisons officielles, et en premier lieu l’envie soudaine de se trouver un balai volant. Une volonté à peine tue de retour aux sources, quelques courses plus ou moins secondaires. Et, souterrainement, une curiosité malsaine à fouiller ses propres plaies. Théâtralement, la jolie sorcière sortit de sa petite besace une liste de courses et la consulta. Se faufilant dans la cohue, elle figurait encore assez bien une habituée du lieu. Les boutiques se bousculaient, sur les bas-côtés, et au-dessus de leurs têtes sifflaient les balais et les Witch Boards. Trop près, ils passaient décidément trop près. Pearl remonta légèrement le foulard fleuri qu’elle avait noué autour du cou. Sa gorge et le bas de son menton disparaissant derrière une mousseline vaporeuse, ornée de chrysanthèmes. La jeune femme s’était parée de noir, de gris. Un dégradé monochrome, des ombres dans lesquelles s’envelopper. Il y avait quelque chose de beau dans la simple majesté des habits noirs. Entourée d’une foule bariolée, entre deux bigarrures, elle se frayait alors un chemin, parée de dignité empruntée. Faire comme si elle était de nouveau chez elle. Comme s’il ne s’était rien passé.

C’est alors que son regard tomba sur une frêle jeune femme qui sortait tout juste d’une impasse. L’air égaré d’une demoiselle en détresse. Tandis que cette dernière approchait, Pearl la détailla, curieuse, intriguée. Cette inconnue se dirigeait-elle vraiment vers elle, petite, perdue dans la masse ? - Une poussière insignifiante parée des élégances du jour. La jeune femme eut un bref mouvement de panique, et plongea la main dans sa besace où, entre un porte-monnaie de velours noir, un poudrier et un miroir se cachait un poignard effilé – manche poli en bois de sorbier. En même temps … Plus la demoiselle s’approchait, plus la rôtisseuse se disait qu’elle ne pouvait être en danger. Alors qu’elle caressait distraitement le manche gravé, dans son sac, elle dévisagea la nouvelle venue. L'inconnue semblait … Égarée. Fragile, aussi, surtout. Pearl ne put s’empêcher de lui adresser un doux sourire. Quelque de chose de maternel dans la considération qu’elle exprimait, malgré elle.


- Excusez-moi, mademoiselle ?... Je... Je suis désolée de vous déranger, mais... je suis perdue...

Oh, vous aussi ? Pearl ne sut tout d’abord se l’expliquer, mais elle se sentit charmée par cette inconnue, rencontrée à un croisement de rue. Elle détailla d’un regard la veste déchirée et trop grande, les pieds déchaussés de la demoiselle. Et se sentit l’envie soudaine - le caprice ridicule – de la prendre sous son aile. L’accueillir dans ses ombres, un instant, et oublier les questions qui se posent, les désirs d’aller nulle part, pour guider quelqu’un d’autre. Qui vous ressemblait.

- Je vois cela, vous êtes dans un bien triste état … Que vous est-il donc arrivé ?

Puis elle réalisa qu’elle ne s’était pas présentée. Elle chercha une identité-masque derrière laquelle cacher un visage trop connu. Elle avait parfois pris des risques et joué des jeux de rôle aussi dangereux que passionnants. Aimait revêtir les airs de dignité blessée d’une famille lointaine, forte de préjugés anciens et d’interdits nouveaux. Il y avait parfois la tentation, lancinante, d’esquisser un sourire, et de révéler la vérité. Bonjour, je suis Pearl Mallown, une jeune femme ordinaire, respectable. Et j’aime cuisiner les enfants. Elle y jouait encore, à ce drôle de jeu, quand elle partait en virée avec Jack ou sa clique d’Epouvanteurs. Il était toujours tellement amusant – blessant. – de sonner à la porte du bout des ongles, et, d’une voix douce, de s’annoncer. Comme le ferait n’importe quel invité. Si les gens en riaient, elle leur laissait la vie sauve, et passait à une autre porte. Dans son ombre, le marionnettiste tirerait d’autres fils, en dépit de ses ordres et de ses illusions, et, pour une fois se dirait-elle, elle le laisserait faire. Mais si, alors qu’elle s’annonçait, parangon de politesse, chantre de savoir-vivre, si une saine horreur se peignait sur les visages, elle lançait sur eux les fureurs de ses déceptions, et une horde d’Epouvanteurs aux sourires carnassiers. Et la vie … Continuait. Comme elle pouvait.

-- Puis-je savoir votre nom ? Pour ma part, appelez-moi Calliope Mellow.

Elle réitéra son doux sourire.

Je reviens à Verassoie après un bien long voyage et j’ai sans doute oublié certains raccourcis, mais je connais encore bien cette ville. Je me ferai un plaisir de vous guider.

C'était vrai, en un sens. Après tout, ce n’est qu’en dissimulant le moins qu’on dissimule le mieux.


Dernière édition par Roast Witch le Ven 30 Avr - 11:40, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptySam 22 Aoû - 10:56

Maintenant qu’il se trouvait plus près d’elle, Liam pouvait distinguer clairement la jeune femme qui lui faisait face : pas mal faite, habillée de noir et de gris. Elégante - elle savait s’habiller et de manière originale, pas les lambeaux froufrouteux qu’affectionnaient tant les élégantes actuelles. A en voir sa besace et son chapeau pointu, c’était probablement une sorcière : sa main demeurait d’ailleurs plongée dans ladite besace. En un bref accès de paranoïa, Liam avait d’abord cru d’abord qu’elle y cherchait une arme. Le sourire rassurant de l’inconnue, cependant, avait immédiatement dissipé ses craintes.

- Je vois cela, vous êtes dans un bien triste état … Que vous est-il donc arrivé ?

Liam sentait confusément son don agir, façonnant ses réactions et ses pensées. Etait-ce vraiment de lui-même qu’il avait envie de se laisser reposer entre les mains de la jeune femme comme dans celles d’une mère aimante ? Hah, sûrement pas. Cependant, il ne pouvait pas empêcher la tentation d’exister, surtout quand il devait de toute façon jouer le rôle que son don voulait lui imposer. Innocente, frêle, un peu perdue... c’était tentant de laisser quelqu’un s’occuper un peu d’elle, non ?

… de lui, bon sang ! Il avait déjà assez de problème avec sa personnalité changeante sans perdre aussi son identité corporelle ! Si Renatta le voyait ainsi, elle éclaterait de rire.

Renatta. Etait-il plus belle que Renatta sous cette forme ? Elle serait tellement jalouse si c’était le cas… Ooooh, peut-être qu’il pouvait tirer quelque chose de cette situation. S’il réapparaissait ainsi à une soirée, convenablement habillée et maquillée… Il fallait qu’il vérifie dans un miroir si la féminité lui allait bien, mais il n’en doutait pas… Les journaux jugeraient sûrement la chose digne d’intérêt, et Renatta se tenait sans doute au courant des informations – elle avait, après tout, travaillé dans l’univers de la presse. Elle crèverait de jalousie, la coupeuse de tête !

Il se sentait mieux, soudain.

- Puis-je savoir votre nom ? Pour ma part, appelez-moi Calliope Mellow. Je reviens à Verassoie après un bien long voyage et j’ai sans doute oublié certains raccourcis, mais je connais encore bien cette ville. Je me ferai un plaisir de vous guider.

Le sourire de la jeune femme était doux et rassurant, la tentation de s’y abandonner presque irrésistible. Liam lui adressa un sourire timide et plein d’espoir.

- Je m’appelle Linda Falkshey. J’ai toujours voulu visiter Verassoie, c’est un endroit tellement fascinant… Mais lorsque je suis arrivée, une petite fille m’a prise à part pour me demander d’aider son grand frère qui s’était fait mal en tombant d’un toit. J’ai aussitôt accouru dans la ruelle où elle voulait m’entraîner… et je me suis faite agresser par quatre ou cinq adolescents armée.

Il (elle ? Il commençait à nouveau à penser à el-lui au féminin !) esquissa un sourire d’excuse.

- Je sais, c’est un piège à touriste classique, mais elle était tellement convaincante ! J’ai réussi à m’échapper dans l’état que vous voyez.

Une hésitation, comme pour demander une énorme faveur.

- Je… je vous remercie de bien vouloir jouer les guides, mais je n'ai nulle part où aller... je voulais juste visiter la ville. Si cela ne vous dérange pas, puis-je vous accompagner jusqu'à votre destination, quelle qu'elle soit ? Ainsi, je pourrais voir la ville par les yeux de quelqu'un qui la connaît... Et je ne vous gênerai pas trop.

