Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilRechercherDernières imagesS'enregistrerConnexion
Le Deal du moment : -21%
LEGO® Icons 10329 Les Plantes Miniatures, ...
Voir le deal
39.59 €

Partagez|

Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ?

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas
MessageAuteur
MessageSujet: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyJeu 2 Juil - 15:45

La nuit lui avait soudain parue fraiche. Trop fraiche. Brûlant plus encore ses blessures dans lesquelles ses vêtements s’étaient depuis longtemps noyés. Il avait arrêté de courir au profit de grandes enjambées pour ménager ses forces et ne pas tomber en faiblesse, mais sa main qui pressait la déchirure sinistre de son ventre ne suffisait pas à arrondir efficacement ses efforts. Impuissant, il avait progressivement senti la sueur perler sur son front devenu livide, tandis que la douleur s’était propagée par vagues jusque dans ses cuisses.
Mais il n’avait pas craché de sang. Alors, rien n’était perforé ? Il s’efforçait de penser, de murmurer pour se tenir éveillé.
Il faudrait ajouter une petite garde-robe pour Alice au cas où elle reviendrait nous voir en étant pieds-nus.
Mais je n’en suis pas encore au point de souhaiter que cela serve à la Marquise. Je le pense, du moins.
Tu m’embêtes à toujours saccager tes fonds de tiroirs.
J’avais raison, ces huîtres ne m’inspirent aucune confiance. N’en mange plus.
… Je n’aime pas te voir malade.
Oh, attends donc, arrête de faire l’enfant. Non, ne m’embrasse pas non plus. Comment ça ? Il y a d’autres moyens de t’occuper !
Retire ces horreurs de sous mon nez. Je déteste les pâtisseries. Ce n’est pas parce que j’en ai acheté trois fois trop que j’escomptais en manger.
… Eh bien, oui, elles sont pour toi.
C’est étrange, je ne retrouve plus les clés de chez Pearl. Wal… Oh, et puis, je lui demanderai une autre fois.
… Rien ne presse, n’est-ce pas ?

Plusieurs images en profitaient pour lui revenir.
Chaotique. Il refusait de les entendre comme un glas.

Sa vue brouillée discernait à peine les lampions des ruelles mal éclairées. Ses chaussures crissaient dangereusement sur les pavés, rendu incapable de soutenir l’usage de son pouvoir. Et chaque bruit lui emplissait cent fois la tête avant de mourir, propageant tantôt un voile sombre, tantôt éclatant devant ses yeux. Haletant, des grondements rauques franchissaient parfois ses lèvres blanchies.
Jamais il n’aurait dû jouer si longtemps. Pourquoi n’en avait-il pas terminé immédiatement ? Une nuque était si vite brisée.
Ses sourcils s’étaient froncés, à la fois de douleur, mais aussi de rage, d’exaspération envers lui-même qui savait ordinairement si bien saisir les occasions de se montrer joueur.
On ne l’y prendrait plus, se jura-t-il. Car il s’en sortirait. Hors de question pour lui de se retirer maintenant, ce n’était pas son heure. Livrer sa vie à la barbarie d’une fillette et à sa propre négligence ? Non. Si sa vie devait tenir au bout d’un poignard, on savait tous très bien à qui ce poignard appartenait. Ironique, n’est-ce pas ? Même ce qu’il était censé avoir de plus cher et qui ne devait rien valoir découlait pour autrui du privilège.
Je suis un imbécile.
Il eut à tendre tout son corps, à serrer hargneusement les dents pour ne pas faire de ses alliées les pierres de redoutables ennemies. Et de ses yeux obscurcis, cernés par une blancheur violacée, il constata que personne n’occupait les entrailles silencieuses de la péniche.
Tu es un imbécile.
Mauvaise foi. Walrus ne pouvait pas se trouver n’importe où quand Sylar en avait besoin. Et finalement, c’était peut-être mieux qu’il ne le vît pas dans cet effroyable état. Il avait semé sans le voir d’épais flocons de sang ; sur le sable, les pierres, la passerelle… Puis il s’était affaissé de tout son corps contre la porte, cherchant de sa main – celle du bras encore valide, l’autre ne pouvant tolérer un mouvement trop large – à l’intérieur de son veston, son trousseau de clés. La première fois, il se trompa, piochant celui qu’il avait dérobé au stupide négociant, mettant diablement à mal sa patience et ses nerfs engloutis par la souffrance. Et sa blessure au ventre, qu’il ne retenait plus, s’en était alors donnée à cœur joie.
Mais il parvint à ouvrir la porte, sur laquelle il laissa une longue et macabre marque de main imbibée de sang, car il n’avait su retenir son poids et s’était presque retrouvé à genoux sur le sol du boudoir. Les clés tombèrent, et le tintement métallique lui râpa atrocement la cervelle.
Ses doigts étaient gelés. Quasiment aveugle, il ne prit pas la peine de refermer la porte et se rendit au salon en titubant, le traversa en se servant du canapé comme d’une main courante, pour déboucher sur le carrelage de la salle de bain dont il partageait sombrement la froideur.

Il s’installa péniblement dos à la baignoire et retira fébrilement ses gants, dévoilant des mains intactes, mais qui ne tardèrent pas à se souiller lorsqu’il tenta d’ôter sa gabardine. Son épaule, plutôt que de le lui permettre, lui arracha une plainte.
Non. Ce n’était vraiment pas le moment. Il y avait des aiguilles de chirurgie dans les tiroirs, soigneusement entreposées dans leurs paquets aseptisés. Le fil également, qui devait recoudre ses plaies. Comme il aurait voulu…
Mais ses mains tremblaient. La douleur achevait son œuvre, engourdissait chacun de ses membres, jusqu’à ses paupières qui allaient d’un moment à l’autre accepter l’aimable invitation de l’inconscience, si calme, tellement moins éprouvante.
Têtu cependant, il se pencha en avant. Vertige, ses bras refusèrent de le porter. Il s’étendit de tout son long sur le carrelage, mains à hauteur du visage. Blême, respiration inaudible, il refit de son sang la couleur du carrelage comme il l’avait si bien fait pour sa chemise.
Yeux clos, volonté éparpillée, il n’avait même pas eu l’occasion de penser à lui.

[Sylar-Walrus-Princess]
Anonymous
Invité
Invité
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyJeu 2 Juil - 19:34

    « Debout ! »

    L'empoignant sans ménagement par les épaules, je le redressai presque violemment. L'adossai à la baignoire sans me soucier de la flaque pourpre qui me souillait jusqu'aux genoux. Refoulant l'angoisse, la terrifiante angoisse. Mais enfin, ma famille, c'est toi, point. D'abord, le débarrasser de cette foutue chemise. Les boutons sautèrent simultanément, ricochant sur le carrelage nouvellement peint. En d'autres circonstances, j'aurais été ravi d'accomplir semblable action. Mais l'heure n'était pas au chahutage, encore moins à ce genre de réflexions. Tout cela à cause de cette foutue ville. Si je n'y étais pas allé, j'aurais été... J'aurais dû être présent. Je ne regrette jamais rein. Mensonge. Les restes sanglants de feu la chemise de Sylar se noyèrent sans une protestation dans la marre visqueuse. Tremblements, lorsque je fouillai rageusement les tiroirs à la recherche d'un anesthésiant. Le capuchon de la fiole alla valdinguer dans la pièce... Mon bras disponible entreprit de le maintenir droit, l'autre se chargea de lui administrer le liquide translucide. Il n'avait pas intérêt à l'avaler de travers !

    « Si tu vois une lumière blanche, ne t'en approche pas ! »

    Foutu humour de merde, et dans une situation pareille.. Seulement voilà, l'angoisse fourmillait vicieusement dans tout mon être. La contenir exigeait bien une ou deux blagues vaseuses. Nier que les choses se profilait mal, tout nier en bloc... Au diable la réalité ! J'étais capable d'envoyer paitre le monde entier, pourvu que lui demeura près de moi. S'il te plait. Ses prunelles se vidèrent de toute présence. Séquestrant les problèmes, la gamine et mes... Mes.. Dans un coin de mon esprit. La mioche qui attendait dans la pièce d'à côté que je lui permette de vivre, elle aussi. L'étonnement, quand j'étais tombé sur les traces de sang. Syl' tuait pourtant plus proprement que cela ? C'était sans doute le mécanisme des pierres, alors. Et la claque monumentale, la terreur dévorante lorsque j'étais entré dans la salle de bain. Les souvenirs qui affluaient, déchirants. La première nuit, mon enfance, mon adolescence... Tout séquestrer. Tout mettre de côté. Et se concentrer sur Sylar. Parce que Walrus ne peut pas exister sans Sylar. J'étais le seul en droit de disposer de sa vie. Alors, confinant l'angoisse de toutes mes forces, aiguille en main, je me coupai du reste du monde. Défiant du regard la meurtrissure de son épaule. S'il te plait... Continue d'exister, pour moi.

    Tictac d'une horloge. Une porte qui se referme...

    Membres douloureux, j'étais littéralement vidé. Après Sylar, j'avais enchaîné avec la mioche. Contrairement à lui, pour elle, j'étais arrivé à temps. A temps pour lui faire un garrot de fortune. A temps pour éviter qu'elle ne perde trop de sang. Et puis, sachant qu'il avait une sainte horreur du désordre et de la saleté, j'avais lessivé, essoré, dilué, gratté le sang. Peut être aussi que cela m'empêchait de penser. L'inaction me rendait anxieux...

    Je me laissai glisser près du lit. Mon lit à moi. Parce que ma chambre était plus près de la salle de bain et que, mine de rien, il était plutôt lourd à soulever, à l'inverse de la mioche qui roupillait non loin de là. Parce que j'avais la chance divine de posséder un canapé-lit. Pour Alice. J'en avais fait l'acquisition quelques jours à peine après sa petite visite surprise. Non pas que dormir en sa compagnie m'eut dérangé le moins du monde, mais Sylar trouvait peu convenable de ne pas avoir à disposition de quoi l'accueillir comme il se devait. Alors j'avais acheté ce foutu canapé lit à la noix ! Soulevant minutieusement le haut de la chemise propre que je lui avait enfilé, je constatai avec satisfaction que le bandage tenait la route. La blessure ne semblait pas s'être rouverte. Soupire. Frémissement lorsque je m'emparai de sa main inerte... Si froide. Si peu "Sylar". Il avait toujours les mains tièdes, toujours. Plissure au niveau du front, frémissement des lèvres. L'angoisse ressurgissait. Violente et toute puissante en ses royaumes - c'est à dire moi. Effleurant son front du bout des lèvres, j'abandonnai son chevet après un temps interminable. Il fallait bien que je m'occupe un temps soit peu de la gamine... Je m'approchai du canapé d'une démarche indéniablement trainante. Brève vérification de son bandage. Son poignet état foulé, ou cassé. Je m'étais contenté de le bander lui aussi, peut être aurait-elle besoin d'une attelle ou d'un plâtre. Mais on était pas dans un hôpital, alors elle s'en contenterait.

    Tictac de nouveau. Violentes sonorités d'une horloge jetée à terre puis piétinée...

    Tripotant nerveusement ses mèches brunes, je le couvais des yeux. Comme s'il s'agissait là d'une pâtisserie, d'un plateau d'huîtres ou d'une bouteille de Rhum au miel. Il avait intérêt à se réveiller dans l'heure, anémié qu'il était. Sinon j'allai devoir lui faire gober sa nourriture et ses rations d'eau de force ! Tempis s'il 'étouffait tout seul. J'avais rempli ma part du marché, désormais... C'était à lui de remplir la sienne. Quand à la "princesse errante", j'espérais qu'elle n'allait pas clamser comme ce pauvre Blondie. Je n'avais vraiment pas besoin d'un nouveau drame dans cette journée pourrie jusqu'à la moelle...

Walrus
Walrus
team steak haché
team steak haché
HUMEUR : Bweh.
CITATION : « L'objet possédé est heureux tant que son propriétaire l'a à l'oeil... »

BOITE A JETONS : 0000

FICHE : La Cabane à Huîtres.
NOTEBOOK : Le moule à muffins
VIE SOCIALE : La pêche à la crevette
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptySam 4 Juil - 14:27

    <<_ AIE ! _>>

    Les premiers mots de la jeune fille. Elle ouvrit les yeux doucement, doucement et prit à peine conscience lorsqu'elle gémit. Son bras, enfin son poignet lui faisait mal, lui brûlait la peau et l'obligeait de ne plus bouger. Elle soupira et le regarda. Oh ! Un bandage ! Cela servait au moins à le maintenir. Elle se redressa à l'aide de son autre bras et s'assit contre le canapé. Elle se leva et tituba jusqu'à un lavabo lentement. Tenant de son bras doucement. Elle posa délicatement son bras blessé et soupira. Elle le passa sous l'eau pour apaiser un peu la douleur, sentir du frais. Elle passa aussi de l'eau sur son visage puis souffla une nouvelle fois. Elle ferma ses yeux un instant pour réfléchir à ce qu'il s'était passé. Deux fois, cet inconnu avait dit le mot interdit, deux fois il avait usé de sa provocation à son égard. Elle ragea et tapa de son poignet cassé contre le lavabo. AIE !! Un cris de douleur échappa de ses lèvres, de sa gorge. Grr, cela n'allait pas se passer ainsi ! Elle jura de se venger sur lui pour qu'il connaisse la mort. Alors elle se repassa à nouveau de l'eau sur le visage et se souleva télékinésiquement vers la porte, baissant la tête enfouissant son beau visage sous ses cheveux immaculés. Elle l'ouvrit et là, stupeur, surprise... Le garçon qu'elle avait croisé à Neverland et l'autre, celui qui lui avait brisé le poignet. Elle ragea, avait il pitié de lui aussi ou alors, se connaissent-t-il ? La porte se referma toute seule grâce au don de la fille et elle fixa méchamment les deux êtres. Elle se demanda si elle n'allait pas définitivement l'éliminer ou alors lui laisser vie sauve. Mais elle pensa que si elle le tuait, sans doute que le Neverlandais n'allait jamais lui pardonner. Enfin, le Neverlandais, juste parce-qu'elle l'avait croisé là-bas qu'elle l'appelait ainsi. Elle n'osa pas approcher mais finalement se décida. Elle approcha doucement, surement, comme sur ses gardes. Elle ne voulait rien dire, cela allait envenimer les choses. Elle remarqua qu'il s'en était sortit, même si il n'était pas bien, il s'en était sortit. Elle regarda les deux garçons et en déduit du regard du non malade qu'ils se connaissaient. Alors, pour faire bonne figure et se faire pardonner, elle chopa un chiffon qu'elle alla nettoyer et laver. Elle le rinça et le remplis d'eau. Elle l'essora et alla près du malade lui mettre ce chiffon remplis d'eau fraiche sur le crâne. Elle regarda l'autre au chevet du malade.

    <<_ Je suis navrée... je ne pensais pas que tu le connaissais... Je ne l'aurais pas touché. _>>

    Mais ce n'était pas le moment de s'excuser, c'était le temps d'agir car elle espérait qu'il s'en sorte pour ne pas qu'il lui en veuille. Pour elle, c'était comme un grand frère et elle ne voulait pas de rancœur de sa part. Elle alla un peu plus loin, trouver un bol, le remplir d'eau. Elle le donna à la personne qu'elle avait connu depuis peu. Elle resta ensuite assise, la douleur de son bras lui faisait atrocement mal et elle se rappela qu'il l'avait même chopé au cou et avait tenté de l'étrangler sans doute. Elle soupira. Comment ils pouvaient se connaître ? Lui, provocateur, casseur et joueur. Elle marmonna des mots inaudibles, se recroquevillant sur elle même, genoux contre tête. Ses cheveux tombèrent sur son visage. Elle marmonna, marmonna des mots parfois audibles et parfois inaudibles...

