Le Commissariat principal de Malkins : élégant immeuble aux vitres de verre, monstre moderne aux multiples étages. En guise de toit : le Parking à balais. Quelques rares fonctionnaires trop assidus s'y déposent distraitement dés l'aube, bien avant le flot continu dans un sens comme dans l'autre qui s'alimentera tout au long de la journée. Outre les anti-vol relativement plus qu'inutiles, chacun des véhicules - de fonction ou non - se voit équipé d'un gyrophare fluorescent, ensorcelé pour cracher sa sirène tonitruante au moindre ordre vocal de son propriétaire ! De ci de là, un maladroit s'étant écrasé sur le balai d'un autre, ou sur l'un de ses collègues... On le répète à qui veut l'entendre : le plus dangereux, ce n'est pas l'atterrissage. C'est une fois le pied à terre que l'on devient une cible pour les autres ! Et puis, provoquant les cris enthousiastes et l'hystérie patriotique parmi la foule en bas, les quelques brigades de la Circulation, en "position oiseau migrateur", planant au dessus des têtes avec grâce et fierté.

Proche au possible du Parking, le Septième étage : Service de la Circulation : Brigade des Anti Dangers Publiques à Balais. S'y entassent, bureaux étroits et paperasse futile. Ceux que la foule surnomme allègrement "Traqueurs du Ciel" ou "Poulets Volants" s'y engouffrent de tout côté. La porte du toit claque toutes les trois secondes, se noyant pourtant sans mal dans le flot de conversations trop bruyantes et confuses. Ceux du service s'occupent tant bien que mal, attendant sans grand enthousiasme leur tour de garde sur quelque nationale ou grand carrefour que ce soit, espérant honteusement être bientôt appelés dans le cadre d'une course-poursuite, désireux de prendre enfin place dans le grand V montré du doigt avec admiration: la position Oiseau Migrateur, l'une des 126 techniques d'approche. Tous les autres passent et repassent, du toit jusqu'au six ascenseurs. On peut très bien pénétrer le bâtiment par le hall, mais bon nombres de Traqueurs préfèrent le balai à la marche à pieds !

Sixième étage, une voix aux allures de blonde trop aguicheuse annonce sensuellement le "Service du Banditisme Sans Grande Conséquence", plus communément dit BSGC. L'on y traite des affaires de trafic de pommes empoisonnées, de détérioration de biens publics - l'on oubliera jamais d'ailleurs l'interpellation du charmant Chapelier Toqué, finalement relâché dans la nature après avoir englouti deux presse-papier, une agrafeuse, et trois coins de bureau. Cela fait maintenant plus de trois siècles que la Direction tente de se débarrasser du système vocal des ascenseurs, qui, dans ses égarements, se met parfois à complimenter de trop près certains pour mieux en insulter d'autres : sans succès. La rumeur veut qu'une ancienne secrétaire, renvoyée pour ses trop grands élan de tendresse... Se soit finalement vengée en ensorcelant toute la machinerie du Commissariat !

Autrefois, le Service des Vilains Laids Vraiment Très Laids. Jusqu'à ce qu'un criminel prenne l'intéressante décision de porter plainte pour discrimination. L'individu en question se trouvait être un Fée Lutin relativement peu gâté par Mère Nature et, la chose ne tarda pas à tourner au scandale politico-raciste pur et simple. L'assassina d'une vielle-dame, grand-mère de 18 petits enfants, arrière-grand-mère de 14 autres, qu'il avait perpétré et ce, dans le simple but d'obtenir une meilleure place de bus ne sembla pas émouvoir la foule. Et la Police des Contes fut contrainte de changer l'appellation de l'un de ses services. Désormais, la voix suave de Lux Jamblong - la légendaire secrétaire de la rumeur - surnommée Lux la dévoreuse, ou Lux la Menthe Religieuse, annonce le Service des Cas Dangereux et Désespérément Désespérants !

Cellules et salles d'interrogatoire à profusion. Va et viens incessant au sein de la fourmilière, l'on y observe toujours quelques tentatives de fuite ou de prise d'otages, sans grand succès naturellement. Derrière les vitres teintées, certains Traqueurs observent avec professionnalisme, paquets de pop-corn en mains ! Et pour un gobelet de café, il vous faudra descendre affronter la machine du troisième étage...