La suite de ses paroles était claire : Je ne veux juste pas rester toute seule pour le moment, pas tout de suite après ça.
Il demeura muet(te) cependant. Il ne s'agissait pas de se jeter aux pieds de la jeune femme en la suppliant de l'adopter comme nouvel animal de compagnie, mais de lui offrir une possibilité. Les gens acceptaient beaucoup plus facilement vos propositions si vous les laissiez libre de choisir ; et puis la ligne était mince entre "fragile/ attendrissante" et "geignarde/collante".
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptySam 29 Aoû - 13:51



Il y avait quelque chose d’étrangement attendrissant dans les mimiques de cette jeune inconnue et Pearl ne s’était pas senti d’humeur aussi clémente depuis longtemps ... Mais il y avait un je-ne-sais-quoi dans l’attitude effacée de cette éplorée qui la charmait, presque malgré elle. La rôtisseuse, rabaissant un peu le bord de son chapeau sur son nez – vieux réflexe des poursuivis – se mit à écouter attentivement le récit des déconvenues de son interlocutrice. Au fur et à mesure que celle-ci parlait, son visage perdit ce joli sourire qui l’illuminait, habituellement, et elle pâlit. Il y avait, dans cette expression désolée de la compassion - sans doute - ; de la colère et de la révolte - surtout.


- Mais lorsque je suis arrivée, une petite fille m’a prise à part pour me demander d’aider son grand frère qui s’était fait mal en tombant d’un toit. J’ai aussitôt accouru dans la ruelle où elle voulait m’entraîner… et je me suis faite agresser par quatre ou cinq adolescents armés.

Pearl fronça les sourcils, imperceptiblement. Il était un temps où Verassoie n’était pas infestée de cette vermine infantile, et où les rues colorées de Crumble Street étaient tout à fait sans danger. Pour les sorcières comme pour leurs visiteurs. Elle leva les yeux, parcourut du regard la foule bruyante qui se pressait, partout, partout. Verassoie ne vivait plus uniquement de ses couleurs ou de ses saveurs. A présent, on y offrait des poudres de perlimpinpin, des chaudrons rouillés, et les sorcières se parodiaient elles-mêmes, pour quelques yubas de plus. Il paraît même … - Son cœur se serra à cette pensée. - Il paraissait même que nombre de secrets avaient filtré, et que Malkins, fort de ces savoirs nouveaux se détournait des étrangetés de Verassoie. Il y avait peut-être quelque chose de pourri dans le monde de la sorcellerie … Elle se promit, vaguement, d’y mettre bon ordre, quand elle n’aurait plus à jouer les fugitives. Et de redonner à cette ville qu’elle avait tant aimé, où elle avait trop vécu, ses couleurs et son sourire.

- Je sais, c’est un piège à touriste classique, mais elle était tellement convaincante ! J’ai réussi à m’échapper dans l’état que vous voyez.

- Ne dites pas cela.

Elle avait prononcé ces quelques mots d’un ton sec, presque tranchant. Un piège à touristes classique ? Allons bon … Pour se donner une contenance, elle sortit son poudrier, jeta un œil au petit miroir rond qu’il contenait. Puis, reportant son attention sur la jeune fille, sourit doucement, et reprit d’une voix plus douce :

- Dire que c’était un piège des plus classiques reviendrait à minimiser la gravité de ce qu’on vous a fait … Je vous avoue que je suis choquée par ce que je viens d’entendre, et je crains que les rues de Verassoie ne soient plus aussi bien fréquentées qu’auparavant …

Tandis qu'elle parlait, elle crut déceler, dans le regard suppliant de la frêle Linda, le même battement de cils, les mêmes grands yeux brillants. Se demanda, un instant, si elle n’avait pas en face d’elle, un reflet quelconque, un alter ego. Et si les séductions de la jeune femme n’avaient pas à voir avec ses propres capacités persuasives. Méfiante, elle en vint à se demander, sans trop pouvoir y croire, si ce n’était pas là une ruse destinée à l’attirer et la prendre au piège. Qui sait ? Les méthodes des Traqueurs et des Chasseurs de prime n’avaient jamais rien de très recommandable … Elle allait replacer le poudrier dans sa besace, mais s’arrêta, songeuse. Sans remarquer que son interlocutrice contemplait la boîte au miroir, une lueur d’intérêt au fond des yeux. Sans remarquer … Quoi que ce soit. Elle se demanda s’il n’était pas trop imprudent d’accepter la demande de Linda. Ce qu’elle risquait. En même temps … On ne pouvait mentir à propos de certaines choses. Et elle seule savait à quel point les jeunes gens pouvaient être cruels et sans scrupules. Elle détailla les vêtements déchirés de la jeune femme. Non, décidément ... Il y a des choses qui ne s’inventent pas.

- Bien ... Si vous le désirez … Je pensais aller m’acheter un balai volant – C’est assez … Folklorique, je le reconnais, mais il est toujours très plaisant de se laisser porter au gré du vent. Et il n’y a qu’à Verassoie qu’on trouve de balais à mon goût …. A croire que cette ville n’a pas encore perdu toutes ses notions d’élégance.

Il était un argument de taille, qui la poussait à accepter. A cette idée, Pearl sourit, et baissa la garde, une deuxième fois. La solitaire rôtisseuse rejetée des siens et qui courrait de par le monde ne se promenait pas en charmante compagnie. La jeune Linda, toute séduisante qu’elle était, constituait une couverture rêvée pour cette virée imprudente. Qui viendrait la soupçonner, elle et ses grands yeux, avec ses airs de princesse en détresse ? Pearl sourit, et invita d’un geste la demoiselle à la suivre, ingénument. Lui adressa un clin d’œil complice, l’air de rien.

- En route, donc ! - Si cela vous convient. Et espérons pour vos agresseurs que je ne les rencontre pas. Vous savez, j’ai horreur de la violence et de l’immoralité … Je vous promets bien que si je les croise, ils verront de quel bois je me chauffe !

Soit ... Il fallait espérer qu’elle ne les croise pas, ces délinquants d’infortune. C’eût été assez mauvais pour son incognito.
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyLun 31 Aoû - 13:45

Si Liam avait eu le moindre doute sur ses dons de persuasion, ceux-ci s’évaporèrent devant la manière dont Calliope blêmit de colère et de compassion.

- Ne dites pas cela.

Avait-il exagéré en modestie ? Il jeta un coup d’œil hésitant à la jeune femme, grimaça intérieurement en s’apercevant qu’il ne feignait qu’à moitié son anxiété. Il allait se taper cette personnalité soumise plusieurs heures après avoir quitté son interlocutrice, il le sentait. Plus il se fiait à son don et plus celui-ci gagnait en puissance. Ses gardes du corps allaient être ravis de sa docilité – sans compter que ces animaux passaient leur temps à vouloir qu’il soit plus sage, moins impérieux et plus doux. Il allait se transformer en mouton et il lui faudrait encore passer dix heures tout seul pour regagner une personnalité qui soit à peu près sienne.

Un éclat attira son attention : celui de la lumière sur le poudrier que venait de sortir son interlocutrice. Ooooh ! Il s’y trouvait sans doute un miroir et il pourrait voir à quoi il ressemblait. Excellente idée !

- Dire que c’était un piège des plus classiques reviendrait à minimiser la gravité de ce qu’on vous a fait … Je vous avoue que je suis choquée par ce que je viens d’entendre, et je crains que les rues de Verassoie ne soient plus aussi bien fréquentées qu’auparavant …

Son don aidant, ses yeux s’humidifièrent presque d’eux-mêmes plutôt que par ses talents de comédien. Il se composa l’air ému de rigueur et, dès que Calliope détourna les yeux, chercha à se voir dans le poudrier. Il n’aperçut que quelques éclats furtifs, mais ceux-ci le ravirent. Son visage était tout bonnement adorable. Sa chevelure mi-longue, ébouriffée par sa course, lui donnait un faux air de garçon manqué qui ne servait qu’à mettre en valeur la féminité fragile de ses traits ; les traits noirs qui soulignaient ses yeux en soulignaient l’éclat pur et la pâleur de son teint. Sa mâchoire avait un peu rétréci, arrondissant son visage, et ses lèvres un peu plus gourmandes achevaient d’adoucir la dureté de ses traits.

Bref, il était sexy. S’il s’était croisé dans la rue, il se serait aussitôt tombé dessus. Il était rare qu’il vienne flirter avec quelqu’un de son plein gré, à part par pur ennui ou pour ennuyer quelqu’un ; mais lui (elle ?)… S’il absorbait à nouveau une potion Vénus, il allait passer un certain temps nu(e) devant le miroir. Renata allait être blême. Il ne pouvait pas attendre de croiser une vitre pour se voir en entier.