    <<_ Promesse finie... promesse finie... mais... la vengeance est un plat... qui se mange froid ! HIN HIN HIN !... AIE ! _>>

    Son poignet lui faisait encore et bien mal. Il l'avait amochée. Faut dire que même si son attaque était forte sa défense était faible. Elle trouva qu'il avait bien encaissé et s'étonnait de le trouver vivant. Elle ferma ses yeux et essaya de se reposer, n'oubliant pas les battements de la douleur résonnant dans sa tête et qu'elle sentait sur son poignet. Elle soupira et bougea légèrement ses lèvres, rêvant d'un rêve qu'elle aura complètement oublié dès son réveil...
Anonymous
Invité
Invité
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptySam 4 Juil - 18:27

Debout !
Dès à présent, il le voyait, son phare. La voix de Walrus. Impossible d’en confondre la lueur avec celle de la lumière blanche qu’il était censé éviter.
Pourtant, Sylar se trouvait loin, très loin. Il n’avait, par exemple, plus de jambes pour se relever ainsi qu’il l’aurait voulu. Il n’avait plus d’yeux – qu’ils fussent entrouverts ou non – pour le distinguer correctement et, peut-être, faire de lui sa dernière vision. Il n’avait en conséquence plus de raison, d’esprit suffisant pour songer, comme précédemment, que ce n’était pas son heure. Pour se rendre compte qu’il appréhendait davantage la mort comme ce qui l’empêcherait de le voir, de le toucher, de lui parler, plutôt que comme une simple perte de vie. Il en fallait peu pour être « heureux ». Ce « peu » qui avait balayé plusieurs années de son insipide existence, pour imprégner le reste de son goût si délirant.
Mais c’était inquiétant. Il ne mesurait presque rien. Lorsque Walrus détruisit ce qui lui restait de bras en le redressant, il n’eut qu’une plainte rauque pour toute réponse, semblable à un feulement d’animal agonisant. Cependant, toute douleur, aussi fulgurante fût-elle, était dérisoire face à son incapacité à le voir. La lumière filtrait entre ses cils, une déflagration qui faisait fondre ses rétines, et barbouillait grossièrement son image, sa si belle image.
Trop loin pour percevoir le goût de ce qui lui coulait dans la gorge.
Et puis, plus rien. Réellement rien. Aucune angoisse, aucune douleur.
Tant mieux. Il n’était plus en mesure de rien vouloir. Et y avait-il quelque chose de pire que cela ?

Ce qui est sûr, c’est qu’au moment de mourir, ma vie ne défilera pas devant mes yeux. Enfin, tout dépend de ce que je considère être ma vie. Evidence ? Bien sûr.
Qu’en penses-tu ?

Il se voyait, assis à une table, il ne savait pas laquelle. Pas la leur. Mais il y était accoudé, paume dans la main, en face d’une marionnette grandeur nature le représentant. Les yeux vides, le sourire démesuré. Qu’est-ce que cela signifiait ? Où se trouvait l’anormalité ? Dans l’animation ou l’inertie ?
Qu’en penses-tu ?
Il ne répondrait pas. Il savait que Walrus ne répondrait pas. Comme si son silence servait à le châtier, lui, Sylar, d’être si vivant là où il ne devait pourtant pas l’être. S’il voulait rester ici, il aurait à devenir le même genre de marionnette. Se contenter du rouge dont il était habillé, et qui lui allait si mal. Ce serait dommage, non ? De rester ici.
Oui, ce serait dommage. On ne s’est encore rien dit. A force de laisser les choses au hasard parce qu’elles nous semblent évidentes… Nous le regretterons.
Car nous n’aurons pas la chance d’avoir un chevet paisible d’avant mort. D’énoncer nos vérités en voyant la fin arriver. Et à quoi sert une vérité qu’on ne peut consommer ? Même si elle est mauvaise. Pourtant, j’ai beau être l’adulte, j’ai beau être supposé canaliser ton incroyable énergie d’enfant, de diablotin, ces vérités, je n’ai jamais su les assumer. M’imagines-tu en train de te dire que je…
En réalité, je ne saurais même pas en exiger autant de toi. Tu es libre d’être silencieux ou bavard. J’ai toujours su me contenter de l’un ou de l’autre.
… Je t’ennuie ? C’est que j’ai un peu peur de revenir. Tu ne m’avais jamais vu si vulnérable, avant. Je n’aimerais pas que tu t’en souviennes.
… Je n’aimerais pas que tu t’en souviennes.
Je n’aimerais pas que tu t’en souviennes.


La cervelle bouillonnait de nouveau. Apte à sentir une fraicheur autre que celle du corps. Apte à percevoir ce qui se trouvait aux alentours, bien que vaguement. Il dut rester immobile une bonne demi-heure, à moitié conscient, se demandant si c’était vraiment le bon moment pour ouvrir les yeux. Il avait mal au crâne. Il avait mal partout. Son épaule et son ventre tiraient abominablement. Mais une arrière-pensée l’apaisait, en quelque sorte. Celle que Walrus était venu pour combler ses propres insuffisances. Douloureux de songer qu’il lui avait sauvé la vie. Il ne savait pourquoi. Ce n’était pas de l’orgueil. Autre chose, toujours autre chose.
Il n’avait qu’un souvenir confus de ce qu’il s’était dit à lui-même au seuil de la mort. Une impression de serment qu’il lui fallait tenir à tout prix avant que ça ne fût trop tard. Cette réflexion lui fit définitivement ouvrir les yeux.
Ses paupières ne s’élevèrent pas entièrement, gardant le regard fragile sous la noirceur des cils. Son visage pivota sensiblement afin de l’apercevoir, et son sang, qui se réparait encore, ne fit qu’un tour. Plus de regard vide, ni de sourire démentiel. Walrus, le diable angélique, la plus jolie des créatures qu’il eût connu.
Mais ses lèvres ne se fendirent d’aucun sourire. L’air grave, accentué par sa blancheur et le contour assombri de ses yeux, Sylar l’observait silencieusement, sans se soucier de l’autre présence. Réalisait-il le sacrifice qu’il avait failli faire ? Renoncer à lui. A ses caprices, à ses moues délicieuses, à sa voix et à ses allures d’arc-en-ciel changeant. Comme il aurait voulu l’étreindre. Mille fois. Et lui faire tout autant de promesses, lui donner tout autant de baisers. Mais il était si fort, maintenant, et lui si faible dans sa froideur d’heureux échappé – car rien ne le menaçait plus, n’est-ce pas ? Alors, il cessa de le regarder, fixant un point devant lui sans le voir. Il essaya de parler, mais ses lèvres s’entrouvrirent en vain. Tentative ratée. Il dut s’éclaircir péniblement la gorge, les yeux fermés d’agacement.

— Après avoir été si peu professionnel, murmura-t-il pour que seul Walrus entendît, je ne sais si je suis en droit de te demander ça… Il inspira profondément, meurtrissant un peu plus son ventre. J’aimerais que tu oublies. Mon sang, mon inconscience, ma faiblesse actuelle. Dès que je serai de nouveau sur pieds. Je t’en prie.

Une voix enrouée par son état. Une frustration intérieure.
Il avait omis quelque chose.

— J’ai bien fait de ne pas la tuer, n’est-ce pas… ? Involontairement et indirectement, elle m’a fait réaliser bon nombre de choses te concernant. Nous concernant.

Une conscience bienfaitrice qui l’avait suivi jusque devant les limbes.
Il n’accorda pas d’attention particulière à l’ange terni. Il ne voulait pas la voir, si bonne représentante de sa propre erreur qu’elle était. Qu'était-ce qu'un coup de couteau, finalement ? Et deux ? Il ne pensait plus rien de leur confrontation comme il ne voulait plus rien penser d'elle. Seules certaines conséquences le marquaient présentement.
Du côté de Walrus, sa main s’ouvrit délicatement, désirant recueillir la sienne. Non seulement un remerciement, c’était en plus sa première promesse. Par conséquent, il en restait neuf cent quatre-vingt-dix-neuf ? S’il ne s’essoufflait pas avant.
Anonymous
Invité
Invité
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyMer 8 Juil - 10:44

    Mon cœur rata un battement. Je ne l'aurais... Pas touché ? Ma main se referma sur les rebords de la chaise sur laquelle je me tenais avachi quelques secondes auparavant... Jointures blanchies et tendues à l'extrême. Cette... Créature était donc à l'origine de tout ceci ? Il s'en fallut de peu, de très peu. La prise de conscience amena son lot de désagréments, pour elle. Je n'avais absolument aucune idée de la façon, mais je l'aurais tuée sur place. Avant même qu'elle n'ait eu le temps de réaliser. Oui, je l'aurais tuée, sans hésitation... Bien au contraire.

    Mais les paupières tremblèrent, distraction salvatrice pour la princesse... Imperceptible frémissement. Elle se soulevèrent puis s'entrouvrir lourdement: dévoilant deux iris aux teintes si familières, si différentes. Les prunelles de Sylar se posèrent sur moi, brûlantes, refoulant l'angoisse avec aisance. Depuis quand... Depuis quand possédait-il tant d'influence sur moi ? Depuis toujours. Pas un regard pour le petit monstre qui se tenait tout près de là... Juste quelques paroles, froides, tranchantes. Ses boucles blanchâtres, comme j'aurais souhaité les lui arracher !


    « Tu as de la chance, je ne suis pas d'humeur aujourd'hui... Que je ne te reprenne pas à toucher ce qui m'appartient... »

    Walrus l'insatiable tueur, pas d'humeur à priver le corps d'une insupportable gamine de sa pathétique petite existence ? Ah... Il y avait nécessairement là contradiction. Quelque chose n'allait pas. Mais rien n'allait jamais pour le mieux, n'est-ce pas ? Murmure... Qui s'échappa des lèvres de Sylar. Soupire, lorsqu'il m'adressa une bien étrange requête. Oublier, oui, oublie. Le sang, la morsure de l'angoisse, Woollyland, mes... Tout. Tout oublier. Soit, je savais en être incapable, mais était-ce réellement nécessaire, que de le lui faire comprendre ? Alors, acceptant l'invitation, j'entremêlai mes doigts dans les siens, devenant pour une fois celui qui partageait sa tiédeur.

    « Crois-tu donc réellement être l'unique à faire preuve de faiblesse, actuellement ? »

    Murmure, en réponse au sien. J'avais délaissé mon trône, m'agenouillant à hauteur du lit, et déposant ma tête près de la sienne. La vulnérabilité est une chose que j'avais appris à séquestrer tellement tôt, trop tôt. Au profit de son antagoniste, la survie. Mais qu'était-ce donc que survivre, si l'on ne dévoilait jamais un peu de soi ? Rien. Je ne veux pas disparaître. Rien du tout. Comme c'était puéril de ma part... Vulnérable, je l'étais déjà. A cause de lui. Et je lui en voulais pour ça. Absurdités que tout ceci. La vérité, c'est que, tout cela, je l'avais su depuis le début. J'avais juste fermé les yeux, prétextant l'amusement, le désire de contrarier. Provocant, et conservant une infime partie du contrôle dont j'avais tant besoin. Maîtriser les écarts. Me rapprochant toujours plus de lui, sans pour autant jamais franchir le reste du chemin. Dégottant les excuses les plus farfelues. Fuyant les lieux, pour de soit-disant contrats à la première occasion. Fuyant la vulnérabilité, encore et toujours. Me confortant ainsi, dans les bras d'un autre, d'une autre, et jamais les siens. Il faut croire que je suis voué à faire les choses comme il ne faut pas, avec maladresse. Je n'apprends pas de mes erreurs... Peut être cette fois ? Juste cette fois alors...

    « Ça tombe bien, j'ai la mémoire courte ! Toi, en revanche, n'oublie pas... Walrus... Ne peut pas exister sans Sylar. »

    La première réplique, sur un ton faussement léger. Dégoulinant d'insouciance et de je-m'en-foutisme, comme toujours. Et puis, la seconde: tout juste audible, confidence dont l'existence pouvait être remise en cause. Déposée au creux de son oreille, avant que je ne me redresse finalement, toujours "menotté'" à sa main si délicate... Nous concernant. C'était bizarre, comme terme. Je, tu, il, ça passait. Le vous m'échappait difficilement, sans doute en raison d'un cruel déficit en bonnes manières, impolitesse d'adolescent mal éduqué. Mais le nous, c'était tellement nouveau... Comme inapproprié, ou plutôt... Trop naturel, où était l'erreur ? Tempis... Tempis, tempis, tempis. Les erreurs, de toute façon, étaient bien ma spécialité. Non ? Si... Et puis, la curiosité s'éveilla: bouffée dévorante. Qu'avait-il donc réalisé ? Me concernant, nous concernant... Regard vagabond en direction du canapé. Le petit monstre s'était laissé embrasser par le royaume des songes. Son poignet devait lui causer bien des souffrances, n'est-ce pas ? Tant mieux.

    « On la garde comme chien de garde ? »

    Sourire bouffi d'insolence. En tant que petite créature vicieuse que sont les gamins, elle ne m'inspirait pas beaucoup de sympathie. Mais si l'on envisageait la chose différemment, et si l'on mettait de côté le désire cuisant de meurtrir son détestable petit sourire: animal de compagnie, ça n'était pas si mal ? Éduquer le petit ange aux mains souillées, c'était un défi tentant !

    « J'espère que tu la supporteras mieux que Blondie ! D'ailleurs pourquoi tu... Ne me dis pas que... Tu étais jaloux d'un vulgaire poisson rouge ? »

    S'étant parée de son manteau de suffisance, ma voix proféra la question sur un ton à la Walrus: tendre sarcasme. Effleurement fugace du coin de ses lèvres, puis je délaissai sa main réchauffée par mes soins. Je revins rapidement au chevet de mon compagnon, les bras chargés de diverses petites choses. Je le redressai, faisant preuve d'une délicatesse insoupçonnée, empilant deux gros oreillers dérrière lui après avoir déposé le plateau sur la table de chevet. Une tasse brûlante que je glissai dans ses mains trop pâles. Surprise lorsqu'il y porta les lèvres ? Faussement indigné, je me tassai sur ma chaise, le dévorant distraitement des yeux...

    « Je suis tout de même capable de faire du thé sans y ajouter du sucre ! Je me suis dit que tu opposerais moins de résistance ainsi... Parce qu'il va bien falloir te nourrir, et de préférence, quelque chose de sucré... »

    Parce les sucres rapides restaient les plus préférables. Mais s'il ne le désirait vraiment pas, j'étais près à lui préparer quelque chose de "plus Sylar". Le principal objectif étant avant tout qu'il récupéra quelque vivacité perdue... Petite moue craquante. Faignant de nouveau le capricieux enfant, j'en vins même à tripoter machinalement la manche de sa chemise que j'avais remonté au niveau du coude...

    « Parle moi de tes fameuses révélations... »


Dernière édition par Walrus le Mar 14 Juil - 14:32, édité 1 fois
Walrus
Walrus
team steak haché
team steak haché
HUMEUR : Bweh.
CITATION : « L'objet possédé est heureux tant que son propriétaire l'a à l'oeil... »

BOITE A JETONS : 0000

FICHE : La Cabane à Huîtres.
NOTEBOOK : Le moule à muffins
VIE SOCIALE : La pêche à la crevette
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyJeu 9 Juil - 0:04

[Bon, le petit démon est donc assoupi et réintègrera l’action une fois revenu ^^]

Charmantes retrouvailles, n’est-ce pas ? Il avait le cœur compressé. La colère et l’angoisse de Walrus, pour lui, contre elle. Ses doigts tièdes mêlés aux siens encore faibles et froids. Il venait de comprendre, effectivement, que cette nuit n’était pas aux états normaux. Son cher coéquipier, fait d’amères réminiscences que lui, Sylar, ne connaissait pas. Un flottement hasardeux sur des ondes de non-dits, sauvages et trop enclines à susciter le regret. Il se rappelait sans cesse ce qui pouvait lui échapper. Cette voix murmurant l’aveu, la proximité si plaisante de ce visage, vers lequel le sien se tournait telle une évidence. Il devinait l’éclat sincère de ses yeux, tandis qu’il avait baissé les siens sous l’assaut presque humiliant et grisant de l’intimité. Car il se sentait la naïveté ridicule d’une jeune adolescente qui croyait être devant l’homme de sa vie. Et en même temps, une impression le tamponnait. Trop de bonheur pour être heureux sans méfiance. Avertissement perpétuel. Alors il se disait qu’il n’y avait aucun bonheur, seulement la crainte de ne plus lui appartenir, ainsi qu’il l’avait si bien dit. Qui l’eût cru ? Lui, dépendant d’un sentiment d’appartenance. Nul besoin de personnalité, ni d’identité. Seulement de le voir, de l’entendre, de le toucher. Oh, oui, il n’avait pas fallu beaucoup de temps à la douce morsure infligée ce soir . Il était aujourd’hui contaminé jusqu’à la moelle.
Walrus ne peut pas exister sans Sylar.
Réciproque. Le symbole de sa naissance, il l’avait trouvé autre part que chez sa mère.
Il n’oublierait pas, du reste. Tout comme il savait qu’il était impossible de faire l’impasse sur l’accident. Mais il suffirait de taire le douloureux souvenir, de ne rien laisser filtrer à travers le velours des cils. De toute façon, il ne serait plus nécessaire d’y penser, excepté en cas de rappel à l’ordre. Plus de négligence, ni d’insouciance à l’avenir, il le savait, malgré le ton de Walrus qui s’y était peu prêté juste avant. Toujours disposé à alléger les choses, à faire de la dérision une arme redoutable, qui laissait quelque marque d’amertume toutefois. Comme une balle mouchetait sa cible de poudre noire. Puisque l’indélébile ne servait qu’à être estompé.