L'infirmerie dans un coin, annoncée avec un peu trop d'entrain par la voix des Ascenseurs. S'y trouve également la cafétéria. Note : un très bon entrainement que d'y déjeuner ! Il vous faudra des réflexes en béton, et la rapidité d'une Crevette Verte Velue de Neverland pour mettre la main le premier sur un beignet au chocolat ! Et puis bien sur, au fond du couloir, derrière tables, fauteuils & tabourets... La bête. Plusieurs options, chocolat, café, expresso, avec ou sans mousse, dose de sucre à définir, thé aux parfums déjantés : poulpe séché, orties, chanvre, fraise-basilic, menthe-cannelle, sans oublier les jus de fruit ou d'autres choses : tomate, citrouille, carotte-citron vert, ... Et puis, bien sur, le bouton rouge. La mixture secrète que nul n'a jamais osé goûter. Lors de votre premier jour, on vous a forcément raconté la légende de Berk C. Kerk, jeune novice tel que vous, ayant tenté l'intentable, toujours dans le coma depuis lors... La machine à boisson, ensorcelée de surcroit, se montre bien trop souvent capricieuse. Ajoutant tantôt des aphrodisiaques, tantôt des sauces piquantes, ébouillantant, aspergeant de sucre et de jus de tomate, vibrant de colère ou de jubilation. Sauf que voilà, l'honneur doit être sauf, "t'es pas un Traqueur si t'y prends pas ton café chaque matin". Fight !

Un couloir, une porte. Passez votre chemin si vous tenez à la vie, les dispositifs de sécurité sont bien trop douteux pour qu'il vaille la peine d'y risquer ne serait-ce qu'un orteil. Seul les Capitaines ont le pass qu'il convient d'utiliser, ajoutée à cela, la nécessité de présenter une emprunte digitale authentique. La poignée de porte ne se laissera pas prendre au jeu des métamorphoses, prenez garde ! La Salle des archives, où s'entassent des dizaines et des dizaines d'étagères remplies à craquer reste donc un lieu de mystères et de fantasmes, inaccessible au petit personnel. Ne vous reste plus qu'à remonter dans l'ascenseur... Ou à tenter le diable.

La morgue. Certains de vos collègues trop enclins aux passions douteuses s'y adonnent à de trop charmantes activités en compagnie de la petite stagiaire du moment, la nuit... Médecins légistes & assistants s'y trémoussent tels des zombies, vous débarquez dans un autre monde semble-t-il. Des murs au plafond, tiroirs de métal, renfermant chacun une histoire, un drame et, plus empiriquement parlant : un cadavre... Ici on vaporise un parfum pour toilette avec enthousiasme, là, on brise une côté, puis deux, toujours avec enthousiasme. Des déjantés en blouse blanche, lunettes de savant fou sur le bout du nez, s'activent ça et là, vous entrainant d'un pas pressant dans l'un de leurs laboratoires luxueusement équipés. Ça ? Un échantillon d'ADN. Ici ? Quelques micro-fragments d'épiderme coincés sous les ongles de la victime. Là bas ? Une centrifugeuse - elle a coûté plus de dix de vos salaires mensuels alors prudence - quelques échantillons de sang. Et ? Ah, non, ça, c'est le déjeuner, purée d'endives aux extraits de potiron. Appétissant, comme le reste, n'est-ce pas. Prétendument hantée, s'y aventurer de nuit constitue l'un des bizutages les plus appréciés...

Le secrétariat, le hall, qu'importe son appellation. Bienvenue, bienvenue, qu'on vous crie de derrière le bureau central. Vous voici donc devant Pâquerette Tulipe Bryophyte, secrétaire et fantôme. Spectre, revenante, peut importe le terme, le fait est bien là : la demoiselle, dynamique bien qu'un peu transparente certains jours, est morte renversée par un chauffard à balai, il y a de cela trois siècles. Impossible de la déloger de la réception, la Direction ne put se résoudre à l'exorciser, encore moins à la renvoyer. Et puis, il y avait bien des quota pour femmes, fées lutins & autres du genre, un fantôme, c'était bon pour l'image de la Police des Contes. Petit bout de spectre, Pâquerette flotte dans des vêtements ternes et discrets, tripotant distraitement les petits boutons de nacre de son gilet, ou rehaussant sa capricieuse paire de lunettes... C'est pour une plainte ? Un paiement de caution ? Un attentat, oh vraiment ? Rien ne la surprend, elle vous indique toujours l'étage qui convient, traverse subitement le bureau pour venir réarranger le col de votre chemise, sirote un thé inexistant dans une tasse vide ou bien se contente d'happer les vapeurs d'un café qu'elle ne boira jamais.