Calliope lui sourit et lui exposa ses plans pour l’après-midi, l’air complice. Liam décida qu’elle était jolie, mais moins qu’elle. Que lui. Restait qu’il n’avait rien contre un peu de lèche-vitrine ; peut-être cèderait-il même à la tentation de s’en acheter un pour lui. Ca pourrait être une bonne idée : quelque chose d’élégant et de gracieux qui lui permettrait de faire de vraies promenades en solitaire, sans risque de croiser des lèches-bottes attirés par sa fortune.

Bon, il lui restait à apprendre comment maîtriser la bête, certes, mais il pouvait toujours demander conseil à Calliope…

- En route, donc ! - Si cela vous convient. Et espérons pour vos agresseurs que je ne les rencontre pas. Vous savez, j’ai horreur de la violence et de l’immoralité … Je vous promets bien que si je les croise, ils verront de quel bois je me chauffe !

Liam sourit d’un air reconnaissant à cette assurance, essuyant d’une petite main les fausses larmes d’émotion qui perlaient à ses yeux. Ses grands yeux bleus. Il était tellement belle. Il allait s’épouser et se faire un enfant tout seul.

- Merci beaucoup, lui affirma-t-il d’une voix pleine de reconnaissance et de joie contenues-mais-pas-trop. Ils ne dureraient pas plus de dix secondes face à vous, j'en suis sûre !

Une brève pause pendant qu'il emboîtait le pas de sa compagne :

- Peut-être me laisserais-je tenter aussi par un balais, alors - si j'ai les conseils d'une professionnelle comme vous, je ne risque pas de choisir un mauvais modèle ! C'est difficile d'apprendre à voler sur un balais ? Ca a l'air tellement joli et aisé pour ceux qui sont au sol - mais j'imagine que c'est une autre affaire une fois dessus...
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyJeu 10 Sep - 16:02


Pearl avait toujours beaucoup aimé les balais. Elle avait appris à voler, assez tôt, et dès qu’elle avait su manier l’objet, elle avait passé des heures, des nuits à errer dans le ciel de Verassoie, rêvassant entre les nuages. C’était une façon de se rendre inaccessible … Quand elle avait quitté sa ville natale, elle avait pris un vieux balai avec elle, l’avait elle-même rafistolé. Et toute sa vie, elle avait continué à chevaucher, le chapeau de travers, en amazone, les terres de Malkins. A présent, elle menait une vie bien sédentaire, mais elle avait gardé cette vieille envie, dans un coin de sa tête. Et puis elle s’était décidée à retourner à Crumble Street, voilée d’imposture, et de faire comme si elle retournait chez elle, juste un peu. Sylar ne lui avait-il pas dit de continuer à poursuivre ses rêves, quand bien même devrait-elle le faire dans l’ombre ? Elle l’avait pris au mot – comme ça l’arrangeait et, oubliant les tonitruances de ses nuits, elle était revenue. Voilà. Pearl sourit. La jeune femme lui avait emboîté le pas, c’était bien.

- Merci beaucoup. Ils ne dureraient pas plus de dix secondes face à vous, j'en suis sûre !

La rôtisseuse éclata d’un doux rire en songeant qu’en effet, ils couraient ce risque. Linda effleurait la réalité avec une gracieuse légèreté, sans trop s’en douter, et cela lui faisait plaisir. Douceurs de jouer avec les réalités à cacher, à demi-mots.

- Peut-être me laisserais-je tenter aussi par un balais, alors - si j'ai les conseils d'une professionnelle comme vous, je ne risque pas de choisir un mauvais modèle ! C'est difficile d'apprendre à voler sur un balai ? Ca a l'air tellement joli et aisé pour ceux qui sont au sol - mais j'imagine que c'est une autre affaire une fois dessus...

- Vous … Ils ne vous ont donc rien dérobé ?

Le sourire de Pearl s’effaça, un court instant. Un doute, léger, si léger ! Mais l’impression désagréable, un instant, que Linda lui mentait sur quelque chose. Se laisser tenter, aussi, par un peu de shopping ? La demoiselle, agressée par de jeunes gens sans pitié, pouvait-elle penser à chose si futile, et, plus concrètement, avait-elle encore de quoi, sur elle, succomber à une tentation si onéreuse ? La sorcière se retourna vers son interlocutrice, méfiante. Leurs regards se rencontrèrent, et elle baissa les yeux, troublée. Si fragile, si attendrissante … On la croirait, quoi qu’elle dise … C’était bien le problème.

- Enfin …Bravo à vous si vous vous êtes échappée à temps …

Chassant rapidement ses doutes, elle se répéta les paroles de la jeune femme, songeuse. Voler sur balai … Ces mots, qu’elle teinta de nostalgie, lui évoquèrent son dernier balai, celui qu’elle avait nommé Mimesis. Il avait fini en miette, sous ses yeux, et depuis, elle n’avait plus cherché à voler. C’était avant son arrestation – cela faisait déjà longtemps, mais le souvenir restait cuisant, malgré tout. Les regards d’horreur lors de la révélation, et sa dernière tentative, désespérée, d’attraper son balai magique et de s’enfuir, une fois de plus. Elle n’avait pas réussi, ce jour-là. Quand elle avait tendu la main, l’appelant à elle, Mimesis n’était déjà plus qu’un monticule de petits copeaux de bois. Un chef d’œuvre de beauté et d’élégance, réduit à rien. Comme ce ragoût épicé, si délicieux, qu’ils avaient osé emmener, une expression d’horreur sur le visage, pour le placer à la morgue – la scène avait quelque chose de foncièrement ridicule, mais lui semblait pourtant tragique. Alors que Linda s’éclaircissait la gorge, visiblement gênée par le silence de sa compagne, la jeune femme retrouva le sens des réalités, maudissant sa distraction. Et lui répondant enfin :

- Oh … Oui, un peu, au début. Enfin … Tout dépend de la façon de voler ... Si l’on fait ça n’importe comment, sans suivre les traditions d’ici, en fait, on tient assez facilement sur un balai, et on ne risque … jamais trop sa vie. Mais cela manque tellement de prestige !

Pearl se redressa alors, l’air suffisant.

- Le plus difficile, c’est de voler avec grâce et élégance, comme le font les sorcières.

Persuadée de son bon droit, toujours, et de sa légitimité à juger de vils épigones. Elle avait peut-être trop souffert pour gagner cette grâce étrange qui habitait ses gestes, parfois – vieux souvenirs de cours de vol et de règles de maintien. Tout en jaugeant du coin de l’œil sa jolie interlocutrice, la rôtisseuse ajouta cependant :

- Mais en vérité, vous qui êtes si jolie … J’ai confiance, je pense que vous êtes de celles qui savent plaire, et inspirer l’admiration … Vous apprendre vite, j’en suis sûre.

Et lui adressant un clin d’œil, elle lui prit la main, étrangement familière, et l’entraîna vers la boutique, ralentissant parfois pour admirer une robe noire, un set de potions, des chaudrons de cuivre, et nombre de petits articles qui avaient su accrocher son regard frivole. Au loin, décidément séduisante, l’enseigne du Placard à Balais, dorée à l’or fin, et ses promesses enivrantes.
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyDim 13 Sep - 17:42

- Vous … Ils ne vous ont donc rien dérobé ?

Le sourire de Calliope s'estompa légèrement, la méfiance transparaissant dans son regard. Les épaules de Liam s'affaissèrent. Bon sang, il avait complètement oublié - il n'avait réellement pas d'argent sur lui, celui-ci abandonné avec son sac à main sur le sol du restaurant. Il se sentait sincèrement peiné, conséquence de sa transformation en Linda, et le regard qu'il adressa à la jeune femme était plein d'un sincère désapointement.

- J'avais oublié... murmura-t-il, la voix teinté d'une déception presque enfantine.

La sorcière, cependant, semblait ravie de pouvoir parler de vol. Liam se sentait presque sincèrement admiratif en l'écoutant parler. La demoiselle avait de l'éloquence : ses discours inspiraient une envie sincère d'essayer. Il rosit lorsqu'elle le complimenta, sa tristesse soudaine lui faisant oublier de s'insurger contre cette preuve de l'emprise grandissante de "Linda" sur lui-même. Il tenait absolument à dissiper les doutes de Calliope, à lui prouver sa sincérité illusoire, et il ne savait même pas vraiment pourquoi.

- Merci...

Une pause, cherchant les mots qui pourraient l'expliquer, embarrassé et presque honteux, la main serrée dans celle de Calliope tandis qu'il la suivait à travers les ruelles.

- Je sais que je devrais être plus sérieuse après mon... mon accident (formulation pudique, un peu coupable, dédramatisation d'un évènement qui était à moitié sa faute après tout, elle aurait dû être plus prudente), mais... je ne veux jamais m'attarder sur mes malheurs. On m'a souvent accusée de mentir du coup, et je ne les blâme pas...