Après un frisson, il avait resserré l’emprise de ses doigts, détournant de nouveau le visage. Pas pour longtemps. Accrocher ce sourire qui le narguait de sa prétention, si adorable et détestable à la fois. La garder ? Et puis quoi encore ? Pourtant, il se tut. Parent impuissant qui cédait à l’enfant. Surtout, il ne voulait pas se fatiguer dans l’opposition. Ses nerfs n’étaient pas encore prêts à frétiller d’indignation, sa langue ne désirait pas se tordre d’arguments. Admettrait-il qu’il pouvait se sentir chez lui partout tant que Walrus s’y trouvait ? Silence, faible respiration, aspiration de chaleur.
Son insuffisance l’avait rendu incapable de réprimer un sourire. Un vrai. Ses lèvres franchement étirées, ses yeux clos pour dissimuler leur rire muet. Lui, jaloux ? D’un vulgaire poisson rouge.

— Je ne compte pas la supporter, murmura-t-il très doucement après que Walrus se fût assez éloigné.

Et pendant son absence, pensons, revenons-en à ce pauvre Blondie. On en parlait, on en parlait, mais finalement, on n’en savait pas grand-chose de ce poisson rouge, à part qu’il avait plu à Walrus, qui lui-même soupçonnait Sylar de l’avoir occis. Sans l’aide de la jalousie, soyez-en assurés. Autrement, il serait déjà mort ou devenu fou à force de voir Walrus s’éclipser pour satisfaire des bras inconnus. Non, Blondie avait connu le triste sort de ce qu’on appelait « un jour sans ». Un confectionneur pouvait être prêt à tout pour tester l’une de ses merveilles dans la minute. Et lorsqu’il s’avérait qu’il n’y avait plus de cobaye digne de ce nom à disposition… Eh bien, on se rabattait négligemment sur ce qui restait. Avec Blondie, il avait pu tester l’efficacité et la discrétion de l’un de ses travaux. Le poison avait été radical, quant à la discrétion, il avait fallu repasser. Une malencontreuse couleur avait souillé l’eau transparente du bocal contre lequel Walrus avait presque pris l’habitude de coller son front. Service rendu ? Qui savait. Alors oui, il était bel et bien le responsable, n’avait pas perdu de temps à s’en vanter. Ce n’était qu’un vulgaire poisson rouge, après tout. Il ne s’en était pas soucié outre mesure malgré l’intérêt évident que Walrus lui avait porté.

D’ailleurs, il revint. Très vite. Sylar ne rechigna pas, serra les dents, prenant soin d’apprécier la douceur des gestes de son coéquipier. Ainsi installé, il se sentit mieux. Moins vulnérable, peut-être. Allongé, il n’avait eu que sa stupide faiblesse. Soupir pénible, il s’empara de la tasse de thé, goûtant celui-ci sans tarder. Assurément, il serait trop sucré, se dit-il avant de constater avec surprise que… Je suis tout de même capable de faire du thé sans y ajouter du sucre ! Ah bon ? Semblèrent s’étonner ses sourcils haussés. Puis, il se montra têtu.

— Je n’ai vraiment pas envie de manger. Le thé suffira.

S’il avait cru l’achever au sucre… Il grignoterait des noix plus tard. Avec des dattes. Et peut-être des pêches ! Pour l’heure, son organisme et son esprit étaient encore quelque peu traumatisés, sa mâchoire peu disposée à broyer. La fainéantise du convalescent. Occupe-toi de moi.
Il le remercia, avant de l’écouter en sirotant paisiblement le breuvage dont il s’imprégna lentement de la chaleur. Le titillement sur son avant-bras, la mignonnerie incroyable de Walrus. Il se sentait presque capable de tout lui dire. Mais le ferait-il ? Difficile d’en juger. Il avait retrouvé une certaine gravité, cependant, il était possible d’y lire de l’hésitation. Il s’interrogeait sur les conséquences de ses possibles prochains aveux. Le plus drôle était qu’il n’avait rien à dire que Walrus ne savait déjà, quelque part. Aucune formulation concrète, mais on s’en doutait. Et puis, c’était tellement particulier que le nombre de mots nécessaires pour illustrer « cela » pourrait très probablement rebuter. Précisément :

— Tu sais… J’ai l’impression que je pourrais en parler pendant des heures et des heures. Comme s’il s’agissait d’une muse capable d’inspirer interminablement le plus insatiable des artistes.

Il se laissa aller un peu plus contre les oreillers, la tasse réchauffant le creux de ses mains. Ses épaules s’élevèrent dans un long soupir : il ne savait par où commencer. Et finalement, après quelques minutes de silence…

— Je risque de te chercher sans t’arrêter ensuite, dorénavant. Les limites ne me paraissent plus si excitantes depuis que l’ultime d’entre elles a failli nous séparer. Et il n’aura suffi que de quelques années, alors que nous sommes censés… non, alors que j’espère traverser plusieurs siècles en ta compagnie. Je ne veux rien rater.

Chuchotement. Il ne le regardait pas, faussement épris du reflet de son thé miroitant sous de faibles nuées.

— Depuis ce soir là, lors de la réception où je t’ai davantage reconnu que rencontré, j’ai admis ton emprise sur moi car il n’y avait rien à changer mais tout à créer. Et puis, j’ai progressivement réalisé qu’en plus de n’avoir pas eu le choix physiquement, je ne l’aurais pas eu non plus spirituellement si j’avais aspiré à une conduite différente. Je n’ai jamais été fou, Walrus, et je ne le suis toujours pas. Mais si par malheur je devais te perdre un jour, je ne sais quel genre de bête je deviendrais.

La pire de toutes, assurément. C’était grâce à Walrus qu’il ne se regardait pas. Qu’il ne voyait pas les crimes sur ses mains. Walrus, la clé de Sylar. Sylar qui ne cautionnait pas le sadisme, le trop plein de sang, qui ne partageait pas le plaisir pris au meurtre. Il n’avait nullement la folie du tueur, simplement les capacités, doublées d’une insipide amoralité. Une préservation bien fragile, quand on y réfléchissait.

— C’est comme si je n’avais subitement plus le temps de jouer. Ca passera peut-être, note…

Une gorgée de thé avant de poser la tasse sur le plateau.

— L’idée qui ne me quittera jamais, en revanche, c’est que je t’ai dans la peau. Maintenant embrasse-moi, veux-tu ?

Ses yeux s’étaient tournés vers lui. Sourire, si rare, trop rare. Il ne voulait que ses lèvres pour un petit instant. S’assurer qu’il était là, naturellement articulé, maître de ses gestes. Vivant. Son Walrus.
Anonymous
Invité
Invité
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyMar 14 Juil - 16:14

    Sourire. Peut être trop carnassier, douce menace prédatrice. Je n’ai vraiment pas envie de manger. Le thé suffira. Bien sur, et il croyait sans doute que je n'y trouverai rien à redire ? Bien sur... Je m'étais efforcé de l'arracher des griffes de cette fichue lumière blanche pour qu'il se laissa ensuite mourir d'anémie. Quelle implacable logique y avait-il là ! Et pourtant j'acceptais, silencieusement, sans m'opposer le moins du monde. Docilité trompeuse. Sourire condescendant au travers duquel filtrait un "cours toujours, j'aurai le dernier mot". Pas de sucre, alors peut être... Des vitamines ? Vas pour les vitamines. Et puis quelques fruits secs, également, c'était plutôt bourrés d'énergie ça... Ainsi, revêtant le masque de la fausse docilité, je m'emparai d'une pèche, d'un couteau un peu trop aiguisé, et entrepris d'éplucher le fruit. Plateau sur les genoux, il allait me tuer si je répandais du précieux jus de pèche partout sur le parquet, ou sur mes vêtements. Cela revenait au même.

    « Douterais-tu de mon aptitude à la concentration, par hasard ? S'il ne s'agit que d'heures... Nous avons des siècles devant nous, si je ne m'abuse ! »

    Evidemment, tant que tu ne mets pas fin à tes jours de la plus absurde des façons. Et puis, silence... L'hésitation sans doute, suivie du choix difficile des mots, de la manière de les imbriquer les uns dans les autres... Au fond, j'avais déjà la sensation de comprendre la chose avant même qu'il ne l'ait formulée. Mais j'avais besoin qu'il m'expliqua de vive voix ce qui avait toujours été tu. Nous en avions besoin. parce que les choses n'allaient pas si naturellement que cela, sans nécessité d'être dîtes et confiées. Parce qu'il n'était pas vain de prononcer à haute voix ce qui semblait aller de soi. Bien au contraire... J'avais besoin qu'il le fasse, certain qu'assumer mes propres émotions n'en découlerait alors que plus surement. Chuchotement... Espoir, promesse... Je n’ai jamais été fou. Ah bon ? Moi, en tout cas, je l'étais... Ou pas. Sourire teinté d'amusement. Parce que cela ne m'évoquait que trop bien le continuel "je ne suis pas folle, vous savez !" de la petite Alice. Ça passera peut-être, note... Peut être. C'était une promesse, parce que peut être signifiait qu'il y aurait d'autres occasions. Peut être, ça signifiait qu'il y aurait le nous, et cela me plaisait...

    « Je ne suis pas fou non plus, tu sais ? Disons que, je n'entre simplement pas dans la norme. »

    Petite imitation, ma fois, très réussie d'Alice. Laissant distraitement traîner mon précieux poignard sur le plateau métallique, j'abandonnai ensuite les morceaux dégoulinants de fraicheur et de vitamines dans une coupole fragile. Imperceptible froissement lorsque je séchai mes mains blafardes et trop trompeusement délicates pour en chasser le jus fruité à l'aide d'un torchon immaculé. Et puis... L’idée qui ne me quittera jamais, en revanche, c’est que je t’ai dans la peau. Maintenant embrasse-moi, veux-tu ? Nouveau silence... Mes sourcils se froncèrent d'eux-même, tentant d'amoindrir l'impression que devait donner de moi la soudaine rougeur qui maculait mes joues. Menace, menace... Regard féroce... Tentative ratée, complètement anéantie ! On aurait cru s'être trouvé en face d'un adolescent en passe d'offrir son tout premier baiser. Et pourtant, j'avais déjà expérimenté bien pire ! Reprenant maladroitement contenance, je m'efforçai pour la peine de revêtir l'arrogant sourire habituel. Qui s'apparenta peut être plus à une grimace, somme toute craquante, pour le coup...


    « Si je cède à l'invitation, tu t'engages à manger la pèche que je viens de te couper en petits cubes admirablement symétriques au péril de ma vie ? »

    N
    on, Walrus ne perdait jamais le nord - pour cela, il aurait déjà fallu que je sache où le nord se trouvait, mais passons... L'oppressante envie de dévorer ses lèvres m'arracha tout reste de patience. Vertu que je ne possédais décidément pas ! J'avais tenu là mon ultime possibilité de chantage afin de le forcer à s'alimenter. C'était sans compter sur mon tempérament si peu enclin à résister à l'impulsion. A lui résister. Au lieu de quoi je sentis bientôt sous mes genoux la dureté du sol. Mes doigts se refermèrent sur les siens, redevenus tièdes, si tièdes... Mes lèvres s'attardèrent sur le lobe de son oreille, vagabondant sur sa peau de neige par simple caprice. Souffle brûlant, réminiscences. J’ai admis ton emprise sur moi... Soupire d'envie. Délaissant finalement sa nuque, la courbe délicate de son cou, je franchis la distance qui me séparait des lèvres tant convoitées avec avidité. Encore marquées par l'enivrante odeur de menthe du thé qui les avait si diablement bien tiédies. J'aurais désiré l'étreindre, à l'en étouffer peut être, violent besoin de sa présence. Mais je n'avais la possibilité ni de m'appuyer sur son épaule meurtrie, ni de l'enlacer à cause de sa blessure au ventre. La douce étreinte de mes doigts se raffermie sur les siens. Mes lèvres cherchaient les siennes, taquines et capricieuses, tantôt dévorantes et tantôt lascives... Effleurant, caressant, envahissant. Douce offrande parfois. Brulante exigence la seconde d'après.

    Mais je dus m'arracher à l'échange, poitrine agitée par un soulèvement inégal, trop vif. Je déplorai les intolérables rougeurs qui maculaient de nouveau mes joues avec indécence. Une respiration plus sage et plus posée s'installa de nouveau après de longues minutes, ayant bataillé contre l désire naissant qu'avait éveillé notre baiser. Les mains de Sylar furent bientôt encombrées d'autre chose que les miennes, à savoir un bol rempli des prétendus cubes. La symétrie et moi... Bah, c'était tout de même très artistique ! Cuillère. Sourire en coin...


    « Si tu veux, je peux te la donner bouchée par bouchée... »

    L'hilarité, fugace et passagère apparition. Vint ensuite la sensation que je devais moi aussi confesser ce qu'il savait déjà. je soupirai mollement, conscient que je n'étais sans doute pas plus doué pour discourir que pour découper une pèche ! L'embarra de la situation me poussa à triturer la manche de sa chemise une fois de plus. N'est-ce pas, qu'elle était passionnante à regarder, cette manche négligemment remontée ? Assurément. Véritable délice pour les yeux. Et doté d'un intérêt sans pareille !

    « Sylar, t'ai-je fait... Du mal ? A vagabonder un peu n'importe où, j'entends. Tu sais, ç'a toujours été compliqué, toi et moi. Non pas qu'il s'agisse d'une excuse, car après tout, j'ai toujours éprouvé cet élan cuisant de possessivité à ton égard... Je crois que, ma façon d'apprécier quelqu'un a le don d'être particulièrement destructrice. Surtout, dés que cela te concerne toi. Au fond, j'ai toujours désiré que cela t'affecte. »

    C'était l'une des raisons à mes incessantes escapades. La plus facile à assumer. Le reste, je ne voulais pas en entendre parler. Et pourtant, l'origine de ce profond malaise, la source de la recherche insatiable de l'autre, je la sentais toute proche... Palpitante, déchirante révélation. Vulnérabilité. Je ne voulais pas de cette explication, de cette rationalité. Je ne souhaitais pas savoir... Savoir que ces souvenirs me hantaient encore. Savoir que j'étais resté empêtré dans la noirceur. Malgré ce que j'étais devenu... Savoir que je n'étais rien de plus que ce gamin abandonné, trahi, vulnérable. Que c'était là l'origine de ce désire intarissable d'être aimé. Non, tout cela, pour rien au monde je ne désirais le savoir...


    « Mais la vérité, c'est que je n'appartiens à personne. Pas même à toi. »

    Murmure, murmure. Pourtant tranchant, pourtant si froid.


    « Et j'aimerais que cela change... »
Walrus
Walrus
team steak haché
team steak haché
HUMEUR : Bweh.
CITATION : « L'objet possédé est heureux tant que son propriétaire l'a à l'oeil... »

BOITE A JETONS : 0000

FICHE : La Cabane à Huîtres.
NOTEBOOK : Le moule à muffins
VIE SOCIALE : La pêche à la crevette
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyMar 14 Juil - 22:35

Mais les douces attentions passaient avant. Il mangerait, foi de Walrus ! Il s’était naturellement abstenu de grimacer, également de se montrer trop investigateur quant au soin qu’apportait son coéquipier à la tâche. Plus insidieusement, la reconnaissance menaçait de donner à ses yeux un éclat trop doux. Il tint pourtant bon, songeant uniquement à son désir du moment. Et quelques idées, par-ci, par-là… Non, Walrus n’entrait pas dans la norme, il la détruisait. Il n’y avait pas besoin de l’observer très longtemps pour parvenir à cette déduction. Sylar, lui, l’avait compris dès le premier soir, dès le premier contact, dès le premier regard. Plus tard vinrent les découvertes. Cette rougeur sur ses joues, par exemple. Qui devenait son alliée la plus efficace, la plus charmante en trahissant Walrus. Tout en manquant de le trahir lui. Amusement intérieur, attendrissement. Il n’avait plus qu’à se demander ce qu’il n’accomplirait pas pour détailler à jamais cet éventail de moues redoutables et sans pitié !