Un rire embarrassé qui se moquait surtout d'elle-même.

- Etre triste ne changera rien, alors je me suis toujours dit qu'il valait mieux aller de l'avant... Il y a certaines situations qui ne peuvent pas être changées, peut importe combien vous luttez... Alors autant vivre malgré tout, n'est-ce pas ?

Une sincérité chargée d'un certain poids ; elle avait vécu, vivait une situation qu'elle ne pouvait changer et qui la chargeait en permanence d'un poids de soucis, mais elle refusait obstinément de se laisser alourdir par la tristesse. Il fallait vivre, après tout. Soudain consciente d'en avoir trop dit, s'étant à son goût trop attardée sur ses problèmes, elle chercha à changer de sujet avec un rire embarrassé :

- Quelle idiote je suis ! J'aurais dû cacher un peu d'argent dans mes chaussures. D'authentiques robes de Verassoie et je ne pourrais en ramener aucune... J'en suis quitte pour revenir une autre fois !

Elle continua à orienter la discussion sur les marchandises qui défilaient sous leurs yeux pendant tout le trajet, manifestement désireuse de garder la conversation sur des sujets plus anodins.
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyJeu 17 Sep - 11:43


Impression soleil levant sur la devanture du magasin aux balais. Dans son dos, la mélodie chantante de la frêle Linda, qui égrenait ses justifications, maladroite, attendrissante. Chaque pas qu’elle faisait semblait appelé à trébucher – un pas de danse esquissé, à peine, et aussitôt abandonné, faute de place. C’était gracieux et un peu triste, à la fois. Pearl, sentant la pression de ses doigts fins, ralentit un peu la marche, se laissant bercer par la valse des justifications. Elle avait oublié … C’était sans doute bien naturel. Après un tel choc … Qui pouvait se targuer d’avoir su garder tous ses esprits, après s’être vu tromper, trahir … Violenter, peut-être ? par une bande sauvageons sans scrupules ? La rôtisseuse la laissa donc parler, lui jetant de temps à autres un coup d’œil bienveillant.

- Je sais que je devrais être plus sérieuse après mon... mon accident, mais... je ne veux jamais m'attarder sur mes malheurs. On m'a souvent accusée de mentir du coup, et je ne les blâme pas ...

Ces mots ne manquèrent pas de la laisser songeuse, pour un instant. Etait-ce trop de dire qu’ils l’avaient touchée, d’une certaine façon ? Elle leur répondit par ce doux rire cristallin, cet éclat fragile – joie et sanglot mêlé - qui la caractérisait, parfois. C’était drôle, mais cette jeune femme … Pearl avait parfois l’impression - au détour d’une phrase, dans un soupir, dans un battement de cils – qu’elle lui ressemblait. En plus jolie – c’était indéniable. Mais il y avait dans son attitude le même souci de plaire, d’une façon ou d’une autre. Mélopée des séductions innocentes, acte deux.

- Allons, moi je vous comprends. C’est une posture assez difficile à conserver, généralement, mais c’est sans doute la meilleure façon d’appréhender les revers de la fortune !

La demoiselle avait repris, livrant des mots semblables, et des impressions-reflets. Pearl cilla. Dans ses incessantes hésitations, elle se demandait, à chaque minute, si cela ne devenait pas trop personnel … Et si elle ne risquait pas de se trouver gênée dans ses menus projets, une jolie jeune fille sans-le-sou pendue à son bras. Pour le moment, dans la foule bien dense des rues de Verassoie, c’était un bonus de déguisement – et non négligeable ! Mais une fois ses emplettes terminées …

- J’espère du moins réussir à vous offrir quelques minutes de distraction, faute de pouvoir vous dépanner beaucoup … Et puis, j’espère que vous retournerez ici, plus tard, la méfiance en plus !

Elle lui adressa un clin d’œil complice, consciente de s’impliquer trop. Allez, elle pourra toujours la perdre, accidentellement, dans la foule. En lui glissant quelques Yubas dans le creux de la main, pour soulager sa conscience … Énième scrupule de sorcière respectable, sujet de bien des moqueries, mais bel et bien là, même après des années de clandestinité et de fuites dans l’ombre. C’était un de ces gestes, perdus parmi d’autres – une faille du raisonnement – qui légitimaient ses velléités. La plus belle de ses contradictions, qui , sans perdre son éclat derrière des barreaux, s’offrait maintenant le luxe de vivre, au grand jour. En toute impunité. S’éloignant des dernières boutiques de nouveautés sorcières qui semblaient avoir attiré le regard déçu de sa jolie interlocutrice, la rôtisseuse ajouta, d’une voix plus traînante :

- Il serait dommage de perdre les bons conseils que je suis à même de vous prodiguer ...

Elle leva une main, blanche, fine – un peu calleuse, à force de mettre la main à la pâte – et poussa la porte de la boutique. Une clochette tinta, mélodieusement. Et en ce bon matin, le placard aux Balais était encore désert. Tant mieux. Pearl avait craint que le magasin ne soit déjà bondée, d’autant plus qu’elle avait perdu de bien précieuses minutes, à se laisser séduire par sa nouvelle protégée. Soit, être capable de compassion contrariait bien des organisations et remaniait bien des emplois du temps … Irfane l’avait mise en garde, l’air amusé devant ses indignations et ses protestations d’innocence, mais il n’avait pas cherché à la faire changer. Et elle avait gagné le droit d’être elle-même … Les jours où l’on n’était pas pressé. Elle lâcha la main de Linda, et se tourna vers une petite vendeuse à la crinière argent qui se précipitait déjà vers elle, la submergeant d’un flot de paroles ininterrompues. Pearl sourit intérieurement : après la demoiselle en détresse, l’employée logorrhéique – le sort s’acharnait contre elle, et il était bien difficile, au final, de passer comme une étoile, en ne laissant qu’une traînée floue de souvenirs impalpables …Son identité d’emprunt compterait sans doute trop de minutes d’existence, à son goût – et à celui de ses collègues. D’un geste, elle se permit donc, le sourire le plus poli aux lèvres, d’interrompre sa bavarde interlocutrice :

- Oh, vous savez, je suis très intéressée par ces nouveautés, dont vous me parlez si bien … Mais aujourd’hui, bien malheureusement, je suis assez pressée. Je venais chercher un balai, performant – avec son caractère, cela ne me dérange pas, j’ai beaucoup d’expérience de vol, mais voyez-vous …

Tintement de clochette. Pearl jeta un œil, au dessus de son épaule, et aperçut deux silhouettes juvéniles arpenter les rayons, l’air curieux. Elle en profita pour intimer d’un geste à la jeune Linda de s’approcher un peu.

- Donc je vous disais, que j’avais pas mal d’expérience de vol. Il est vrai que j’ai dû arrêter quelques années – des problèmes de dos, vous savez ce que c’est … Mais à présent, me voilà en pleine forme, prête à goûter de nouveau à ce plaisir-là … Que me recommanderiez-vous donc … ? Je précise que je n’ai pas d’ordre de prix, voilà longtemps que j’économise pour m’offrir une de vos merveilles !

Elle battit des cils, et écoutant la vendeuse, qui semblait ravie de pouvoir reprendre la parole – et apparemment décidée à ne plus s’en laisser conter, la prochaine fois, elle fit le tour des rayonnages étroits de la boutique. Emboîtant le pas à la petite sorcière échevelée. Alors qu’elles passaient devant le rayon des Witch Boards, là où campaient toujours les deux silhouettes dégingandés de sorciers en devenir, Pearl déchanta rapidement, voyant que la vendeuse, apparemment partisane des grandes nouveautés, s’arrêtait un peu pour lui proposer d’essayer l’un de leurs nouveaux produits. Jetant un regard aux deux jeunes, qui semblaient s’agiter un peu, elle répliqua d’une voix plus sèche :

- Non non, je préfère un balai. Il ne faut pas mettre un terme aussi facilement …

Elle ralentit, observant les observateurs, qui la scrutaient avec insistance. Et chercha mentalement ses lignes de fuite. Au cas où.

- Aux … Bonnes habitudes. J’admets que ça doit être amusant, mais je suis sûre que je n’arriverais pas à tenir sur un objet comme ça !

Puis se tournant vers la demoiselle qui les avait suivies, timidement, elle demanda d’un ton cordial, sans se départir de cet air protecteur qui était le sien, depuis qu’elle l’avait rencontrée :

- Et vous Linda … Que préférez-vous, des balais ou de … Ce qu’on appelle, maintenant, des Witch Boards ?

- Fais gaffe à son ton doucereux. Paraît qu’elle attire ses proies comme ça …

Silence ... Un battement de cils. La rôtisseuse pâlit légèrement, sous son sourire. Une impression glacée, qui venait figer dans le givre ses espoirs et ses soupirs du jour ... Elle se tourna vers Linda, impuissante, espérant qu’elle n’aurait pas compris. Les deux adolescents se tenaient dans l’ombre, en retrait – expression morte et regards brillants.
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyVen 18 Sep - 23:23

Le Placard à Balais portait bien son nom. C'était un véritable entassement de balais et Witch Boards, que ce soit en marchandise ou en images, accessoire, publicités, Linda regarda tout autours d'elle, captivée. Il n'y avait personne, ce qui la réjouissait pour une raison inconnue - elle ne détestait pourtant pas les gens, même s'ils la mettaient un peu mal à l'aise.

Calliope la lâcha et la jeune fille suivit docilement son guide comme celui-ci se faisait accoster une toute petite vendeuse ronde et bavarde. Manifestement ravie d'avoir enfin trouvé un autre interlocuteur que ses balais, celle-ci s'empressa de lui vanter ses marchandises. Linda resta à quelques pas, désireuse de ne pas les déranger.

Liam. Elle s'appelait Liam. Il s'appelait Liam.

Il stoppa net, les yeux écarquillés. Liam, il s'appelait Liam et il avait oublié - pendant l'espace de quelques instants, minutes, il avait oublié ce qu'il était, nom, souvenir, statut, personnalité, juste pour convaincre Calliope, parce qu'il avait envie d'être crue cru et merde. Il avait parfois vécu des légers changements de personnalité lorsqu'il côtoyait trop longtemps un seul interlocuteur, surtout quand celui-ci ressentait un fort désir de le voir agir d'une manière ou d'une autre. Mais jamais il n'avait changé à ce point. Jamais jusqu'à disparaître à l'arrière-plan de son esprit. Il n'était pas choqué, il était terrorisé. Il avait envie de partir en courant, de trouver un coin solitaire où se recroqueviller et d'attendre que ça passe. Seule la certitude de se faire sauter dessus par une bande de voyous sitôt quittées les rues bondées du centre de Verrassoie le retint, ça et ses jambes en coton. Il accusait physiquement le choc, le battement de son coeur irrégulier et affolé.

Calliope lui fit signe et il s'efforça de reprendre un peu le contrôle. Quelques pas tremblants lui suffirent pour se trouver aux côtés de la jeune femme. Il sentit à nouveau l'envie de reprendre son rôle et le retint avec quelque chose qui ressemblait presque à de la panique mais n'en était évidemment pas, s'efforçant de limiter son don au niveau des attitudes et des mimiques. Il était Liam Cavallonne, insupportable prince, séducteur misanthrope - non, il était lui, voilà tout, et il jouait simplement un rôle.

Il s'efforça de se changer les idées, masquant son trouble comme il pouvait. Calliope résistait aux tentatives de la vendeuse pour lui vendre des Witch Board, ce que Liam approuvait. C'était des trucs de jeunes et il n'aimait pas les jeunes. Les ados étaient des spécimens particulièrement irritants d'êtres pensants. Qu'un adulte veuille imiter l'une de ces créatures nuisibles l'atterrait toujours autant.

Calliope se tourna vers lui, souriante. Il se sentit un peu mieux, sans doute à cause de son air protecteur, pas parce que Linda aurait été rassurée, juste parce que lui aurait été réconforté, voilà tout, ne pas se tourmenter, ç'avait été un incident né de la peur d'être découvert ou du désir de plaire - envie assez inédit pour lui. Peut-être Calliope avait-elle le don d'attirer la sympathie ou d'amplifier les pouvoirs des autres ; lui demander aurait été indiscret et dangereux.

- Et vous Linda … Que préférez-vous, des balais ou de … Ce qu’on appelle, maintenant, des Witch Boards ?

Comme s'il avait besoin d'y réfléchir pour répondre ! Entre balais de sorcière et planche à pain volante, le choix était vite fait. Liam hésita cependant, parce que Linda aurait hésité, toujours craintive à l'idée de sembler trop sérieuse ou sûre d'elle-même. Quelqu'un l'interpella à cet instant, la voix assurée et traînante.

- Fais gaffe à son ton doucereux. Paraît qu’elle attire ses proies comme ça …

Gné ? Ton doucereux ? Proies ? Il cligna des yeux, incompréhensif, et se retourna à moitié vers la fille qui venait de parler - une adolescente maigre et jaunâtre qui semblait vouloir dissimuler une féroce poussée d'acnée sous un chapeau ridicule. Celui-ci penchait sur le côté sous le poids des badges de groupes et des gris-gris adolescents qui l'ornaient, lui donnant un air coquin qui brisait totalement l'effet du sourire entendu et méchant que partageait le fil de fer humain qui l'accompagnait. Liam la contempla avec incompréhension. De qui parlait-elle ? La vendeuse ? Lui ? Etait-il, sous cette apparence, le sosie d'une arnaqueuse célèbre ? Ou d'une connaissance haïe des deux filles...

Il recula tout près de Calliope, cherchant machinalement refuge auprès de la jeune femme, le regard toujours fixée sur les deux adolescentes. Un peu dégoûté par la réaction apeurée qu'exigeait son rôle (son rôle, juste son rôle, ce n'avait pas été un réflexe), il s'efforça de reprendre l'initiative.

- Puis-je savoir de quoi vous parlez ?... demanda-t-il de sa voix la plus ferme, c'est-à-dire pas grand-chose.

Ah, si ses gardes du corps avaient été là ! Les deux candidates au titre de Miss Moche auraient déjà été balancées par-dessus le bord de Verrassoie...
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyJeu 24 Sep - 21:54



Il lui faudrait sans doute partir. Au plus vite. Pearl avait beau s’être acheté une contenance, à force de temps passé à suivre le Loup, pas à pas – évoluer dans son ombre – elle sentait une peur étrange sourdre, peu à peu, en elle. Ce n'était pourtant pas la première fois, et elle savait faire preuve de davantage de sang-froid, dans les bons jours ... Mais là ... C'était égarée dans cette ville qu’elle avait évité, durant toutes ces années, lorsqu'elle avait baissé sa garde, pour les beaux yeux d’une égarée ... Là, c'était un jour … Où elle ne s’y attendait pas. Que lui restait-il, à présent ? Nier, haut et fort, en déchaînant ses forces persuasives ? Elle avait déjà gagné du temps, comme ça, juste assez pour filer comme un rêve – et qu’on n’entende plus parler d’elle ! Fuir, tout de suite, sans un mot de plus – ce qui serait l’accuser davantage ? Voyant Linda reculer doucement vers elle, elle opta pour le malentendu, et la vertu offensée. La voix de la frêle demoiselle s'éleva alors, mal assurée, mais défiante : Puis-je savoir de quoi vous parlez ?... La rôtisseuse souffla un peu : par chance, elle n’avait pas saisi l’allusion … Posant délicatement ses mains sur les épaules de la demoiselle, figure type, rassurante et protectrice, elle fronça donc les sourcils, et laissa tomber chaque mot, bien distinctement. Avec l’assurance de ceux qui n’ont jamais rien eu à se reprocher.


- Je vous conseille, jeune fille, de réfléchir un peu avant de lancer des accusations infondées. Aussi dangereuses et aussi ridicules, qui plus est ! Tenez un peu plus votre langue, je vous prie.

Elle se tourna, mondaine, vers la vendeuse qui regardait la scène, bouche-bée ; un verbe, un nom, une idée qui lui pendaient aux lèvres … La rôtisseuse s’offrit alors le luxe d’un sourire – était-ce si terrible ? A première vue, la scène lui semblait bien absurde … Naïve provocation d’adolescent, peut-être. Naïve ... Néanmoins dangereuse si on n'y mettait bon ordre.

- Comment donc aurait-on pu me confondre, moi, si respectable, si serviable pour cette demoiselle, avec une dangereuse criminelle recherchée par la Police ? Dites-moi franchement …

Et elle battit des cils, adressant un clin d’œil à son portrait, qui trônait là, au-dessus du comptoir, à côté d’autres visages – collage malhabile de vies imaginaires, et d’aspirations différentes. Elle était là, elle aussi – sous son meilleur profil, d'ailleurs. Avec son air d’innocence, et toujours un peu trop reconnaissable, précisément à cause de ça. Elle jeta un regard aux deux adolescentes. Celle qui s’était avancée, pleine de morgue, de défiance, de haine mal dissimulée semblait hésiter, se tordant nerveusement les mains, comme sous le coup d’un intense combat intérieur. Leurs regards se croisèrent, celui de l’adolescente débordant d’un ressentiment, trop longtemps tu, celui de la sorcière brillant étrangement, derrière son air offensé. Pearl papillonna un peu, douce, tendre pour un instant encore, regrettant les accusations, les dangers, et les sourires arrachés. Elle reprit d’une voix ferme, cherchant à dissimuler ces vieux résidus de peur là où personne ne pourrait les voir, et à passer pour une jolie et innocente sorcière. Qui lui ressemblait trop. Mais qui était gentille quand même.