— Je m’y engage.

Et sans céder au sarcasme, s’il vous plait.
Du reste, ce n’était pas un sacrifice bien difficile. Il affectionnait tant les pêches. Croquées à pleines dents… Mais pas de place au caprice, n’est-ce pas ? L’œuvre de Walrus valait la peine d’être mangée ! Tout comme sa bouche, si délicate lorsqu’il en décidait ainsi. Plus de cynisme, ni d’allure de fauve gouailleur. Rien qu’un étouffement de désir. Oh, pour cela, Sylar réprima le sien avec fureur. Il n’avait que trop bien conscience de son incapacité. Empêché de le serrer dans ses bras, de le retenir, de l’emprisonner, tout simplement. Bercé par le prélude de soupirs, il faillit gronder de mécontentement. Frustration barbare ! Mais ses lèvres s’efforcèrent de se montrer dignes de leurs jumelles, en jouant, fuyant pour revenir à la charge armées d’une passion inusitée. Ses doigts s’étaient agités pour finalement mourir comme un serpent maîtrisé par quelque chasseur n’usant pas de charme mais de force brute. Et le plaisir enlaçait dangereusement sa poitrine avec l’assurance contrariante d’un mécanisme qui ne connaissait pas l’erreur.
L’erreur. Elle sauvait parfois, s’avérait souvent utile. Jamais il ne sous-estimerait le pouvoir de celui qui le surplombait. Jamais il n’oublierait la seule et unique puissance capable de le priver de lui. Il semblait qu’il ne pouvait trouver cette chaleur ailleurs, cette douceur qui savait si bien se marier avec une pointe de tranchant catégorique et impérieux. Des douceurs, il en existait d’autres, tant d’autres, mais celle-ci demeurait sa préférée. Il lui réservait une force d’envie plus colossale encore que l’ardeur diabolique des enfants. Mais il n’était pas encore temps de la déployer.

Sa faiblesse le rappela à l’ordre ; une douleur à l’abdomen qui manqua lui tordre le visage, l’air qui s’infiltra trop brutalement dans la compression de sa blessure. La fin des gourmandises. Il en aurait crié de rage. Son dos s’enfonça dans les oreillers, ses yeux terminèrent de s’ouvrir, chassant la volupté et les rougeurs à grands coups de raison. Ses mains s’emparèrent de la coupole, jaugeant son contenu d’un air peu convaincu. Vivement, il saisit la cuillère, l’air de dire qu’il n’y avait aucune chance – ou presque – pour qu’il se montrât si ridiculement dépendant.

— Justement, je ne veux pas, maugréa-t-il après avoir parfaitement repris son souffle.

Il ne tarda pas à se rafraichir la langue avec l’un des cubes de pêche, se délectant du goût chaque fois retrouvé. Un enchantement. Personne encore ne l’avait surpris à dévorer toute une corbeille de ces fruits en période de trop grande chaleur. Sylar, mystérieuse bestiole avide de pêches. Il les mangeait sans jamais se lasser ni éprouver le moindre dégoût.
Hélas, un soupir rompit le charme, l’alerta, le rendit entièrement attentif. Bien sûr. Une évidence. C’était maintenant le tour de Walrus. Il laissa sa manche en proie à une trituration très certainement salvatrice pour celui qui s’y employait. Et il l’écouta. Sans réagir. Car il y avait largement de quoi. Contrariété, douleur, peut-être même fureur. Sylar aurait pu avoir peur, à cet instant. Non pas de son coéquipier, mais de lui-même. De son envie soudaine de mentir. De lui dire que ses tentatives de l’affecter sur ce terrain là étaient vaines. Qu’il pouvait bien céder son corps, son plaisir, ses soupirs à qui il voulait, jamais il n’en sortirait irrité. Jaloux.
Un semblant d’amertume, peut-être, quand il lui répondit précipitamment.

— Alors, si j’ai bien compris, je te ferais plaisir en te disant que oui ?

Façon particulière de riposter. Presque méchante. Il connaissait son Walrus. Possessif, certes. Colérique quand on s’approchait trop de lui, Sylar, jeune homme qui ne pensait pas à faire la cour. Ou plutôt, qui ne ressentait pas le besoin oppressant d’éprouver un quelconque sentiment d’exclusivité. Enfin… Il était prétentieux de se penser à l’abri. Il n’aimait pas savoir Walrus dans d’autres bras, et c’était précisément pour cette raison qu’il n’y pensait pas. Il survivait dans une jalousie inconsciente, si on pouvait appeler cela jalousie.
Appelons cela jalousie, pour faire simple. Sentiment impropre rehaussé par l’aveu déchirant. Pas même à toi. Une chose qu’ils ne partageaient pas : l’impression d’appartenance. Oh. Il n’avait pu s’empêcher de détourner les yeux. Mais simplement pour réfléchir ! Aucune colère ne l’animait. Un peu de souffrance, rien de grave ni de remarquable. Tout comme le soulagement qui l’investit au son de l’espoir formulé par Walrus. Il lui était désagréable de changer si vite d’état intérieur. Contrariété, puis contentement presque honteux.
Cube de pêche.
Comment le prendre ? Il ne devait pas se laisser aller au jeu de l’orgueil. Il ne devait pas oublier. Garder la sincérité à l’honneur. Walrus voulait voir les choses changer. Comme Sylar voulait croire qu’il désirait lui appartenir, abandonner ces « autres » qui ne le connaissaient pas. Par conséquent, il allait lui exposer les choses point par point. Calmement, avec ce qu’il fallait de sévérité.

— J’ai fait de l’indifférence l’une de mes meilleures armes, commença-t-il après s’être éclairci la gorge. Et crois-le, je suis heureux de pouvoir me le permettre. De ne pas réagir à tes provocations ainsi que tu le voudrais. Que ferais-tu si, pour te répondre, j’allais voir Pearl pour céder à ses avances ? Si j’abandonnais la place vacante de mon lit au premier individu qui me plairait ? Sois destructeur si ça te chante, mais en ce qui me concerne, je ne ferai jamais rien qui puisse rendre cette situation autodestructrice. Je ne suis pas comme toi, Walrus. Tâche de ne pas l’oublier.

Il n’avait pas songé à son passé. Bêtement parce qu’il n’en avait aucune idée. Il ne connaissait rien de ces circonstances misérables, et peut-être valait-il mieux ? Restait que…

— Naturellement, je ne peux prétendre être totalement impassible. Mais je n’y pense pas, vois-tu, autrement, oui, tu me ferais beaucoup de mal. Imaginer des mains pleines de doigts courir sur toi…

Il parut frissonner. Un bourdonnement dans ses entrailles, et le voilà qui repartait.

— En fait, je ne le conçois pas. Il me faudrait sans doute le voir pour le croire. Et que cela ne te donne pas de mauvaises idées.

Comme il l’en savait capable ! N’avait-il pas dit lui-même qu’il voulait l’atteindre ? Il faillit s’imaginer regagner la péniche et surprendre son Walrus partager un plaisir autre que le sien. Mais il embraya de justesse sur une autre idée, afin de ne rien supporter.

— Il n’empêche que ton envie de changement n’est peut-être pas la meilleure chose à souhaiter. A qui désires-tu appartenir, Walrus ? Si je n’ai jamais ouvertement prétendu te faire mien, c’était simplement pour ne rien revendiquer de dommageable. Car serais-tu véritablement heureux de devenir une exclusivité ? La mienne, qui plus est ? Moi-même je ne me connais pas sur ce plan là. Jusqu’à maintenant, je n’ai jamais fait que m’offrir en tant que privilège sans en attendre autant d’autrui. Mais je saurais déjà dire que m’appartenir, Walrus, reviendrait à choisir sans hésitation entre eux et moi.

Il l’avait regardé droit dans les yeux. Mélange dérangeant de couleurs, gravité et espoir à la fois. Se montrer strict pour préserver une certaine crédibilité, masquer la vulnérabilité que creuserait ou comblerait la réponse du coéquipier qu’il estimait tant.
Anonymous
Invité
Invité
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyMer 15 Juil - 15:18

    J'aurais pu me contenter d'afficher la monstrueuse confirmation. J'aurais pu lui dire que oui, cela m'aurait fait plaisir. Ou en rire, distraitement, excentriquement. M'en amuser, avec indifférence. Mais je ne le fis pas... J'avais noté la précipitation, la fuite visuelle, l'amertume timide, la méchanceté presque présente. J'étais rarement sérieux et emprunt de gravité. Je me contentai donc de bannir le sourire habituel... Incapable d'emprunter l'air grave qu'il arborait lui.

    « Syl', Tu connais déjà mes sentiments sur ce point. Ne me fais pas répéter ce que tu n'aimes pas m'entendre dire... »

    L
    e surnom m'était venu de lui même, comme pour alléger la situation. Maintenant j'en étais certain, j'aurais dû me cantonner à l'épluchage de pèche ! Et puis, la chose empira d'elle-même. Parce qu'il n'avait pas compris... A qui la faute ? Moi. Parce que je n'avais dévoilé que le piètre sommet de l'ice-berg, sans lui laisser une chance d'apprécier ce qui je nourrissais sous la surface. Parce que je n'avais expliqué qu'une stupide excuse. Banale, futile, et malgré tout crédible. Mais comment diable aurais-je pu lui confier le reste, lui confier ce que j'étais réellement, alors que je ne l'assumais déjà pas moi-même ? Et il la mentionna elle, unique tabou, la rôtisseuse... Cette détestable sorcière. Il n'était pas à blâmer pour ça, après tout, je ne récoltais là que ce que j'avais semé sans une once de remord. Explosive, la colère enfla trop violemment pour que je ne la contienne !


    « Cela n'a strictement rien avoir ! Je ne... Tu n'étais pas la raison première de ma façon d'être. C'était déjà comme ça, bien avant que l'on ne se rencontre ! Si tu n'avais pas revêtu ta foutue indifférence, les choses auraient changé. Et je t'ai détesté pour cela ! Parce qu'après tout le reste, eux, les basfonds, Patty, tout ça... Je ne pouvais simplement pas accepter que tu possèdes autant d'influence sur ce que j'étais devenu. Tu ne connais pas ce sentiment déchirant de disparition. La sensation d'être happé par la noirceur dévorante, la suffocation... Tu ne sais rien de tout cela ! »

    Non, tout cela, il n'en savait rien. Et moi non plus. Je ne savais pas de quoi je parlais, n'est-ce pas ? Je ne veux pas savoir. Parce que tant que l'on en parle pas, rien de tout ça n'existe. Rien... Rien du tout. Je n'existe pas. Bouffée de souvenirs.

    Eeeeh ? Quel regard impressionnant !
    Un gâteaux plus gros qu'un crâne de troll !
    Pourquoi tiens tu vraiment à me donner un nom si ça t'intéresses pas ?
    Je ne veux rien rater.


    Murmure... Mains qui s'agrippèrent maladroitement pour cesser de trembler. Enlaçant mes genoux, ramenés contre ma poitrine. J'y avais enfoui mon visage, ne désirant pas que Sylar posa les yeux sur ma vulnérabilité. Pour rien au monde. Murmure, à peine audible, tout juste lancé du bout des lèvres...


    « Il s'agissait juste... D'avoir la sensation d'exister... Même si c'était un mensonge, même si cela ne suffisait pas. »

    Et j'aimerais que cela change. A qui désires-tu appartenir, Walrus ? Sans hésitation. Sans doute m'étais-je trompé quelque part... Laissé pour compte auprès d'un arrêt de bus, j'avais emprunté divers trajets, confiant ma destination au hasard tout-puissant. Succédant les lignes, les places, les rencontres. Sans sérieuse implication. Sans perdre le contrôle. Mais je saurais déjà dire que m’appartenir, Walrus, reviendrait à choisir sans hésitation entre eux et moi. Non, décidément, il n'avait véritablement rien compris. Mes prunelles accueillirent les siennes presqu'avec soulagement. Fragile sécurité qu'était le lien visuel qui nous liait en cet instant. Subtil froncement de sourcil. Son prénom, murmuré, comme trop fragile pour être prononcé à haute voix. Et puis...

    « Sombre crétin ! »

    Stupéfiant retour de l'assurance trop arrogante, des lèvres qui se tordent en un sourire suffisant. Fausse exaspération... Et encore, c'était trop peu, sombre crétin. Délaissant la pose d'enfant traumatisé, je m'arrachai à mon perchoir, fondant sur les lèvres sans défense. Un baiser, puis deux, puis trois... Crétin, crétin, crétin. Soupire d'indignation. Tel l'adulte lassé d'expliquer la chose la plus compréhensible du monde au gamin ignorant... Vague ébauche d'un cube, de pèche, que je piochai sans remord dans son bol. Wah... C'était loin d'être désagréable, en fait ! Il allait devoir en faire des stocks, sinon, il risquait de voir ses précieuses pèches disparaître sans plus d'explications !

    « Même si la question était venue bien avant ça, je n'aurais pas hésité une seule seconde. Ce n'est pas vraiment dans mon tempérament. Si tu me reparles de la rôtisseuse, je la tue. Du reste, je t'autorise à me considérer comme tien. Mais attention, j'exige en contre-partie que tu m'achètes régulièrement des pâtisseries ! Et mon bisou du soir, j'y tiens. N'espère pas non plus que je sois moins contrariant que d'ordinaire. J'aime t'embêter, te taquiner, te houspiller, te harceler... Euh, le dernier terme était peut être quelque peu tendancieux, m'enfin... »

    Et bien oui, mon exclusivité avait tout de même un coût. Coût, à dire vrai, qu'il payait déjà bien avant tout cela. J'avais simplement jugé bon de le lui rappeler. Pique-assiette aussi talentueux que voleur de couette et envahisseur confirmé, j'avais entrepris de l'aider à finir sa pèche, en toute innocence. Après tout, il avait affirmé plus tôt ne souhaiter que du thé. Cette pèche m'appartenait donc autant qu'à lui ! Du moins, j'en décidai ainsi sans autre forme de procès. Et sans le moindre remord, dérobant par là la nourriture d'un mourant. Ou ex-mourant, c'était pareille !

    « Moi qui pensait que tu n'avais que des goûts douteux, mis à part le fait que tu aies craqué sur ma petite personne... Mais les fraises, c'est quand même mieux. Tu aimes ça ? »

    M'emparant de la théière encore fumante, je lui servis une nouvelle tasse de thé à la menthe. Cri du cœur presqu'audible: hydrate toi ! Je m'en remplis une également, y ajoutant ensuite plusieurs cuillères de sucre... Une, deux, trois, à la cinquième, je cessai de compter. J'aimais observer la rapide décomposition des petits cristaux translucides. Et l'odeur parfumée, presque violente, anesthésiante. J'en happai les bouffées tièdes comme un drogué sniffant sa dose.

    « Quelle ville détestable tout de même... Je n'y remettrai jamais plus les pieds. Pourrissante et dangereuse. Trop. Syl'... Tu as des frères et sœurs ? »

    Je passai souvent d'un sujet à l'autre comme ça... Manquant peut être de logique, ou simplement fantaisie supplémentaire. Et je ne savais pas s'il en possédait. La chose me rendait curieux, réellement. Imaginer des mini-Sylar m'arracha un sourire... Remarque, je le voyais plutôt enfant unique, pour qu'il supporta si bien la solitude, s'enfermant pendant des heures entière dans son laboratoire. Ou savourant le fait de dormir seul. Tout l'inverse de moi-même, lorsque l'on y réfléchissait bien...