- Arriverais-je donc à vous faire entendre raison, jeune fille ?

Si elle n’avait pas les mains posées sur les frêles épaules de Linda – qu’elle ne souhaitait lâcher sous aucun prétexte, pour des raisons qui lui étaient propres – elle lui aurait tendu une main et un sourire, comme à un animal blessé, à recueillir dans son giron. Et …

- Ouais, c’est ça. Comme si j’pouvais pas t’reconnaître, alors qu’on parle sans cesse d’tes horreurs, dans la famille. T’as-tué mon …

Pearl ne l’écoutait plus. Peu importe quelle créature piaillante et baveuse elle avait occis. Elle lui avait même, sans doute, rendu un fier service, en lui évitant d’avoir à fréquenter cette silhouette dégingandée à l’allure si vulgaire. Ce qui avait attiré son attention, c’était le geste de panique de son amie, qui lui avait tiré le bras, timidement, dans l’espoir de la faire taire. Et sa main tremblante qui, fouillant dans une poche, en sortit un petit objet aux couleurs acidulées, le tripota nerveusement …

- Vous me croyez pas vous ? R’gardez, j’suis sûre que c’est elle …

La deuxième demoiselle poussa alors un petit cri suraigu et se précipita dehors. La porte s’ouvrit en toute volée, avec fracas. Silence ... Seule la petite clochette tintait, ironiquement. Il dura quelques instants, ce pesant silence, empli de gêne, de doutes, d'envies de ne pas y croire, planant entre la rôtisseuse, qui tenait Linda peut-être un peu trop fermement, la vendeuse qui s’agitait, ne sachant sur quel pied danser et l’adolescente, le menton relevé, provocante, sûre de son bon droit. Et inconsciente de sa propre imprudence. Alors … Il n’y avait plus grand-chose à faire : il fallait partir … Et tant pis pour les autres invitations de la liste de courses et pour la belle journée ensoleillée. Pearl, voyant la défiance – l’avidité ? Saletés de récompenses ! – naître dans les yeux de la petite vendeuse, voyant l’adolescente, qui hésitait encore, prête à foncer – vers où ? vers quoi ? – , Pearl voyant tout cela et ne sachant qu'en penser, se décida. Tirant Linda à elle, elle s’élança vers un balai – ou bien était-ce le balai qui, par hasard, s’était élancé vers elle ? - et le saisit d’une main. Tout en l’enfourchant, elle poussa la demoiselle effarée à faire de même. Un dernier regard, battement de cils, et elle s’envola, passant par la porte. Un vous m'excuserez, je suis pressée d'une voix délicieusement chantante, les couleurs folles d'une foule étonnée, devant la boutique, d'en voir sortir deux silhouettes déjà montées sur un balai, et le bleu clair du ciel de Verassoie. Plus haut. Au-delà des derniers nuages.

En passant à proximité du comptoir, la rôtisseuse avait veillé à jeter une bourse chantante, débordant de Yubas. Après tout, elle était une sorcière respectable ...

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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyLun 28 Sep - 18:43

Calliope posa les mains sur ses épaules et Liam ne put retenir la satisfaction bête et humiliante de se savoir protégée. Elles avaient l'air étrange, les adolescentes - semblaient sincère et pourtant, qu'est-ce qu'elles allaient accuser...

Puis Calliope prit la parole et il comprit, un peu à retardement, qu'elles avaient attaqué sa protectrice. Hein ? Elle n'avait ni la tête ni l'allure d'une criminelle ! Elle aurait sûrement refusé d'assister une jeune fille en détresse si elle avait été méchante, non ? plaidèrent ses instincts Lindaesques.

... Sauf si elle avait souhaité se trouver une couverture, objecta sa personnalité principale avec cynisme. Qui irait suspecter une demoiselle fort respectable accompagnée d'une niaise aux grands yeux bleus ? Sans offense pour lui-même bien sûr ; il était terriblement canon sous cette forme, il le savait parfaitement - ah, ses hanches pleines, sa cambrure délicate, ses seins fermes, sa bouche pulpeuse... Bref...

Bref. Bref, il n'arrivait pas vraiment à croire, malgré toute raison, que Calliope puisse sérieusement être une criminelle. Pourquoi pas une Epouvanteuse (Epouvantrice ? Epouvantesse ?), tant qu'on y était ? Tiens, Alice sous un charme de dissimulation, tant qu'on y était. Ou alors c'était une arnaqueuse à la petite semaine ?

L'attaquante en chef, cependant, vint réduire toutes ses hypothèses à néant.

- Ouais, c’est ça. Comme si j’pouvais pas t’reconnaître, alors qu’on parle sans cesse d’tes horreurs, dans la famille. T’as-tué mon …

Sortie d'un objet coloré, et fuite de la deuxième jeune fille. Liam n'y faisait plus trop attention, concentré sur la poigne ferme que Calliope maintenait sur ses épaules et sur les informations qu'on venait de lui asséner.Comment ça, tué ? Et tué qui ? Et aaargh !

Le aaaargh, resté muet, répondait à un brusque décalage de son univers personnel sans doute causé par la pression subite que Calliope avait exercé sur son poignet. Il lui fallut une demi-seconde de confusion pour comprendre qu'on l'avait tiré vers quelque chose ; le temps qu'il saisisse que la situation tenait à désirer, il avait déjà suivi les directives de Calliope et s'était installé sur un balais, ce qui était entièrement de la faute des instincts soumis de Linda pour autant qu'il était concerné et bon sang il fallait qu'il arrête de parler de Linda comme si elle était réelle et, cette fois-ci, il cria franchement lorsque Calliope fit voler le balai.

Les balais et Liam avaient toujours entretenu une relation purement esthétique. Il regardait des gens voler sur un balais, il éprouvait brièvement la tentation de grimper un jour sur l'un d'eux et il s'abstenait soigneusement. En échange, les balais comprenaient qu'il ne souhaitait pas se retrouver à voler dans les airs sur un frêle bout de bois, à la merci du premier canard passant, et évitaient de se retrouver avec lui dessus.

La situation présente était une violation du pacte, d'où l'état de chaos des éléments. Calliope demeurait droite et gracieuse telle une hirondelle ; Liam, lui, demeurait agrippé à la taille de la jeune femme en se retenant de crier qu'ils allaient tous mourir pendant que le balais fendait l'air avec une satisfaction presque sensible. Pendant une brève fraction de secondes, il songea que la jeune femme était en réalité une tueuse qui abordait les gens, gagnait leur confiance et les emmenait ensuite en promenade à balais pour les balancer dans le vide. Puis l'hystérie baissa et il se raisonna un peu : avec une méthode pareille, Calliope aurait dû attendre longtemps avant de faire sa première victime. Retour à la case angoisse et perplexité, donc. Où allaient-il ? Que faisaient-ils ? Il passa bien dix minutes à ruminer ces question avant de comprendre qu'il lui suffisait de les poser.

- Que se passe-t-il ?... demanda d'une voix apeurée mais suffisamment forte pour couvrir le vent.

Il n'avait pas peur de la hauteur à laquelle ils volaient. Sérieusement. C'était juste le sol qui lui l'angoissait un peu.
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyJeu 1 Oct - 16:27


Pendant un temps, il n’y eut plus d’angoisse, plus de questions : juste la caresse du vent sur son visage, juste l’étrange ivresse que lui procurait toujours le vol … Dans l’urgence de l’instant, Pearl avait retrouvé les gestes nécessaires, ses habitudes, ses réflexes, sans avoir à réfléchir – son corps avait, en somme, décidé pour elle. Elle savoura le souffle frais du vent, se risquant même à fermer les yeux, une ou deux secondes, frissonnant un peu alors qu’ils s’élevaient, perçant la voûte des nuages. La pression des mains de Linda, assise derrière elle, vint confirmer les propos que la jeune fille lui avait tenus : il était clair qu’elle n’avait pas eu la chance de goûter encore ces plaisirs – et ces frayeurs-là. Mais une fois le danger plus ou moins écarté, alors que les deux femmes évoluaient bien haut, à l’abri des regards et des sorcières indiscrètes, les choses semblèrent tout d'un coup moins simples. Si Pearl avait su manier ce balai, par instinct, c'était à présent une autre paire de manches : plus elle réfléchissait à ce qu’il fallait faire pour mener un balai, plus elle perdait cet élan premier, plus vrai, plus spontané, qui lui avait permis de maîtriser sa monture, jusque là. Le manche de bois tremblait un peu sous ses doigts, et on sentait là réticence des bêtes folles refusant d’être montées par des amateurs. La rôtisseuse fronça les sourcils, resserrant la pression de ses mains sur le bois, suppliant mentalement l’objet de ne pas les éjecter, sous le coup d’une humeur ravageuse. Si, comme elle en avait eu l’impression, le balai s’était tout autant jeté sur elle qu’elle vers lui, elle en avait sans doute déniché un capricieux. Et exigeant. Tout ce qu’il … Ne fallait pas, quand on reprenait le vol, après bien des années à demeurer bêtement sur la terre ferme.

- Que se passe-t-il ?...

Elle tressaillit, et jeta un coup d’œil derrière elle. Elle se trouvait là bien embarrassée, avec cet otage qui ne semblait pas trop avoir conscience de sa condition. Au final, c’était plutôt bon signe – inspirer la sympathie et la confiance était un luxe qu’il était bien agréable de s’offrir, quand on faisait partie des Epouvanteurs … Mais en même temps … Réfléchissant à ce qu’elle pourrait lui dire, à la façon dont elle pourrait s’en débarasser, Pearl souffla à son interlocutrice, de l’air un peu gêné de ceux qui vous offrent une nouvelle contrariante :

- Accrochez-vous, je vous prie. N’ayez pas peur de vous agripper à moi. Il serait tout de même regrettable que vous tombiez de si haut …

Quoique … D’un autre côté, un accident de ce genre avait ses côtés pratiques. Pearl n’eut cependant pas le temps de développer cette réflexion toute pragmatique : le balai semblait bien peu désireux de continuer à cette allure, et monté par deux jeunes femmes si peu au fait des convenances aériennes. Les tremblements nerveux se muèrent en secousses. Légères, certes, mais à cette hauteur, à la merci des vents, et sans cette assurance que les habitudes vous donnent … Nerveuse, Pearl lança, sans oser se retourner, d’une voix un peu trop tremblante – et sans pouvoir offrir ce sourire, qui accompagnait ses persuasions :

- Voyez-vous, j’étais un peu trop pressée pour me prêter à ces enfantillages – n’ont-ils pas quelque chose de trop dangereux ? Un présumé criminel aujourd’hui ne fait pas long feu … Alors, plutôt que d’attirer des ennuis à ces demoiselles, et pour protéger ma réputation, je suis partie …

Elle se promit cependant de les retrouver, coûte que coûte, et de les cuisiner à sa façon. Très épicé, ou fort poivré, comme l’amertume qu’elles lui avaient offert, par leurs accusations et leur agressivité.

- Vous me direz que cela ne fait que m'accuser davantage. Mais songez-y… Une criminelle aurait-elle laissé sa bourse, pour payer, malgré tout ?

Qui rassurait-elle, au fond ? Et se répétant mentalement cette dernière phrase, bercée de la quasi-certitude du bien-fondé de ses actes, elle chercha à descendre, ignorant les protestations de l’objet. Ils avaient survolé les étendues colorées de Verassoie, qui lui avaient offert tous ses regrets, dans une belle image de carte postale. Il s’agissait à présent de trouver un endroit désert, reculé – hostile – et d’y déposer cette fragile jeune fille, à la merci … Du hasard. Elle était bien aimable, cette demoiselle, mais Pearl ne pouvait la garder auprès d’elle indéfiniment … Il lui sembla que Linda lui adressait quelques mots – avait-elle rêvé ou la voix de la jeune fille était devenue plus grave ? – mais elle ne sut les comprendre, recouverts qu’ils étaient par le vent qui sifflait, à leurs oreilles. Et le balai descendait, grondant, comme un chien prêt à mordre. Aux portes de Verassoie, sortant, nimbée de goutelettes d’eau, de la dernière vague de nuages, Pearl avisa à l'horizon une petite plaine un peu marécageuse, baignée de brumes sales, et la choisit pour destination. Étrange comme le balai semblait rechigner, de plus en plus, à porter les deux femmes – la rôtisseuse éprouvait d’ailleurs une difficulté croissante à le manier, comme si elle devait composer avec une passagère au poids mal défini et à la carrure changeante ... Singulière impression.

Après quelques instants, elle se posa enfin, un pied dans la boue – pestant contre les complots du sort, et la saleté sur ses bottines vernies.


- Je vais malheureusement devoir vous prier de descendre, mademoiselle. Je ne puis vous emmener là où je vais.

Elles étaient un peu trop loin de Verassoie, et qui sait ce qui traînait dans ces marécages … Cependant, Pearl se tourna vers elle, et dit d’une voix chaleureuse :

- Verassoie n’est qu’à quelques pas. Je ne puis, comme vous le savez, vous donner quoi que ce soit, puisque j’ai jeté mes économies par la fenêtre, tout à l'heure …

Toute à son discours, elle n’avait tout d'abord pas remarqué les changements qui s’opéraient, doucement, sur le visage de sa jolie interlocutrice. Pour s'envoler, elle tapa du pied sur le sol, ignorant avec stoïcisme les giclures de boue sur ses voiles et ses foulards, et s’éleva légèrement, en agitant la main. Était-ce le recul qu'elle prenait alors, sur ce qu'elle voyait, et sur les choses ? Ce ne fut qu’à ce moment-là qu’elle réalisa qu’elle ne s’adressait plus à sa demoiselle. Et si l'on devinait encore la fragile et féminine beauté de Linda, dans la constitution de ce nouveau personnage, on ne pouvait nier qu'il y avait là métamorphose.
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyDim 4 Oct - 17:51

- Accrochez-vous, je vous prie. N’ayez pas peur de vous agripper à moi. Il serait tout de même regrettable que vous tombiez de si haut …

Comme si Liam avait besoin d'un rappel du fait qu'il était à quelques centaines de milliers de kilomètres au dessus d'un sol extrêmement dur et douloureux. Il s'accrocha un peu plus fort pour toute réponse, conséquence à nouveau de son satané besoin de protection - un peu plus faible maintenant qu'il luttait consciemment contre l'exaspérante "Linda", mais si peu ! Soit il était une période d'ultra-sensitivité envers son "don" - malédiction, plutôt, à son humble avis -, soit la jeune femme avait un pouvoir quelconque... charme ou capacité à inspirer la confiance, peut-être.

Les tremblements soudain du balai, cependant, lui changèrent rapidement les idées. Il savait que les balais pouvaient parfois être légèrement instables - le vent, les perturbations climatiques, tout ça - mais c'était quand même quelque peu angoissant. Ils étaient passé de "tremblements inquiétants" à "quasi-secousse paniquantes". Il espérait seulement que Calliope pouvait respirer malgré la prise très ferme, peut-être un peu trop, qu'il maintenait sur sa taille. Sa fin serait vraiment embarrassante s'ils s'écrasaient parce qu'il avait brisé les côtes de sa conductrice. Semblant deviner ses pensées, celle-ci tenta de le rassurer d'une voix un peu vacillante :

- Voyez-vous, j’étais un peu trop pressée pour me prêter à ces enfantillages – n’ont-ils pas quelque chose de trop dangereux ? Un présumé criminel aujourd’hui ne fait pas long feu … Alors, plutôt que d’attirer des ennuis à ces demoiselles, et pour protéger ma réputation, je suis partie … Vous me direz que cela ne fait que m'accuser davantage. Mais songez-y… Une criminelle aurait-elle laissé sa bourse, pour payer, malgré tout ?

Lin... Liam aurait voulu se laisser convaincre par sa voix apaisante, se laisser aller - c'était tellement facile de faire confiance à cet air honnête et sûr de son bon droit, mais... justement, c'était trop facile et le prince ne pouvait s'empêcher de ressentir à nouveau un élan de panique à l'idée de se laisser à nouveau aller et de redevenir - non, pas devenir, il n'était jamais devenu quoique ce soit d'autre que lui-même, juste un peu plus soumis que d'habitude et ça n'aurait pas duré, n'importe comment, parce qu'il serait fatalement redevenu mâle à un moment ou un autre.

...Redevenir mâle. Quand la potion expirait-elle ? Parce que s'il se transformait en plein vol... Calliope risquait de très mal le prendre. Criminelle ou pas (tué mon, avait dit l'ado moche de la boutique), une sorcière en colère était généralement dangereuse à approcher. Descendre, vite. D'ailleurs, où allaient-ils se poser ? Si Calliope voulait l'emmener chez elle... Au moins, il avait abandonné ses chaussures à talons ; si le terrain n'était pas trop dur, il pourrait courir et se planquer quelque part en attendant de trouver un moyen de contacter ses gardes du corps. Il tenta de demander leur destination à sa conductrice, mais celle-ci ne sembla pas l'entendre - la faute, sans doute, du vent qui leur battait les oreilles. Lui, en revanche, entendit très bien ses propres paroles - et, plus important, la tonalité plus grave de sa voix.