Dernière édition par Walrus le Mer 10 Aoû - 15:45, édité 1 fois
Walrus
Walrus
team steak haché
team steak haché
HUMEUR : Bweh.
CITATION : « L'objet possédé est heureux tant que son propriétaire l'a à l'oeil... »

BOITE A JETONS : 0000

FICHE : La Cabane à Huîtres.
NOTEBOOK : Le moule à muffins
VIE SOCIALE : La pêche à la crevette
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyDim 19 Juil - 1:07

C’était très sérieux, n’est-ce pas ? Ils avaient besoin de se dire les choses ainsi que l’auraient fait les plus lents à la détente. La peur de se montrer ridicule. Walrus prenait généralement chaque situation avec tant de légèreté, amoindrissant sa gravité avec des rires et des regards significatifs. Là, non. Il jouait le jeu, un minimum, jamais au point de se dénaturer. Son surnom l’avait d’ailleurs rappelé à l’ordre au milieu des mots. Doucement, il s’agissait d’une pente. Ne rien dramatiser, garder un recul suffisant. Ce fut en sentant la colère de son coéquipier qu’il arbora définitivement une expression placide. La colère. En ces circonstances, jamais à deux.
Désormais silencieux, il écouta Walrus attentivement, non sans surprise. Et ce qui n’avait fait jusqu’alors que lui effleurer l’esprit sans ordre d’importance lui parut soudain évident. Les secrets. Que Walrus ne mentionnait ordinairement pas, que Sylar ne réclamait pas davantage. Etrangement, sa foutue indifférence n’entrait pas en cause dans ce manque apparent d’intérêt – contrairement aux vagabondages de son coéquipier, ainsi que celui-ci venait de le remarquer. Mais précisément, Walrus n’avait-il pas été reconnaissant envers lui pour n’avoir jamais insisté ? Petite lumière dans l’ombre mystérieuse. Peut-être Sylar tenait-il là une habitude à changer ? Etait-ce une invitation à se montrer curieux ? Les bas-fonds, Patty, tout ça…
Qui es-tu, beau diable ? Beau masque ? Tout mon contraire.

Walrus pouvait être affecté, tandis que Sylar, inlassablement, s’écriait comme le plus stupide des stoïques : même pas mal ! Pour lui, un sentiment de disparition restait un sentiment de disparition, et aucun déchirement n’avait à s’en mêler. La noirceur le dévorait s’il en décidait ainsi. La suffocation, elle, intervenait quand une vérité le foudroyait, celle que, contrairement à avant, il n’était plus possible de se dire qu’il n’avait rien à perdre. L’éventuel déchirement, la noirceur et la suffocation pouvaient en conséquence se résumer à un nom. Tout simplement. Fatalement. Autant dire qu’il préférait rester ignorant.
Pas totalement, toutefois. S’il n’aimait pas les faiblesses de Walrus, c’était parce qu’elles devenaient inévitablement siennes. Et celles qui réduisaient présentement son coéquipier à un retrait d’enfant désabusé, Sylar voulut subitement les connaître. Probablement pour mieux les combattre. Ou simplement pour en porter le poids lui aussi. Ne sois pas égoïste, donne m’en un peu. Mais Sylar savait qu’il ne devait pas s’attendrir. C’était la pire réaction qu’il pût offrir à celui qui comptait le plus pour lui. Alors il ne fit que le regarder, sans souffrance ni compassion. Il ne serait pas le matelas moelleux contre lequel rebondir est si agréable, mais le mur douloureusement dur qui chasse la faiblesse pour rappeler l’armure.
Même si c’était difficile. Il avait toujours un bizarre et désagréable sentiment à chaque fois qu’il constatait combien Walrus et lui étaient différents. La sensation d’exister. Mais pourquoi donc s’en soucier autant ? L’un avait eu un passé pénible, l’autre était né noyé dans les codes et les responsabilités. L’un avait souffert le manque de reconnaissance, l’autre l’avait quasiment acquise de par son seul nom de famille. On ne s’intéressait plus à l’arrangement dès lors qu’il nous était devenu familier. Les tracas survenaient à la suite de cette impression excitante qu’il y a quelque chose à obtenir, après quoi courir. Sylar, lui, avait toujours tout obtenu, et la désensibilisation l’avait empêché d’aspirer à quoi que ce fût. Exister, d’accord. S’en rendre perpétuellement compte, pour quoi faire ? Ah, oui, la disparition qui guettait. Mais il ne fallait pas trop lui en demander sur ce point là.

Comme cette tendance à mal interpréter. A tourner autour de la compréhension avant de la saisir. Sombre crétin !
Mais que veux-tu, à la fin ?

Que tout redevînt simple, comme avant ? Avec le progrès en plus. Plaisir soigneusement dissimulé lorsque les lèvres de Walrus piquèrent furieusement vers les siennes. Quelle douce punition. Une honteuse incitation à la récidive. Mais il fallait lui pardonner. Tout comme il ne devait pas en vouloir à Walrus de grossièrement en profiter pour lui voler sa maigre collation. Enfin, qui s’en plaindrait. Pour l’heure, il se sentait plus d’humeur à se nourrir de mots que de mets.
Il fut décidé qu’il ne parlerait plus de Pearl, l’estimant trop – on l’avait déjà dit – pour en faire la proie d’un Walrus fou furieux. Puis il décocha au vilain garnement un regard sans équivoque. Même pensée. Tout ce qu’il venait d’énumérer, Sylar le faisait déjà.

— Tout ce que Madâme voudra, ne put-il s’empêcher de remarquer avec une once d’ironie très perceptible.
Il lui vola la cuillère un instant pour engloutir quelques cubes de pêche et continua.
— Oui, tu aimes faire de moi le mieux traité de tes cobayes, je sais. Et au contraire, je trouve que le terme « harceler » n’est pas du tout tendancieux dès lors que ça te concerne.

Oh, vicieux sous-entendu. Plus fort que lui. Mais quoi ? Le poids de la confidence était provisoirement retombé, mieux valait en profiter. Car il savait pertinemment qu’ils n’en avaient pas terminé.

— Goûts douteux, goûts douteux, tu peux parler. C’est bien malgré moi que j’apprécie certaines choses.

Lesquelles ? Autre regard significatif, mais il prévint la possible vexation de Walrus en lui caressant brièvement l’avant-bras, comme pour lui assurer qu’il existait bel et bien quelque chose, surtout quelqu’un, qu’il se laissait imposer avec un immense plaisir.

— Mais les pêches sont à part. Je les préfère aux fraises que je trouve plus lourdes. J'en mange occasionnellement.

Laissant la coupelle sur ses genoux – Walrus saurait très bien quoi en faire, de la coupelle, et non de ses genoux – il prit la tasse de thé et souffla aussitôt dessus, non sans avoir jeté un coup d’œil dépréciateur aux nombreuses cuillères de sucre ajoutées dans la seconde tasse. Assassin. Homme sans langue – quoique… !
Il manquait quelque chose, non ? Bien sûr, le retour des confidences. Le thé les y obligeait, n’est-ce pas. Tandis que le trop plein de sucre transformait une ville détestable, pourrissante et dangereuse en ses frères et sœurs inexistants.
Sylar ne comptait pas si facilement faire l’impasse sur les secrets à moitié avoués de Walrus. C’était trop tentant, trop présent pour feindre l’indifférence. Mentionnés à deux reprises ils n’attendaient assurément que d’être entièrement dévoilés ! Mais lui d’abord.

— Non, pas encore, s’enquit-il. Je dis ça car je soupçonne mes parents de vouloir donner naissance à un autre garçon, qui réussirait là où moi j’ai échoué.

A la tête d’un important patrimoine, marié, père de plusieurs enfants, au moins d’un fils. C’était ce qu’il aurait dû devenir. Monsieur Black, et non Carpenter, coéquipier d’un dangereux tueur à gages nommé Walrus. Il eut un sourire amer, regardant son thé comme s’il s’était agi d’un miroir de vie.

— Tant mieux. La compagnie d’un frère ou d’une sœur m’aurait peut-être changé. Qui sait alors si je t’aurais découvert. Si je n’aurais pas refusé de te suivre pour que tu me tranches ensuite la gorge avec ton poignard. En fait, c’est drôle, mais je me rends compte à l’instant n’avoir jamais songé à la moindre alternative.

Alternative, alternative… Stop ! Ne pas y penser. Regrets ? Certainement pas. Sylar n’était pas affecté. Et avant que Walrus n’eût pu répondre quoi que ce fût, il ajouta.

— Permets-moi cependant de nous interrompre. Je crois que ce n’est pas de moi qu’il faut parler. Naturellement, et comme d’habitude, je ne compte pas insister mais… Si tu désires t’épancher, considère que je suis un mur hautement efficace. Et même sans oreilles, si tu le souhaites, ni mémoire. Je sais que tu n’aimes pas être pris en pitié, et cela n’a jamais été mon intention. C’est juste que… Je n’apprécie pas de te voir rattrapé par une vulnérabilité dont je n’ai pas la moindre idée. Peut-être suis-je simplement curieux.

Il ne sut s’il avait utilisé les mots justes pour le convaincre. Il l’espérait fortement. Et savoir l’essentiel lui éviterait certains malentendus. Peut-être même que Walrus le lui devait, maintenant qu'il avait ouvertement affirmé lui appartenir ?
Anonymous
Invité
Invité
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyVen 24 Juil - 22:26

    Comme c'était paradoxale, n'est-ce pas ? Habité par la contradiction la plus complète, j'avais débité des absurdités aussi délirantes que véridiques. Car véridique, cela l'était, non ? Assurément. Éprouver sa résistance, sa froide indifférence. La provocation, insatiable obsession, encore et toujours... Insatisfaction face à l'absence de réaction. Et pourtant, pourtant... Bénir cette si détestable indifférence. Parce qu'elle était source de facilité. Parce qu'elle épaississait le mensonge. Parce qu'elle m'épargnait moi, tout en me déchirant avec trop d'aisance. Mais que voulais-je à la fin ? Tout, et rien à la fois. Il y avait toujours deux parts en moi, qui s'opposaient avec violence. Et les non-dits, les non-dits... Non, c'était plus que cela: des secrets, voilà ce que j'en avais fait, à force de réponses évasives, de fuites, d'absence de justification. Cela ne te regarde pas. Des mots dépourvus de substance jetés sur les ondes sonores avec presque trop d'insouciance... Parce que lui avouer quoi que ce soit lui aurait donner trop d'importance, définitivement trop. Pourquoi diable lui aurais-je dévoiler une si grande partie de moi ? Oui, pourquoi, on se le demandait... Et j'aimerais que cela change... Inutile. Il suffisait de continuer, comme si de rien était. Quelques petites modifications. C'était ce qu'il y avait à venir, qu'il nous fallait changer. Nous n'avions pas besoin de parler du passé, n'est-ce pas ? Je dis ça car je soupçonne mes parents de vouloir donner naissance à un autre garçon, qui réussirait là où moi j’ai échoué. Sans trop m'en rendre compte, je m'étais mis à forcer les résistances de la cuillère, tordant la malheureuse d'une poigne inutilement de fer... Sylar mettait des mots là où l'irrationalité et les images se bousculaient dans une anarchique hystérie, quelque part dans un coin de mon esprit. Ramassis de flash et de sensations incohérentes.

    « Et pourtant tu en avais une: un sublime tranchage de carotide, fait dans la plus sure des traditions. Je suis très doué pour égorger les gens. Enfin, j'avoue ne pas être certain, aujourd'hui encore, d'avoir jamais eu l'intention de t'assassiner si tu avais refusé de me suivre... Toi et moi, c'était simplement dans l'ordre des choses. Je ne crois pas n'avoir jamais rien éprouvé d'aussi naturel que la conclusion de notre première rencontre. »

    Silence... Je remuai inutilement sur ma chaise, tentant d'ignorer la seconde partie de son monologue, à laquelle je n'avais pas répondu. Faussement saisi d'une soudaine perte d'attention, je sombrai dans la torpeur. Regard perdu dans le vide... Froncement soudain, soupire d'exaspération. Secouant la tête presque fébrilement, je sautai de mon perchoir. Contournant le lit en manquant de trébucher sur les restes de la cuillère remodelée, je vins m'assoir en tailleur à côté de lui...

    « Non vraiment, je ne comprends pas comment tu fais. L'indifférence ne me va pas du tout ! Sérieusement, la prochaine fois que tu m'ignores royalement en faisant mine de te plonger dans la lecture d'un bouquin du genre de l'homme-huître... Je te ferai part de toute l'admiration que je peux nourrir à ton égard ! »

    Un mur hautement efficace... C'était là une excellente suggestion. Bien que je doutais sérieusement qu'il fut hautement efficace, meurtri et fragilisé comme il pouvait l'être à l'instant. Sauf qu'il n'avait pas dit cela au sens propre du terme, bien sur. J'avais englouti ma tasse de thé avant de me précipiter sur le lit, manquant par là de m'étouffer entre autres. Ayant donc les mains libres, je m'allongeai sur la place restante - le bonheur des lit double - soutenant ma tête avec désinvolture. Imperceptible contrariété. Je ne pouvais décemment pas envahir son espace à lui. Le moindre mouvement lui était sans doute douloureux, s'il tombait malencontreusement du lit par ma faute, il risquait même d'y rester ! Bon, j'exagérais peut être très légèrement, force était toutefois de constater que j'allais devoir réfréner mes caprices de monopolisateur de couette et d'espace !

    « Et bien, Mr. le mur hautement efficace incapable de s'éplucher lui-même une pèche... Je suis à toi, c'est un fait. Je viens tout juste de le décider sur un coup de tête, et toi, tu penses déjà avoir le droit de satisfaire ta foutue curiosité ? Tu crois sérieusement que je vais répondre à toutes tes questions, alors que cela fait des années que je me contente de t'envoyer paitre ? »

    Exaspération, ironie légère... Et puis, fusant sur un ton totalement inapproprié, "D'accord". Clamé presque trop docilement, concession aussi stupéfiante que peu familière. Que voulait-il savoir ? Tout ? Tout. Ou peut être pas. Je ne savais pas encore ce que je désirais réellement lui confier. Rescapé ou pas, s'il faisait preuve de la moindre once de compassion, je comptais fermement l'étouffer avec mon oreiller. Bon, peut être pas immédiatement... Une petite séance d'abus avant de l'assassiner purement et simplement. Car il savait combien je pouvais porter en horreur la compassion, la pitié... Autant de stupidités outrancières que je n'avais nullement l'intention de supporter.

    « Tu veux la version avec les descriptions écœurantes et macabres retranscrites jusque dans les moindres détails ou bien la version Boogeyman ? »

    La version Boogeyman... Si j'avais été humain, si je n'avais pas résidé à Malkins, et si j'avais eu connaissance de l'existence de cette chose: j'aurais pu remplacer le terme par la 'version bisounours'. Mais ce n'était nullement le cas, et nous autres Epouvanteurs ne portions pas véritablement en haute estime notre petit Croque-mitaine. Quoi qu'il fut très utile pour les taches ménagères du QG. Disons le clairement, il faisait figure de chiot au milieu de la meute de loups ! Pathétique...

    Allons y pour la version Boogeyman ! Récapitulons brièvement... Sylar, que savait-il déjà au juste ? Que j'avais principalement grandi dans les Basfonds, entre meurtres et débauche... Plutôt sympa comme endroit. J'ignorais s'il y était déjà allé. Peut être pour le marché noir, à la recherche d'une quelconque substance illicite et rare ? Peut être pas. Autant dire, à peu de chose près, qu'il ne savait rien du tout.


    « Pour faire simple, mes géniteurs m'ont vendu quand j'étais môme. 7 ans, pour être exact. A combien m'estimerais-tu ?! Bon, j'avoue qu'à l'époque je ne valais pas aussi cher qu'aujourd'hui, ils ont dû s'en mordre les doigts d'ailleurs... Acheté donc, direction l'une des nombreuses entreprises illégales de l'Envers. Tu as droit à un joker concernant les descriptions détaillées, puisque c'est la version Boogeyman. J'ai fugué, plusieurs années plus tard, sale gosse parmi tant d'autres, au milieu des poubelles et des trafiques d'algues hallucinogènes... »

    U
    ne petite pointe d'ironie, le tout servi sur le ton sarcastique habituel. Je n'avais pas envie de raconter la chose avec sérieux. Tout en poursuivant le récit de ma passionnante petite existence, je tentai d'ouvrir le tiroir de l'une de mes tables de chevet. La clef s'obstina à ne pas entrer dans la serrure, j'employai donc les grands moyens en réduisant en bouillie le petit meuble prétentieux. Une patience d'ange... Arraché à sa carapace de bois, le fameux tiroir révéla divers choses. Dont une photo négligemment entretenue, autrement dit marquée par les trop nombreux pliages et repliages. Je la lui glissai dans les mains presque distraitement. Ronchonnant à la vue de l'adolescent au regard trop cruel et à la moue mauvaise. Non, vraiment, je n'étais pas représenté sous mon meilleur jour... Et puis je la détaillai elle, du coin de l'œil. La trentaine, ramassis de boucles brunes désinvoltement emmêlées, sourire séducteur et dégoulinante de sensualité: une vraie débauchée, oui ! Je me rappelais vaguement avoir rechigné à poser pour la photo, m'être rebiffé quand elle m'avait saisi par les épaules, tenant l'appareil d'une main... Et ça, c'était quoi ? Sur ma joue...


    « Patty, elle m'a presque kidnappé, cette sale bonne-femme... Une vraie sorcière ! Et tueuse à gages de surcroit. Complètement irresponsable, la débauche incarnée... Rien avoir avec moi. C'est elle qui m'a appris à égorger les gens avec efficacité, classe et style, pour la citer. Et, puis pourquoi je... Ah oui, elle m'avait collé un pain juste avant de prendre la photo. Elle était plutôt célèbre dans le milieu. Oh, elle a quand même fini par crever. Tiens, je te la donne cette satanée photo, tu n'as qu'à la bruler. Voilà, c'est tout. Autre chose ? »

    Non, bien sur, ça n'était pas tout. Il restait un non-dit, qui deviendrait peut être un secret. J'aurais sans doute dû éviter de le questionner sur ses frères et sœurs inexistants. Guettant la bouffée de pitié, j'avais refermé ma main sur l'un des nombreux coussins présents sur le lit... Près à l'étouffer presque s'il s'avérait que la compassion surgissait réellement.


Dernière édition par Walrus le Mer 10 Aoû - 15:46, édité 3 fois
Walrus
Walrus
team steak haché
team steak haché
HUMEUR : Bweh.
CITATION : « L'objet possédé est heureux tant que son propriétaire l'a à l'oeil... »

BOITE A JETONS : 0000

FICHE : La Cabane à Huîtres.
NOTEBOOK : Le moule à muffins
VIE SOCIALE : La pêche à la crevette
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptySam 25 Juil - 16:23

Il semblait que les réactions de Walrus étaient plus disposées à se manifester que les siennes. Ce genre de conversation dérangeait, il n’y avait aucun doute. Mais Sylar y tenait. Alors, il ne chercha pas à se rattraper, qu’importait la cuillère cruellement soumise, elle n’était pas équipée pour se plaindre. Il ne se laissa pas non plus charmer par le soulagement qu’il venait de ressentir, un sentiment commun, je n’ai rien éprouvé d’aussi naturel que la conclusion de notre première rencontre, l’impression si grisante, pour lui, de se reconnaître, de ne pas se sentir ridicule par l’originalité de son idée. Car elle n’avait rien d’original. Elle était partagée. Et naturelle. Simplement dans l’ordre des choses. Mais poser les mots correctement ne suffisait généralement pas à détourner son attention. Imperceptiblement investi par la perplexité, Sylar considéra son coéquipier, qui sombrait, sombrait, aspirait visiblement à se trouver hors d’atteinte de sa curiosité. Il lui laissa toutefois le temps de se ressaisir, reste d’espoir à peine consommé de le voir se décharger de ses tourments qui le suivaient depuis un trop long moment.

Il but une gorgée de thé afin d’alimenter efficacement sa patience. Walrus semblait lutter intérieurement. Fascinant à observer. Et le nombre de mimiques qu’il pouvait enchaîner à la suite… Parlera, parlera pas ? Réticent, à n’en point douter. Sylar le suivit attentivement du regard, plus par plaisir inavoué que par intérêt de trouver le moindre indice quant à ses intentions. Il comprit alors. Tentative ratée d’indifférence. Tristement ratée, même, si bien qu’il eut un discret sourire, à défaut d’en rire. Il pouvait toujours lui apprendre… L’indifférence était si plaisante à employer une fois maîtrisée. Mais tout aussi éprouvante à assimiler, surtout lorsque la victime était quelqu’un de cher.
Pour l’heure, il se contenta du silence, de la nouvelle présence à son côté qu’il apprécia, sans néanmoins projeter de se replonger un jour dans quelque lecture douteuse pour l’ignorer. Pitié. Et puis, cela se saurait s’il avait besoin d’un quelconque faire-valoir, n’est-ce pas ?

Laissant Walrus s’installer à son aise – mais pas trop – Sylar déposa sa tasse inachevée – assez de boire – sur la table de chevet, sans trop étendre son bras afin de ne pas subir les élancements qui emprisonnaient douloureusement son buste. Il faudrait bientôt s’habituer à la douleur, car hors de question pour lui de rester trop longtemps allongé. Il ne supportait pas cette vulnérabilité excessive. Il était par exemple dans l’incapacité de faire ravaler ses paroles à Walrus. Et pourtant, il s’en serait trouvé heureux, véritablement.
Ses yeux, si tranchants d’inexpressivité, se plantèrent impérieusement dans ceux de son coéquipier. Il n’écoutait pas seulement, il enregistrait. Sur un coup de tête, foutue curiosité, t’envoyer paitre. Voilà qui résumait drôlement bien la situation. Mais il n’eut pas besoin de répondre par l’affirmative. Un sourire non réprimé de victoire quand le « D’accord. » tomba. Il n’eut pas la prétention de songer qu’il s’y était attendu, mais n’eut pas la modestie non plus de se montrer surpris. S’en réjouir, tout simplement.

— Allons au plus court et au moins éprouvant, je dirais.

Il avait eu sa dose de sang pour l’instant, si bien qu’il était prêt à remercier Boogeyman pour l’once de douceur qu’il apportait au tableau. Sylar devait bien être le seul à ne jamais l’exploiter. Parce qu’il préférait se rendre service lui-même ou, le cas échéant, asservir Walrus à la place.
Du reste, il ne chercha plus ses yeux une fois le récit commencé. Le visage légèrement incliné vers lui, pour montrer qu’il écoutait, rien de plus. Ce serait plus facile. Etrangement, il n’arrivait pas vraiment à prévoir les sentiments qu’engendrerait en lui l’énonciation de vérités réputées difficiles à entendre. Alors, si une fois de plus son regard pouvait mentir…
Vendu à sept ans. Il se tut, gardant sa gravité habituelle. Il s’efforçait de n’entreprendre aucune comparaison intérieure, de ne pas songer à quel point le hasard pouvait se montrer cruel. Mieux valait s’accrocher à la légèreté de Walrus. A combien m’estimerais-tu ?! Insulte. Un homme que même la fortune des Black ne pourrait acheter. En posant un prix sur sa tête, on le salissait encore, encore et encore.
Maison de passe. Sylar prit soin de ne pas trop serrer la mâchoire, consommant son joker avec joie. Il se souvenait n’avoir jamais eu l’occasion de soupçonner cette dimension, au même âge. Mais il ne poussa pas plus loin. Il avait tardé à fuir ! Le redressement tant attendu, prélude au long chemin qui avait fini par le mener jusqu’à lui. Il imaginait sans peine son Walrus, furieux, inapprivoisable, se rebeller avec ardeur contre la destinée qu’il n’avait jamais considérée comme sienne. Et après ?
Cassons la table de chevet d’abord.

— Tu la remplaceras.

Automatisme. Quelque part pour assurer que tout allait bien de son côté, que la compassion ne menaçait pas de surgir. Oui, c’était sans doute pour ça qu’il n’avait pas hésité une seconde à rappeler son coéquipier à l’ordre. Même si cette table de chevet lui appartenait et qu’il était en droit de la garder cassée. « Ca fait pas prop’ », comme qui dirait. Surtout qu’elle contenait vraisemblablement quelques secrets. Un peu de respect pour ce qui nécessitait la protection d’une clé.
Il prit la photo, son regard instantanément happé par le petit bout d’adolescent qui partageait aujourd’hui sa vie. L’impression de pénétrer dans un sanctuaire. Le petit tueur dans toute sa douloureuse splendeur. Bien malgré lui, il eut un sourire narquois en détaillant l’expression mauvaise, comme s’il contemplait l’image d’un petit caïd trop peu crédible. Et pourtant, quelle menace il représentait désormais !
Tandis que Walrus lui donnait ses explications, Sylar s’intéressa enfin à la « raison de tout », celle qui avait fait de son coéquipier ce qu’il était. Jolie. Son apparence criait haut et fort le rôle qu’elle avait joué. Une meneuse, une créatrice. Triste à dire mais, heureusement que Walrus avait croisé sa route, n’est-ce pas ? Au prix de mains sales. Qu’importait, au fond ?
Ignorant les divers commentaires de Walrus qui semblait à tout prix vouloir se différencier d’elle, Sylar répondit :

— Tu tiens beaucoup d’elle, on dirait. Le même charme provocant qui te rend irrésistible aux yeux de beaucoup. Une réplique, en outre, mais en mieux. Et puis, un semblable capable de donner des claques quand il le faut, crois-moi, personne ne peut rêver mieux.

Un dernier regard pour la défunte. Comment était-elle morte ? Le métier ? Plus que probable, mais il ne s’attarda pas, essayant en vain de glisser la photo dans la poche de son pantalon. La brûler ? Jamais ! Hélas, il dut la poser à côté de lui, une plainte rauque coincée dans la gorge suite à la souffrance que le mouvement venait de lui faire endurer. Satanées blessures. Dire que la responsable roupillait à quelques mètres ! Enfin, responsable, il l’était aussi. Stupide.
Pas de pitié, donc. Il contempla Walrus, toujours aussi inexpressif. Ils s’en étaient bien sortis, finalement, non ?

— Merci, j’en prendrai soin, nargua-t-il. Je ne te savais pas du genre à garder tes souvenirs matériels. Enfin, personnellement, je n’aimerais pas vraiment revoir des photos de moi étant plus jeune.

Oui, il avait eu une mère pour les garder. Plusieurs albums en étaient remplis, sauf qu’il n’avait pas pris la peine de prendre l’un d’eux lorsqu’il était venu récupérer quelques affaires. Aucun intérêt. C’était comme maintenir un contact mensonger. D’ailleurs…

— J’ai d’autres questions, si tu veux bien. Tu n’as jamais cherché à retrouver tes parents, pour savoir exactement ce qui est derrière toi aujourd’hui ? Peut-être qu’ils ont fait d’autres enfants depuis, qu’ils ont monté un commerce et… Enfin, Walrus, à l’époque de ta vente, étais-tu fils unique également ou bien… ?

L’humour noir – tu vois que je ne m’attendris pas – avait précipitamment changé de direction. Il ne lui avait pas retourné la question, jusqu’à maintenant, trop obnubilé par le fait d’échapper aux aveux les concernant, lui et sa riche famille. Des frères et sœurs pour Walrus ? Il se l’imaginait parfaitement. Il n’y avait qu’à le voir avec Alice ! C’était tout à fait le genre. Néanmoins, il n’aurait pas laissé le reste de sa famille dans la misère, n’est-ce pas ? Ou peut-être que si. Réponds-moi.
Anonymous
Invité
Invité
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyDim 26 Juil - 14:57

    Tu la remplaceras. Je n'avais même pas le droit d'étaler mes talents de petit diable. Il m'était impossible de traduire ma personnalité confuse et anarchique dans ma propre chambre ! Je n'étais pas très soucieux du rangement. La propreté, certes, mais pas à en devenir fanatique non plus. Et pourtant, oui, j'allai la remplacer. Comme toujours... Du reste, je fus partagé entre le soulagement et la satisfaction: découvrant sa façon de réagir à mes propos, ou plutôt, justement, de ne pas y réagir. Ses prunelles plongeaient tantôt dans les miennes, simple signe d'une attention toute particulière. Pour se perdre ailleurs la minute d'après, alors que Sylar inclinait vaguement la tête d'un côté ou de l'autre. Le même charme provocant qui te rend irrésistible aux yeux de beaucoup. Beaucoup ? Oui, beaucoup. Ça n'était un secret pour personne. Moi-même j'étais conscient de cela. Beaucoup, donc. Oui, mais toi ? Faignant le mécontentement, je grognai presque...

    « Ainsi donc, tu préfèrerais que je te colle des baffes plutôt que ça ? »

    Le ça en question fut bien vite illustré par mes soins. Effleurement fugace, fausse timidité. Revenir dévorer ces lèvres que j'appréciais tant et dont je n'étais jamais rassasié. Personne ne peut rêver mieux. J'observai la tentative de glissage de la photo dans la poche de son pantalon... Et soupirai d'exaspération lorsque le mouvement n'eut pour toute conséquence que de provoquer une nouvelle salve douloureuse. Peut être aurais-je dû le ligoter ? Au moins, il aurait abandonné l'idée stupide de se tortiller pour glisser quoi que ce fut dans ses poches ! Crétin, crétin, crétin. C'était sa faute après tout s'il s'était pris au jeu de la gamine psychopathe.

    « Maintenant que j'y pense, je crois sérieusement que tu possèdes une fâcheuse tendance au masochisme. Même toi, tu aurais dû être capable de maîtriser cet abominable petit démon. C'est sans doute pour ça que tu vis avec moi également. Ou bien... Tu avais simplement envie que je m'occupe de toi ?! »

    L'ironie y était presque trop perceptible. L'hilarité ne tarda d'ailleurs pas à pointer sous le sourire sarcastique. Violents éclats de rire que je ne cherchai même pas à contenir. Oh, non. Il devait détester ce débordement de faiblesse. Vulnérabilité révélée au grand jour, incapacité. Mais nous n'en avions pas terminé. Et déjà me fallait-il répondre aux nouvelles interrogations indiscrètes de Sylar, mon Sylar... Je suis fils unique. Ma bouche s'était ouverte, prête à proférer la réponse par automatisme. Vérité perdue. Réalité qui n'était plus. Plus maintenant. Les paroles ravalées me laissèrent un goût amer, sans que je saisisse le pourquoi de la chose. Après tout, quelle importance cela pouvait-il bien avoir ? Stupeur, lorsque la compréhension s'était infiltré en moi comme un invité non désiré. Oui, j'avais été surpris, mais était-ce tout ? L'agacement aussi... De n'avoir jamais envisagé la chose pourtant logique. Qu'ils chercheraient à remplacer mon existence par une autre, un jour ou l'autre. Qu'ils effaceraient l'histoire, la dilueraient, la brouilleraient au profit d'un nouvel il était une fois. Prenant le soin de séquestrer le cadavre dans le placard. Parce que tant que l'on en parle pas, rien de tout cela n'existe... Je suis fils unique. Froide constatation de l'erreur. Car la formulation correcte, désormais, c'était à l'imparfait qu'il fallait la proférer. J'étais fils unique. Et la vérité, c'était que j'étais bien incapable de saisir jusqu'à quel point cela m'affectait... Ou pas.

    Soupire... Je laissai aller ma tête contre le moelleux des oreillers.


    « Je l'étais. Tu sais, c'est vraiment par hasard, si je suis tombé sur la sale mioche agonisante. Cela faisait des siècles que je n'avais pas remis les pieds à Woollyland. Pas depuis que Pat' m'en avait sorti, en fait... Je me suis fait accosté par une gosse pas plus haute que trois pommes. Si elle avait pu me racketter, elle ne s'en serait pas privée ! Elle m'a presque harcelé pour que j'aille lui acheter un fraisier. »

    J'avais grimacé spontanément, moue dégoutée au coin des lèvres... Je partageais deux ou trois tonnes de points communs avec les gamins, quand on y regardait bien. Et pourtant, je les avais en horreur ! Bien que, contrairement à cette cinglée de sorcière, je n'en étais pas encore rendu à les bouffer pour le quatre-heures... Et puis, la frustration. Violent ressenti, sensation envahissante. Colère et frustration, si familières, si rageantes émotions.