Merde. Il se retransformait déjà ?

Comme pour confirmer cette impression, il ressentit un élancement dans la poitrine, puis dans les hanches. La métamorphose semblait beaucoup plus douloureuse que la première fois, ses os grinçant à mesure qu'ils s'étiraient et se métamorphosaient. Il enregistra à peine la suite du trajet, trop concentré sur son intense misère intérieure - il avait MAL, SUPER mal, et il se sentait mal et aaaarghaïlle ça faisait mal et...

Il manqua se casser la figure lorsqu'ils se posèrent enfin, ses bras trop lâchement serrés contre la taille de Calliope afin d'éviter que celle-ci ne sente sa soudaine perte en volume poitrinaire. Il descendit maladroitement du balais, tâchant de sembler naturel plutôt qu'agonisant. A son grand soulagement, la sorcière semblait vouloir se débarrasser d'elle - de lui - plutôt que l'emmener chez elle. Maintenant, si elle pouvait garder les yeux sur son balais - s'il pouvait rester encore assez androgyne, coincé entre mâle et féminin, pour faire illusion, ou du moins n'être qu'à moitié reconnaissable... S'il s'éloignait un peu dans les brumes - mais Linda serait restée un peu, hésitante, aurait adressé un signe d'adieu à la jeune fille.

Ne tourne pas la tête, ne tourne pas la tête, ne tourne pas la tête...

Et, bien évidemment, parce que l'univers le détestait, Calliope tourna la tête pour lui adresser ses adieux. Elle ne sembla pas s'apercevoir de la transformation au premier abord, pas jusqu'à ce qu'elle ait décollé du sol ; puis l'expression de son visage changea radicalement. Colère, trahison, il n'aurait pas vraiment su identifier l'expression qui traversa son visage. L'envie de se faire bouillir, découper, cuisiner qui le traversa soudainement, par contre, provoqua en lui une envie plus qu'inidentifiable : terreur pure et sans mélange. Il hurla la première justification qui lui vint à l'esprit, les mots se bousculant sur sa langue avant même qu'il ne puisse comprendre leur sens.

- C-ce n'est pas de ma faute si je suis né du mauvais sexe !... lança-t-il d'une voix déchirée.

Sur quoi, retenant un sanglot bien visible, priant pour n'avoir pas été reconnu, il s'enfuit à toutes jambes dans la brume avant d'avoir le temps de comprendre exactement ce qu'il venait de sous-entendre.
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MessageSujet: Re: A Prince in Womanhoodland [Pearl] A Prince in Womanhoodland [Pearl] EmptyJeu 8 Oct - 11:27


Elle douta, un instant. Voulut croire que c’était encore Linda, sous ces traits encore fins, et cet air catastrophé – la peur lui allait si bien. Mais elle dut bien se rendre à l’évidence. Avec le recul, on ne pouvait plus se tromper : la jolie jeune fille, si attendrissante, était devenue – redevenue ? – un jeune homme. La rôtisseuse fronça les sourcils, sous le coup de la colère. Personne n’aimait être dupé. Dans ce cas précis, elle avait offert sa protection, certes symbolique et fictive, mais sa protection tout de même. Et c’eût été mentir que de dire que tous ces gestes pour éviter à Linda une mort fatale ou une misère détestable avaient été un calcul. Il y avait eu entre chose, comme une sympathie naissante pour cette jeune affligée. Elle se surprit même à penser, avec une once de nostalgie, que si jamais elle prenait une apprentie, dans la plus pure des traditions sorcières, elle aurait aimé qu’elle soit comme Linda.

La rôtisseuse, perchée sur un balai bien moins récalcitrant – était-ce le fait de ne porter qu’une seule personne ? Ou de n’avoir plus à subir une métamorphose en plein vol ? – se demandait maintenant si tout cela n’avait été qu’une farce, ou un piège, honteusement manigancé pour la coincer, dans les rues de la ville qu’elle aimait le plus ? Auquel cas elle se ferait un plaisir de châtier l’instrument de l’illusion. La perspective de faire rôtir l’ex-Linda en punition de ses tromperies la chatouilla un instant, mais elle se ravisa. C’est que ce qu’elle avait entendu ressemblait bien plus à un sanglot qu’à un ricanement.


- C-ce n'est pas de ma faute si je suis né du mauvais sexe !

Pearl avait ses faiblesses. Et malgré toutes ces années d’errance, et bien qu’elle ait beaucoup vu, elle conservait une certaine capacité d’étonnement, une dernière naïveté. La rôtisseuse resta bouche bée, voyant la fine silhouette s’égarer dans la brume et les fourrés, sans entendre, sans doute, ce qu’elle lui criait :

- Prenez garde aux …

Elle ne sut continuer. Prenez garde à quoi, au juste ? « A vous », discours d’un reste d’intérêt, qui survivait à la transformation. « A moi », parce qu’elle se sentait dans l’obligation morale d’inculquer les bonnes manières à ce trublion, qui avait l’impolitesse de se faire passer pour une demoiselle en détresse, victime de l’injustice et de la violence du monde extérieur et de la jeunesse ? Elle ne savait au juste si c'était de la haine ou une tendre indifférence que lui inspirait maintenant cette silhouette fugitive, qui emportait ses mystères et ses questions avec elle. Alors, tentant de se remémorer ce visage - qu'elle n'avait qu'entrevu - qui ne lui disait rien, tout en lui semblant étrangement familier, elle reprit son envol, se promettant de conter l’anecdote au Loup, dès le lendemain.

Elle regagna sa petite maison de pain d’épices, chantonnant, caressant du bout des doigts le manche poli en bois de Sorbier. Elle avait retrouvé un balai, elle s’éleverait maintenant, savourant la caresse de l’air ... Oui, elle avait retrouvé un balai … Le soir tombait, sur Malkins, et dans les dernières lueurs du crépuscule …

« Depuiiiis le jouuurr où je me suiiiiis donnéeeeee,
tooouteuh fleuriiiie sembleuh ma destiiinéeeeeee ! »


La rôtisseuse manqua perdre son équilibre, sous le coup de la surprise. Elle avait, en faveur des évènements de la journée, oublié cette regrettable histoire de tapage nocturne. Elle leva vers le ciel un regard suppliant, cherchant à se rattacher aux beautés de lumières qui paraient les nuages, et à oublier cette voix presque grimaçante qui l’accueillait, ce soir encore. Elle se posa sans bruit, fit un pas vers les fourrés qui couronnaient sa clairière, sans pouvoir distinguer précisément d’où venait ce chant criard.

Je crois rêêêveeeeer sous un cieleuh de féeriiiiiie,
L'âââme encooore grisééée de ton premieeer baiseeer!


Alors elle claqua sa porte aux mauvaises idées et aux tintamarres, se renfermant dans son malheur. Elle en parlerait sans doute, demain, à Irfane, glisserait un mot ou deux de ses insomnies malheureuses, en espérant qu’il comprendrait. Et au pire, elle s’offrirait quelques heures de sommeil au quartier général, dont la rumeur incessante lui semblait bien douce, à présent … Tout plutôt que de leur avouer que ces jours-ci, elle n'avait pas même tenté d'occire sa clocharde importune. Alors Pearl, en attendant, tendait l'oreille, bien malgré elle. Non qu'on n'entendait pas les vociférations de cette femme - et quels poumons ! - mais elle cherchait à délier les mots les uns des autres, pour retrouver le sens de ces bouquets de vers. Honteusement déformés.

ÔÔÔ Quelleuh beeelle viiiiie!
Mon rêêêveuh n'était paaaaas un rêêêêveeuh!
Aaaah! je suiiiis heureeeuuuseuh !
L'amoooûûûûr éteeend sur moooiii ses aaaiiileuh!
Au jaaaardiiinn de mon cooooeeeeeeur
chanteuh une joooooiiiie nouveeeeeeelleuh !
Tooooooouuuuuuut viiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiibreuh
toooouuuut se réjouiiiiit de moooonnnnn trioooooommmmmmpheuh !


Le bonheur des uns fait ... La rôtisseuse, murée derrière des parois de sucre, cauchemarda sous son ciel de féérie. Bien malgré elle. Cueillant des mots, des expressions, les tournant, les retournant, dans l'espoir d'en retrouver le sens, et de donner une signification quelconque à ces bêlements égoïstes. Et tandis que ses soupirs rejoignaient les espoirs déçus de son incessante quête de bonheur, Pearl se disait, dans le plus noir secret de cette nuit, qu'il serait temps qu'elle fleurisse sa destinée, elle aussi.



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