    « Les gens ne s'en aperçoivent que très rarement, mais je suis bien plus attentif et concentré qu'il n'y parait. Mais sur ce coup, j'ai vraiment déconné. Peut être que je n'avais simplement pas envie de le remarquer... Ou peut être que non. Parce que, franchement, elle aurait dû me sauter aux yeux, cette putain de ressemblance ! Cette gamine, c'était le moi d'il y a 10 ans après consommation d'un élixir Vénus ! Un mini-Walrus avec des chaussures vernies et une bouche en cœur. Le plus drôle, c'est que je ne connais même pas son prénom... »

    Oui c'était drôle. J'en vins même à rire presque trop spontanément ! Je ne savais même pas comment diable elle pouvait bien s'appeler. Son nom, je le connaissais. Quoi que... Ils en avaient peut être changé, à cause de ma 'célébrité' ? Ou peut être pas. Je n'en avais pas la moindre idée ! Car justement, je n'avais jamais cherché à savoir exactement ce qui était derrière moi aujourd’hui. Si Sylar m'avait interrogé sur les raisons, j'aurais sans doute prétendu n'en avoir tout bonnement rien au à faire. Chose que mon égocentrisme naturel se serait empressé de crédibiliser... Mais au fond, je crois n'avoir simplement pas eu l'envie de gérer les 'retrouvailles'. Parce les éléments du passé sont trop instables pour que l'on y exerce un quelconque contrôle. Parce que j'ai besoin de ce contrôle aussi surement que j'aime le mettre à l'épreuve. Et parce qu'enfin, je devais bien l'admettre, je n'avais pas le courage d'affronter les origines de mon existence désastreuse. Ce que j'étais devenu, je le leur devais en partie. J'aurais été ravi de leur jeter à la figure la monstruosité, la démence, et toutes les autres qualités nouvelles qu'ils ne me connaissaient pas. Je n'en avais pas eu le cran... J'en aurais presque démoli ma deuxième table de chevet, pour la peine !

    « J'ai fini par comprendre. Comprendre pourquoi j'avais la sensation désagréable de l'avoir connue sans la connaître pourtant. Trop tard... La révélation ne m'est apparue qu'en même temps qu'eux. Et j'aurais voulu les tuer, de la pire manière qui soit. C'était tellement différent du désire habituel. Tellement plus violent... Parce qu'il ne s'agissait pas de tuer pour tuer, parce que le meurtre n'était pas une fin en soi. Non, j'aurais voulu les détruire corps et âme, et m'acharner pendant des heures entières, simplement parce que c'était eux. »

    Je me souvenais parfaitement de l'irrésistible étreinte, l'envie violente, l'impulsion meurtrière. Les choses s'étaient comme découpées en flashs successifs et distincts. La course de ma... Sœur, un pas, deux pas, trois pas. Pas de fluidité, pas de continuité dans l'action. Simple diaporama vivant. Des boucles brunes virevoltantes. Un sourire accueillant mon reflet. Une paire de poignets presque squelettique, une silhouette si frêle, que j'aurais adoré brisé avec délectation. Ma mère ne m'avait-elle jamais paru aussi petite et fragile qu'en cet instant si bref ? Dans mes souvenirs d'enfant, une femme trop droite, trop hautaine, si imposante. Plus maintenant. Le constat avait fusé presque stupidement. J'étais certain de la dépasser désormais d'au moins trois têtes. Lui également.

    Un sourire, un regard. Une main qui se tend, un éclat de rire aussi... Une suite de flashs. Et puis rien. J'avais simplement fui les lieux, incapable de mettre en exécution mon souhait le plus pressant. Je m'étais contenté de partir, sans rien exiger d'eux. Pas même la souffrance, encore moins la mort.


    « La vérité, c'est que... Rien a changé. Je suis parti. Comme gosse bouffé par la peur de se faire choper après la plus grosse connerie de sa vie. Et pourtant, je peux t'assurer n'avoir jamais désiré mutiler quelqu'un autant que j'ai pu en éprouver l'envie lorsque je les ai vu. Lui, à la rigueur. Mais elle, elle... J'étais redevenu un gosse. Quand je me suis retrouvé devant elle, j'étais redevenu Walrus le gamin des rues. Absolument rien a changé. Et crois moi, s'il n'y avait pas eu l'aberration qui dort en ce moment même sur notre canapé, je ne sais pas combien de victimes il m'aurait fallu avant de recouvrer un semblant de calme et de rationalité. »

    J'eus au moins le loisir de constater que confier ma petite escapade à Woollyland à Sylar m'avait permis de mettre les choses au clair. Avec moi-même. Jusque là, j'avais sans doute refusé les flashs. Bien forcé d'admettre leur exactitude, j'étais désormais apte à redevenir le Walrus puéril et désespérant. Je n'attendais pas d'avantage de notre petite discussion, ayant toutefois l'étrange sensation d'avoir renforcé par là ma décision encore toute fraiche. C'était une chose que d'affirmer lui appartenir... Justifier ma vulnérabilité du moment ajoutait plus de poids à la chose. Il n'y a que toi dont j'accepte les questions. Tout comme lui-même supportait de ma part bien plus qu'il n'aurait admis venant d'un autre. Non, non, vraiment. Quiconque aurait eu le malheur de cambriolé sa réserve à poisons, son petit laboratoire secret, aurait certainement péri dans d'indescriptibles souffrances. Je disposais pour ma part d'un seuil limite plus élastique que celui des autres !

    J'en avais désormais assez de monologuer sur ma vie, certes fort passionnante. Il avait voulu savoir, je le lui avais dit. Et c'était tout. Du reste, je n'avais absolument pas envie de me plaindre de quoi que ce fut. Je ne recherchais pas non plus une quelconque consolation. Quoi que.. S'il s'agissait d'obtenir un baiser... Ou deux... Ou trois... Moue capricieuse au coin des lèvres, je rampais presque comme un chaton ensommeillé jusqu'au milieu du lit, franchis la limite et me redressai avec légèreté pour parvenir à sa hauteur. Effleurant du bout des lèvres la jolie gorge que j'avais un jour si regrettablement menacé de trancher... Un soupire du genre "Je suis triste, console moi !" m'échappa, subtilement calculé. Malgré tout, je cessai de dévorer son cou, si gracieuse offrande, engageant l'approche de ses lèvres sans toutefois céder aux viles tentatrices. Feignant l'indécision, sourire en coin.


    « Ai-je su satisfaire ta curiosité ? »


Dernière édition par Walrus le Mer 10 Aoû - 15:53, édité 3 fois
Walrus
Walrus
team steak haché
team steak haché
HUMEUR : Bweh.
CITATION : « L'objet possédé est heureux tant que son propriétaire l'a à l'oeil... »

BOITE A JETONS : 0000

FICHE : La Cabane à Huîtres.
NOTEBOOK : Le moule à muffins
VIE SOCIALE : La pêche à la crevette
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyLun 27 Juil - 13:39

Riposte arrogante et prévue qu’il avait subie sans broncher. Cette fois, il admettait mériter davantage les coups que les baisers. Mais Walrus devenait-il laxiste ? Alors, Sylar pourrait certainement s’y faire sans trop de mal. Même si ces lèvres tièdes l’agaçaient à refuser l’insistance d’un réel baiser uniquement pour le taquiner. Jouer, jouer et jouer encore. Pourquoi continuait-il de le chatouiller ! Il était mourant ! Enfin, seulement quand ça l’arrangeait, c’était certain. Et puis, il ne le rattrapait pas. A dessein, il n’avait rien précisé quant à l’effet de ce « charme provocant » sur lui. Une évidence telle qu’elle en devenait insultante. Il ne pouvait prétendre qu’il trouvait Walrus irrésistible. Autre chose… Plutôt, Walrus était… était… Non, on n’en saurait rien. Il demeurerait le seul curieux de cette nuit funeste et ne souffrirait aucune indiscrétion le concernant. D’ailleurs…

— Masochiste toi-même. Tu sais très bien que je ne suis pas impulsif au point d’égorger quelqu’un, généralement… Même si elle est stupidement avide de sang, sur l’instant, elle est restée à mes yeux une petite fille. Alors je lui ai retourné la provocation sans trop de prudence. De toute façon, il faut bien que je me refroidisse la tête de temps en temps. Et interdiction de prendre exemple sur moi, tu m’entends ?
Irrité. Pris dans ses sentiments intérieurs qu’il ne pouvait décemment pas communiquer entièrement.
— Et… Je n’ai pas d’autre choix que de vivre avec toi. Mais si tu crois que je vais te faire le moindre aveu concret quant à ce que j’éprouve pour un garnement dans ton genre…

Bien sûr, il ne pouvait pas se défendre davantage, précisément parce que si Walrus n’avait pas été présent, Sylar serait piètrement mort noyé dans son sang. Quel défi ! Il s’en était fallu de peu. Vraiment peu. Lèvres légèrement pincées, il détourna le visage tandis que l’hilarité de son coéquipier faisait trembler les murs – tu vas réveiller l’autre monstre. Quand est-ce que la balle changerait de camp ? Quand est-ce qu’il ne serait plus le vulnérable ? Autrement dit, quand est-ce que Walrus plongerait à nouveau dans son passé ? Peut-être avait-il finalement accompli trop d’efforts pour souligner une indifférence intérieurement douteuse. Son coéquipier n’y avait vu que du feu, mais lui, Sylar, savait bien ce qu’il en était. Franchement. Il n’avait fait que lui rendre service en acceptant l’idée que, pour cette fois, la comédie valait mieux. Car jamais il ne pourrait le traiter avec cette compassion qu’il détestait tant, n’est-ce pas ? A force de manquer d’amour… On en refusait beaucoup pour ne plus devenir dépendant.
Sauver les apparences. Il remplirait la part du marché jusqu’au bout, officiellement pour ne pas ternir sa réputation d’impassible, officieusement pour le préserver lui.
Je l’étais.

— Oh.
Le « Oh. » traditionnel, de surprise simulée, sans le moindre sentiment. Le « Oh. » mondain.
Les premières énonciations suffirent à lui crier haut et fort le problème. Et il se souvint de ses propres paroles. Qui réussirait là où moi j’ai échoué. Le fameux remplacement. Le nouvel essai armé de l’erreur passée, le résultat, en conséquence, qui aspirait à être meilleur que le précédent model. La gravité revint à la charge. Mais une gravité presque soucieuse. Des sourcils à la limite de se froncer, un regard menaçant de noircir. Un battement de son cœur, plus prononcé que les autres, lui avait fait comprendre qu’il trouvait l’idée d’une petite Walrus – !! – tout bonnement adorable, néanmoins… Elle avait frappé un gros coup dans l’équilibre – déjà douteux ?! – de son frère et cela se voyait. Car pendant que l’un demandait juste qu’on le laissât tranquille, l’autre, semblait-il, voulait simplement être… aimé ? Oui, c’était évident, son coéquipier fleurait l’enfant blessé. Empestait, pour être exact. Un château déjà fragile ébranlé par le ciment même qui l’avait si mal fait. Le coup porté par une maman, volontairement ou non, pouvait percer très loin pourvu que son enfant fût en âge de la juger. Et Walrus, vraisemblablement, refusait cette responsabilité. Sylar aurait pu lui dire combien il fut soulageant de faire comprendre à ses parents le jugement dont ils avaient été victimes quelques années auparavant. Mais il ne voulait pas l’influencer alors qu’ils étaient tous les deux si différents. Sylar ne pouvait pas partager sa souffrance. Il avait aimé ses parents mais le discrédit l’avait emporté. Ils étaient les abandonnés dans l’histoire, pas lui. Du moins le croyait-il. Restait qu’il ne comptait pas prendre de risque avec Walrus. Il ne pouvait qu’espérer lui avoir été utile, et tant pis pour le reste. Walrus aurait-il, un jour, envie de tirer sa sœur de la misère ? Chercherait-il à la connaître ? Questions qu’il crut bon de ne pas poser pour l’instant. Car lui-même, s’il venait à apprendre l’agrandissement de son ancienne famille, ne s’en serait pas mêlé. Certes, il y avait dans son cas une sorte d’insensibilité en plus, mais…
… Mais chut. Silence. Assez de blessures mémorielles. Clignement des paupières pour clore la conversation ainsi que Walrus semblait le vouloir. Sylar se passerait de tout commentaire, sauf…

— … N’y pense plus, maintenant.
S’il le fallait, tout changerait. Et il veillerait lui-même à ce que Walrus ne restât pas prisonnier de ses spectres. Idiot de se faire du mal ainsi. Comme il aurait voulu lui assurer que se soucier trop longtemps de parents qui n’en valaient pas la peine relevait de la bêtise profonde. Mais il n’en avait pas le droit, n’est-ce pas ? Ne pas tout confondre, ne pas tout mélanger. Ne pas se laisser abuser par la subjectivité, sournoisement doublée de l’affection qu’il lui portait. Assez.
Le désir de lui faire oublier, peut-être ?
Non, assez.
Ou alors… Pas trop.
Sa gorge palpita avec fureur et ses yeux faillirent se fermer sans plus de cérémonie. Les lèvres de Walrus venaient de choisir pour lui. Pour eux. Ce n’était pas faute de ne l’avoir pas suivi du regard. Il l’avait vu approcher, félin capricieux, mais c’était comme s’il s’avérait toujours incapable de le voir arriver. Pour le plaisir, sans doute. La fausse et agréable surprise de sentir son contact. Il ne manqua pas de frémir, rendu plus sensible par sa faiblesse. Il n’avait pas encore assez de sang pour que celui-ci bouillît, par conséquent, sa peau tremblait à la place. Oh, oui, si cela ne tenait qu’à moi, je te ferais tout oublier, Walrus. Mais pas un murmure, pas une promesse. Ai-je su satisfaire ta curiosité ?

— En fait, tu ne m’aides pas vraiment à y réfléchir, répondit-il, faussement sérieux.

Il termina de réduire la distance qui les séparait, moins capricieux et « indécis » que son coéquipier. Le coin de la bouche d’abord, les lèvres pleines ensuite. Sylar ne voulait plus d’effleurements, et de fait, offrit à Walrus un lent baiser, contact persistant mariant fermeté et douceur. Etreinte de coton. Il fut sincèrement heureux de ne point ressentir l’essoufflement prématuré de la fois précédente, pouvant alors sévir sur les lèvres de Walrus comme bon lui semblait. Autant dire qu’il avait parfaitement interprété le soupir quémandant consolation. Il continua ainsi pendant un certain moment, prenant le soin de respirer calmement, savourant sans dévorer précipitamment – au diable les gloutons, prêt à retenir chaque ardeur afin de ne pas briser l’instant. L’excitation enflait, dans ses tempes, dans sa poitrine, sous sa peau. Il aspirait sa chaleur comme pour accélérer la guérison. Pour quelques minutes, il voulut bien y croire. Hélas… Une fois ses yeux ouverts, ses lèvres seules, ce fut bien la douleur qui l’enlaça de plus belle, le pressant de ses mains arachnéennes. Trouver une issue, vite. Il ne tomberait pas dans le piège d’un autre baiser, mais… Pourquoi ne pas profiter de leur torpeur pleine de désir pour mettre au point le programme des prochains jours ? A son avantage, naturellement. Il embrassa affectueusement le front de Walrus pour signifier que ce serait tout pour cette fois, et lui chuchota :
— Maintenant, oublions tout. Les accidents, la douleur, les excès de tendresse… tout. Pensons plutôt à…
Gonflé d’espoir !
Ce que je vais faire demain. Il posa son index sur la bouche de son coéquipier. Au cas où, laisse-moi parler d’abord.
Il allait tenter sa chance. Peut-être saurait-il convaincre Walrus qu’il n’avait pas besoin de rester cloitré au lit.
— Enfin, tu sais bien. Plus je bougerai, mieux je m’habituerai à la douleur, plus vite je me rétablirai… Non… ? Et puis ça m’embête de rester immobile, j’avais des plans ! Avant de croiser l’autre aliénée, j’étais avec un négociant, dont j’ai récupéré les clés de réserve. Mais il s’y trouve sans doute autre chose que des ingrédients… Autre chose susceptible de t’intéresser… Alors…
Ses lèvres se fendirent en un fin sourire niais, sourcils haussés, insolente provocation dont il n’usait que rarement. Mais cette expression et sa voix, en plus de narguer, informaient sans ambages qu’une condition trônait derrière. Une condition très facile à deviner : laisse-moi me lever au plus vite !
— J’ai pensé que tu pourrais m’accompagner. Ainsi, je ne serai pas seul, et tout le monde est content. Dis oui !

Il ne voulait pas rester coincé ici, espérait que dans quatre ou cinq jours au maximum, demain au minimum, il pourrait de nouveau déambuler avec ses jambes. Il le désirait tellement qu’il en était au point de partager la découverte de l’une de ses antres à secrets avec Walrus. Pour dire ! Mais, il ne savait pourquoi, la méfiance par défaut, sans doute, lui murmurait qu’il n’allait certainement pas s’en tirer si facilement.
Prêt à tous les sacrifices ? Peut-être, peut-être pas…
Anonymous
Invité
Invité
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: [b][color=#4a9cb0]« »[/color][/b] Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyDim 9 Aoû - 19:25

    Douce étreinte... Trop plein de sensualité. Désire à la capricieuse envolée. Différence d'avec les précédentes découvertes. Évidence... Maintenant, oublions tout. Les excès de tendresse aussi ? Certainement pas. Pensons plutôt à… Des huîtres ? Ce que je vais faire demain. Méfiance. Aussitôt suivi d'un de ces regards noirs dont j'avais le secret de fabrication. Férocité visuelle, perceptible froncement de sourcils. Et le tout silencieusement, s'il vous plait ! Involontairement, toutefois. Au cas où, au cas où... Il me connaissait bien, trop. La spontanéité m'aurait immédiatement poussé à exploser en multiples remontrances préventives si Sylar n'avait jugé bon de poser son index délicat sur mes lèvres. Non… ? Non. Non, non, non ! Je bouillais rageusement, diablotin silencieux, mais mes yeux n'en exprimait pas moins. Et puis... L'expression feinte, craquante, rarissime, irrésistible. Promesse alléchante, à n'en pas douter. Jamais, jamais Sylar n'avait quémandé que je l'accompagne dans l'une de ses explorations des tanières douteuses et débordantes de secrets qu'il avait le talent indéniable de dénicher. Jamais. Ce qui ne fit qu'accroitre ma contrariété ! Mordillant soudainement le doigt qui séquestrait les paroles abruptes et mesquines que je rêvais de lui lancer en pleine figure, je réfrénai malgré tout l'excès de colère...

    « Tu n'as pas le droit de... D'agir de la sorte. La satisfaction cuisante de pouvoir t'accompagner, mêlée à la contrariété évidente et le désire pur et simple de t'enfermer à double tours ici. Vraiment, tu es sans pitié. Dire que j'avais fait l'effort de ne pas mettre de sucre dans ton thé, si j'avais su... »

    Comme si le simple fait de mettre du sucre dans son thé pouvait constituer à lui tout seul une punition terrible ! De mon point de vue, c'en était bien une toutefois. Le sucre, c'était sacré ! Dans un sens comme dans l'autre. Et du sucre, croyez moi, il allait en bouffer Sylar.... Des mois, peut être des années, avec du thé au sucre, du sucre au thé !

    Renfrogné, indéniablement, je le délaissai sans remord afin d'aller ranger le plateau rempli de victuailles. Trébuchant sur l'un des restes funestes du tiroir de ma table de chevet, je me redressai presque trop vite et entrepris de shooter rageusement dans la montagne de débris de bois ! De toute manière, je ne pouvais pas lui faire plus de mal, alors... Qu'elle me servit de thérapie, c'était un bénéfice fortuit et non négligeable. Ayant abandonné l'idée de lui faire manger quoi que ce soit d'énergétique, je revins finalement au chevet de l'ancien mourant après avoir presque trop méticuleusement ordonné la cuisine. Magnifique moyen de passer mes nerfs sans entacher la soirée par la perte d'une seconde table de nuit, ou, qui sait, d'un tapis repeint au ketchup... Ah ! Vile tentation que la peinture au Ketchup ! Et puis, à peine posais-je de nouveau les yeux sur Sylar, mon terrible et séduisant Sylar... Que je lui concédais une victoire supplémentaire. Je n'étais certainement plus à ça près, n'est-ce pas ? Les ronflements de -Beurk - la gamine m'arrachèrent un grognement de mécontentement. Qu'elle occupa mon canapé, c'était une chose... Mais qu'elle menaça ainsi mon tendre sommeil en était une autre ! Un fois rendu au pays des songes, j'étais pire que la Belle aux Bois Dormant, silencieux comme un zombie - sauf que je ne bavais pas. L'ouragan Alice même ne venait pas à bout de mon sommeil à moins d'efforts plus qu'exceptionnels (ce qui, même pour Alice, tient du véritable exploit). En revanche, pour ce qui était de tomber raide endormi comme une méduse narcoleptique, on en était encore bien loin ! La moindre sonorité superflue m'obsédait rapidement. Quelque part, j'étais béni de ne me réveiller qu'au prix d'incomparables efforts...


    « Cette chose m'insupporte... Blondie avait le mérite de ne faire comme unique bruit que le flop inexistant des petites bulles qui venaient amoureusement cogner contre le verre de l'aquarium lorsque je venais lui donner à manger ! J'étais tenté de la garder rien que pour te contrarier. Car, vois-tu, elle est bien plus sale que moi lorsqu'elle s'amuse... Les tapis auraient morflé, elle se balade toujours pieds nus. »

    Lorsqu'elle s'amuse. Lorsqu'elle assassine sans scrupule les touristes du ports où nous habitons. Les pirates, à la rigueur, quelle importance ? Ces gens là fleurissent comme des champignons. A peine se débarrasse-t-on d'un des leurs qu'un autre refait surface, cuvant son Rhum et titubant en chantant ! Mais les touristes, cela risquait de nous porter préjudice. A Sylar et à moi. Et je n'avais pas l'intention de le permettre... Bercé par le flot d'images sanglantes, vagues souvenirs que je possédais de la sale mioche, je me saisis du corps si frêle et si léger avec négligence. De toute façon, droguée comme elle l'était, elle allait pioncer comme une bien heureuse encore longtemps !

    « Il faudra lacher la bête ailleurs que sur l'île, ou bien nous risquons fort d'en récolter bien trop de désagréments. »

    Trimbalant le petit monstre comme un sac de patates, je me précipitai déposer la chose encombrante dans le salon. Convaincu que Sylar ne désirait pas tomber nez à nez avec un Walrus couvert de son sang à son réveil, je m'étais déjà calmé sous les effluves bouillantes d'une douche délicieusement brulante. Je n'avais donc pas d'autre échappatoire que d'aller noyer la dévorante contrariété dans les songes. Tout en prenant garde à ne pas brusquer mon cher petit patient, je le délestai d'un de ses oreillers et l'installai de façon plus appropriée : marchand de sable auto-proclamé... Déboutonnant la chemise, j'entrepris de vérifier l'état des bandages non sans plaisir. Petite moue perverse au coin des lèvres, je m'entendis même lui adresser un 'chut' alors que je m'attelais à la tache. C'était la première fois que je déboutonnais l'une de ses chemises, peu importait la raison, il s'agissait d'une petite vengeance fort sympathique ! Je tardais d'ailleurs à refermer le dit vêtement, plus par jeu que par réel désire de vengeance... Volages et taquines, mes lèvres s'égarèrent un temps sur sa nuque.


    « Tu croirais à une hallucination si j’abusais de toi, là, tout de suite ? »

    Hilare, je l'embrassai soudain sans crier gare, avide bien qu'en proie à la délicieuse douceur déjà dévoilée plus tôt. Murmurant quelques mots avant de ricaner puérilement...


    « Les enfants s'endorment mieux avec un baiser de bonne nuit... Mais ça, tu le savais déjà je crois ? »

    Muni de mon sourire le plus ravageur, je pris malgré tout la peine de verrouiller la porte avant d'aller me glisser sous la couette... Je n'avais aucune envie de me réveiller poignardé par une gamine psychopathe ! Qui sait, elle était peut être somnambule. J'éteignis l'unique lampe encore en service, savourant l'arrivée soudaine de l'obscurité. Et puis, avide de posséder quelque chose de Sylar, mon Sylar, j'emprisonnai la main délicate et pâle dans la mienne.


    « Oui. Oui, oui, oui. Demain, je te conduirai où tu voudras. Mais ne vas pas t'imaginer que c'est sans condition. Nous reparlerons de celles-ci plus tard, je suis d'humeur opportuniste ce soir, grand bien t'en fasse ! Au moindre faux pas, je te ramène ici et je t'y séquestre jusqu'à ce que tu sois rétabli, est-ce clair ? »
Walrus
Walrus
team steak haché
team steak haché
HUMEUR : Bweh.
CITATION : « L'objet possédé est heureux tant que son propriétaire l'a à l'oeil... »

BOITE A JETONS : 0000

FICHE : La Cabane à Huîtres.
NOTEBOOK : Le moule à muffins
VIE SOCIALE : La pêche à la crevette
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? EmptyLun 10 Aoû - 21:11

Il y eut sans doute une surprise authentique dans les sourcils encore haussés lorsque son index fut l’heureuse, malheureuse, victime de quenottes sans pitié. Etonnant, en réalité, que son doigt n’eût pas été arraché. Parce que Sylar avait tout suivi, voyez-vous, chaque lueur, chaque frémissement, chaque expression. Mais il ne devait pas se sentir intimidé, encore moins reculer devant une réaction impulsive qu’il avait de toute façon prévue. C’était juste que ce contact… Eh bien, rien. Il retira son doigt, le dissimula sous son avant-bras comme une jeune fille honteuse, emportant dans sa retraite son air d’innocence au profit d’une presque moue réprobatrice. Il ne lui ferait pas le plaisir de rougir. Encore et toujours cette faiblesse qui faisait que tout lui montait trop vite à la tête. Une bonne excuse ? Mais oui !

Oh, naturellement, il ne tarda pas à réafficher une certaine satisfaction, délicieusement bercé par les mots de Walrus qui lui reprochait sans tort sa jubilation intérieure. Aisé à deviner. Bon joueur toutefois, pour ne pas dire idéal d’abnégation, Sylar ne fit aucun commentaire quant au thé que son coéquipier lui servait souvent. Le sarcasme ne saurait trouver sa place dans la stratégie persuasive qu’il s’efforçait d’appliquer. Son expression se radoucit – regarde comme je suis mignon – tranchant un peu plus dans la vulnérabilité soufflée par le sentiment. Patience. Silence insolent. Comme s’il avait déjà gagné. Pourtant, il n’en savait rien ! Il le caressa de sa quiétude cruelle, l’observa sans ciller ni s’offusquer de son comportement brutal. Mon joli petit chaton, il ne faut pas te briser les pattes. Pas une manœuvre pour faire du vacarme son dîner, pas une pensée pour la table de chevet définitivement anéantie. Il consomma tranquillement sa solitude, gardant sur ses traits l’ingénuité dangereuse de l’enfant qui sait convaincre. Il en darda impitoyablement Walrus à son retour, forçant même un deuxième sourire de niaiserie parodiée, avant de reprendre conscience d’une chose à son tour. Sans mauvais humour. Cette chose, assoiffée de sang qu’elle se prétendait, lui était complètement sortie de la tête malgré ses ronflements. Faussement compatissant, il hocha la tête et murmura :

— La fois de trop où tu me contrarieras, je ne répondrai plus de rien. Et va savoir ce que ça signifie.

Un reproche ? Peut-être. Il ne voulait pas garder cette fillette, encore moins si elle menaçait de salir ce qui lui appartenait. Il songea un instant que Walrus avait probablement du mal à se rappeler qu’il était lui-même capable de montrer les crocs, que sa blessure n’était, théoriquement, que provisoire et qu’il trouverait bien le moyen de reprendre ses droits lorsque cela s’imposerait. Mais à qui la faute ? C’était lui également qui le couvrait de privilèges, tout à fait conscient, en contrepartie et pour se rassurer, que son coéquipier ne s’accordait pas la bêtise au point de se trouver quelque laurier où reposer. Usant et enchanteur à la fois. Un régime si particulier. Il fallait regarder ce jeune homme en pionnier intrépide, sa soif de contradictions en guise de pioche et, qui savait, peut-être l’affection qu’il nourrissait vis-à-vis de Sylar en guise de loupiote. Egratigner la perfection, était-ce le but ? Trouver la faille qui mènerait à l’or ? Lui-même ne pensait pas à quel point Walrus en était proche. Son sourire n’avait pas disparu, preuve, certes factice, qu’il n’était pas contrarié. Qu’il ne soupçonnait rien.

— Et naturellement, tu te portes volontaire pour nous éviter le pire.

Comme s’il allait s’amuser à la promener en laisse. L’emmener loin d’ici, très bien, lui ne s’en chargerait pas. Ou alors, on savait très bien quel genre de destination il choisirait. Dans le genre de celles dont on ne revenait jamais. Qu’elle dormît ici ne l’enchantait déjà guère, s’il devait en prime en avoir la moindre responsabilité… Il réprima un soupir, sourire, sourire, alors que Walrus s’approchait de lui. C’était l’heure de dormir ? Il n’avait pas vraiment sommeil. Juste mal. Et comment fermer l’œil avec la présence d’une inconnue dans le salon ? Il se laissa pourtant faire, sans quitter son coéquipier du regard, comme s’il voulait lui rappeler sa précédente requête. Seulement, le programme prévoyait autre chose, de bien moins réjouissant pour lui. Les boutons ne sautaient pas, mais c’était le même genre de supplice. Lenteur et calcul, contemplation impudique, si bien qu’il voulut l’arrêter, et honteusement freiné par un Chut catégorique, se renfrogna. Ne pas rougir. Ne surtout pas rougir. Mais son cœur lui faisait mal, redoubla de vigueur au contact – damnation – des lèvres, explosa lorsque les mots tombèrent. Ses propres mots. Fièvre désinhibitrice qui aurait dû impliquer l’amnésie. Hélas, il avait tout entendu, oh, comme il devait mourir, manquer de s’étouffer dans sa satisfaction malsaine ! Trop abasourdi pour lui rendre son baiser, ses lèvres tremblantes contre les siennes, ses yeux devinrent farouches lorsqu’il se redressa. Coup de grâce. Voleur de rôle, semblait-il vouloir hurler. Mais Sylar n’hurlait jamais, et il eut déjà bien assez de peine à reprendre contenance.

— Je ne suis pas un enfant, contrairement à toi, chuchota-t-il imperceptiblement alors que Walrus fermait la porte.

Décidément, c’était trop. Trop pour son corps encore faible, trop pour ses joues qui avaient perdu leur assurance, réduites à la grossièreté de quelque péronnelle. Il les sentit rougir aussitôt la lumière éteinte, comme sa respiration se libéra soudain en un soupir de soulagement qu’il rendit muet. Une jeune fille s’emportait sans doute lorsqu’un bel homme lui manifestait son désir d’abuser d’elle. C’était ainsi. Et il en avait presque honte.
Demain je te conduirai où tu voudras. Des conditions, bien sûr. Sa main se crispa dans celle de son coéquipier. N’avait-il pas prévu qu’il ne s’en sortirait probablement pas si facilement ? Il sourit toutefois dans l’obscurité, reconnaissant malgré tout, cédant à Walrus la négociation qu’il méritait.

— Très bien. Merci…

Victoire, victoire ! Pour eux deux. N’était-ce pas merveilleux ? Il verrait en temps voulu. Pour l’heure, il se sentait brûlant sans l’être néanmoins. Il ne savait pourquoi. C’était comme si le regard de Walrus était encore sur lui, ses mains déboutonnant sa chemise un millier de fois, avidité, désir. Pervers. Walrus se rendait-il seulement compte de son emprise ? Lui-même qui ne la découvrait jamais entièrement en fut passablement bouleversé.
Il ne ferma pas l’œil de la nuit.

[Topic clos !]
Anonymous
Invité
Invité
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty

Contenu sponsorisé
Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ? Empty
Revenir en haut Aller en bas

Trompeur ou trompé, trompeuse ou trompée, qui passe qui trépasse ?

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut

Sujets similaires

-
» « Si l'on ne passe vite, on s'enfonce. » [PV GOLDY]» Madame Irma ♠ Se repentir du passé, s'ennuyer du présent, craindre l'avenir : telle est la vie.
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
 :: La Roche'Aile :: Péniche-
Sauter vers: